Issu d’un colloque du Cnam, ce nouveau livre de témoignages interroge la mutation du travail des cadres et des DRH face au numérique. Un recueil vivant et instructif.
Comment les cadres intermédiaires et les RH « digèrent-ils » l’évolution de leur métier face au numérique ? Synthèse d’un colloque du Cnam sur la gestion du changement, ce livre collectif en interroge certains aspects, à grand renfort de témoignages. Côté management, les auteurs se penchent longuement sur la stratégie de la satisfaction client (avis sur les réseaux sociaux, services en ligne) qui impacte les métiers des cadres, dans les collectivités locales, certains hôpitaux ou les banques. Avec son lot de « jonglage » pour former les équipes face à des clients plus exigeants, de flexibilité du travail (interventions en temps réel dans un service de voierie), voire de réduction d’effectifs dans la banque avec les services en ligne. Versant RH, l’ouvrage interroge surtout l’évolution des pratiques de recrutement avec le numérique. Avec cette question simple : les sites « emplois » des entreprises seraient-ils dépassés face aux réseaux comme LinkedIn ou Viadeo ? Oui, affirment les auteurs, en tout cas « pour trouver de nouveaux talents ». À noter, ce témoignage intéressant d’une DRH d’un grand groupe déplorant « le manque de moyens » pour gérer le site carrières : « Nous n’identifions pas les candidatures à faire passer dans les services. Nous renvoyons à nos managers l’image d’un service inefficace et passéiste. Certains ont arrêté de faire appel à nous et recrutent en utilisant des moyens non institutionnels, parfois très efficaces, comme leur page Facebook. » Pour contourner « la masse d’informations » du numérique, l’ouvrage propose quelques initiatives plus heureuses de DRH testant d’autres approches, comme des pré-entretiens vidéo ou des questionnaires en ligne pour trouver des candidats en interne. De quoi picorer des idées intéressantes. Mais en demanderaient-ils trop aux DRH ? « La mise en place du digital n’a rien d’évident » et reste perçue comme chronophage, estiment les auteurs. Alors que les directions attendent des RH qu’ils s’emparent du marketing numérique pour séduire les candidats (la fameuse image employeur), « les budgets ne suivent pas toujours », soulignent-ils. Au risque de décevoir les jeunes si la réalité ne suit pas, interrogés également dans le livre. Conclusion : « Sans un accompagnement des collaborateurs et sans moyens, les entreprises risquent, au mieux, de sous-évaluer le coût réel de la digitalisation du recrutement », préviennent les contributeurs. Et d’insister sur les nouvelles compétences dont les DRH auront besoin de s’entourer, du spécialiste du sourcing au marketeur RH, pour ne pas faire du recrutement numérique une coquille vide…