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Me Florent Millot : La chronique juridique d’avosial

Chroniques | publié le : 03.12.2018 | Florent Millot

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Me Florent Millot : La chronique juridique d’avosial

Crédit photo Florent Millot

Indemnité transactionnelle : le nouveau régime en matière de charges sociales

Jusqu’à présent, l’intégration dans l’assiette des cotisations sociales des sommes versées dans le cadre d’un protocole transactionnel, conclu à la suite de la rupture du contrat de travail, s’effectuait en appliquant les plafonds d’exonération prévus à l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale (et par renvoi à l’article 80 duodecies du Code général des impôts). Comme le précisent l’Acoss et la DSS, pour apprécier la limite d’exclusion d’assiette, il doit être fait masse de l’ensemble des indemnités versé au salarié dans le cadre des dispositions de l’article 80 duodecies du CGI, y compris les indemnités transactionnelles.

Cette approche est remise en cause par les arrêts des 15 mars et 21 juin 2018. La Cour de cassation, constatant que les indemnités transactionnelles ne sont pas au nombre des indemnités visées à l’article 80 duodecies du CGI, retient un principe d’assujettissement différent : l’indemnité transactionnelle est par principe comprise dans l’assiette des cotisations sociales, à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elle concourt, pour tout ou partie de son montant, à l’indemnisation d’un préjudice.

Dorénavant, plus question de seuils d’exonération. Ceux-ci sont réservés uniquement aux sommes listées à l’article 80 duodecies du CGI, dont ne fait pas partie l’indemnité transactionnelle.

Ces décisions signifient donc que l’exonération de cotisations de l’indemnité transactionnelle est conditionnée à la couverture d’un préjudice.

L’appréciation est évidemment très aléatoire et l’Urssaf comme le juge peuvent avoir des opinions différentes de celles des parties au protocole transactionnel.

Des précautions peuvent être observées pour réduire cet aléa, sachant qu’en cas de litige, la charge de prouver que l’indemnité compense un préjudice pèsera sur l’employeur :

• L’option peut être prise de continuer à intégrer les indemnités transactionnelles dans la masse des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail et soumettre à charges ce qui dépasse les plafonds d’exonération. Cette option est très sécurisée puisque, selon la Cour de cassation, l’indemnité transactionnelle peut éventuellement être totalement exonérée, sans considération de plafonds. Mais procéder de la sorte, c’est objectiver l’évaluation du préjudice en faisant usage de la « quantification légale » en matière d’indemnité versée à l’occasion de la rupture du contrat.

• Les termes de l’accord seront clés pour déterminer si l’indemnité transactionnelle concourt en tout ou partie à l’indemnisation d’un préjudice. Une attention particulière doit donc être portée à la rédaction du protocole :

– Si certaines sommes versées dans le cadre de la transaction ont une nature salariale, elles doivent être distinguées des sommes ayant un caractère indemnitaire.

– Il faut indiquer que l’indemnité versée est représentative de dommages et intérêts et qu’elle vient compenser des préjudices qu’il faut expressément identifier (perte de l’emploi, préjudice moral).

– S’agissant de la transaction faisant suite à un licenciement pour faute grave, il est de plus indispensable d’inscrire que l’employeur ne renonce pas à se prévaloir de la faute grave et que le salarié prend acte du fait qu’il n’est éligible à aucune indemnité de préavis. Le protocole devra rappeler que le salarié renonce à toute demande relative à l’exécution ou la rupture du contrat de travail.

Ce nouveau régime social des indemnités transactionnelles va certainement donner lieu à de nombreux litiges sur la question du préjudice.

Il faudra scruter les décisions à venir pour affiner encore la rédaction des protocoles transactionnels.

Auteur

  • Florent Millot