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Sur le terrain

Gestion de carrières : AFD : le Mouvement perpétuel

Sur le terrain | publié le : 10.12.2018 | Lys Zohin

L’Agence française de développement demande à tous les candidats à l’embauche de fournir un plan de carrière détaillé sur cinq ans dans l’institution publique. Tous les cinq ans aussi, les collaborateurs changent de poste.

Meng-Han Chiang s’en souvient très bien. Lorsque la jeune femme a postulé à l’Agence française de développement (AFD), en plus de ses diplômes (un master en finance d’HEC) et de ses compétences (elle a travaillé pour le ministère des Finances à Taïwan, ainsi que pour Total, avant d’intégrer Wavestone, un cabinet de conseil en transformation des entreprises), on lui a demandé un plan de carrière détaillé sur cinq ans dans l’organisation : « J’ai réfléchi, je me suis renseignée et j’ai soumis un projet », dit-elle. Bien lui en a pris, puisqu’elle a été embauchée ! Et si la demande l’a surprise il y a quelques mois lorsqu’elle a postulé, aujourd’hui, celle qui est devenue responsable projets RH-SIRH à l’AFD considère ce processus tout à fait normal. L’AFD est une organisation en mouvement, déclare-t-elle. Et cela vaut pour tous les collaborateurs. Au point que le système porte un nom en interne : le Mouvement, précisément. L’intérêt pour le collaborateur ou le futur salarié d’avoir une vision claire sur ses objectifs à terme est déterminant, selon la responsable projets RH. « Si un candidat ou un collaborateur ne sait pas ce qu’il veut, personne ne peut l’aider. En outre, si une entreprise veut des gens autour d’elle à l’avenir, elle se doit de donner un avenir à chacun des collaborateurs », conclut-elle.

Partenaire business RH

Le processus est bien rôdé. « Le « partenaire business RH » attribué à chaque candidat discute du plan avec celui qui serait son manager direct, envisage les étapes de même que la formation nécessaire, par exemple, pour arriver à l’objectif, puis revoit l’ensemble avec l’auteur du plan de carrière », poursuit-elle, pour conclure : « L’AFD est dans le domaine du développement et cela vaut également pour les individus qui font partie de l’organisation ».

Même chose pour les salariés déjà en poste – puisqu’ils changent d’affectation en moyenne tous les cinq ans. Pour ce faire, environ 20 % des postes sont remis en jeu chaque année et ouverts, en interne seulement, pour que chaque collaborateur puisse postuler. Pour gérer quelque 3 000 projets de développement dans une centaine de pays, grâce à ses 85 agences réparties sur cinq continents, l’AFD s’appuie sur 2 400 collaborateurs, de 100 nationalités différentes.

Pourquoi cette volonté de faire tourner les salariés par le biais de ce « Mouvement » ? D’abord, répond Meng-Han Chiang, parce que du fait que l’agence travaille dans une centaine de pays, les collaborateurs doivent pouvoir être exposés à différents environnements, différentes cultures, de façon à s’adapter rapidement en toutes circonstances.

« Il faut donc qu’ils passent d’un pays à un autre, mais aussi d’une fonction à une autre », explique la responsable projets RH de l’Agence, qui parle, en plus du français, l’anglais, le chinois et l’italien. D’ailleurs, elle déclare avec calme que si aujourd’hui elle travaille à la DRH, demain, elle sera peut-être active dans la lutte contre le réchauffement climatique. Et si elle est basée à Paris aujourd’hui, demain, elle sera peut-être à Bamako. Ou alors, elle dirigera une équipe quelque part dans le monde… Autant dire que toutes les évolutions – latérales, hiérarchiques, géographiques – sont possibles. Une façon également d’accompagner le salarié dans une montée en compétences variées, sans oublier que « dans certains pays, mieux vaut changer le personnel régulièrement pour éviter la corruption », souligne Meng-Han Chiang.

Pas de train-train

La gestion humaine fondée sur la pratique de mobilité systématisée (et associée, bien entendu, aux processus plus classiques de revue annuelle de la performance et du salaire, ainsi que des objectifs et des besoins en formation) met-elle des collaborateurs sous pression ? « Pas vraiment », assure Meng-Han Chiang. « Les gens ne travaillent pas à l’AFD par hasard, ils veulent servir une cause et ils aiment les défis, dit-elle. De quoi aussi éviter à certains de s’installer dans un train-train ou de croire que leur poste leur est dû… ».

La stratégie semble bien fonctionner pour l’Agence. Si l’on observe le « matching » entre les aspirations déclarées des candidats ou des salariés et les spécialistes dont l’Agence a besoin pour ses activités, le chiffre est à 70 %, selon les données de l’AFD.

Auteur

  • Lys Zohin