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Big data : Démarche « genrée » chez Faurecia

Le point sur | publié le : 26.11.2018 | L. Z.

L’équipementier automobile a opté pour une démarche de « gender diversity » en 2016. À la clé notamment, un travail en profondeur sur les écarts salariaux, big data à l’appui.

« Nous ferons tout ce que demande le ministère du Travail, bien entendu, assure Bérengère de Lestapis, vice-président compensation & benefits chez Faurecia. Mais nous continuerons également à effectuer les mesures et les éventuelles corrections en France et à l’international comme nous le faisons depuis 2016 avec nos outils de big data. » Cette spécialiste de la rémunération chez l’un des grands équipementiers automobiles fait allusion aux données massives, puisqu’elles portent sur six pays (France, Allemagne, Chine, Mexique, États-Unis, Pologne) et plus de 10 000 cadres, dont 20 % de femmes, envoyées chaque année depuis trois ans aux spécialistes de Galea (voir par ailleurs), qui les analysent selon des algorithmes éprouvés et font ensuite ressortir, au cours des sept à huit itérations que comporte la méthode, des groupes de plus en plus fins (une cinquantaine de personnes, in fine), permettant de vérifier que, toutes choses égales par ailleurs, le genre a – ou non – un impact sur le salaire. Une fois le travail accompli, l’outil produit des listes de femmes potentiellement discriminées. Ces listes sont ensuite envoyées aux RH de Faurecia, qui, armées des identités en face des données codées fournies au cabinet Galea, peuvent repérer nommément qui affiche un écart de salaire.

Cet exercice est intégré à une démarche plus large, portant sur la « gender diversity », adoptée en 2016 par le groupe et qui comporte six axes : l’amélioration de l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle, le développement des carrières, l’acquisition des talents, la formation, les réseaux – avec en particulier la création de Women at Faurecia –, et enfin, ce travail en profondeur sur les écarts salariaux, avec la mise en place d’une analyse de données massives et un éclairage particulier sur le genre lors de la revue annuelle des salaires.

Pas de robotisation

Néanmoins, « le big data est pour nous une aide à la décision. Il ne s’agit pas d’une robotisation », prévient Bérengère de Lestapis. L’outil a de quoi faire évoluer la façon dont travaillent les RH, mais il n’exclut pas, bien au contraire, l’analyse, l’argumentation, voire la prise de conscience de biais inconscients vis-à-vis d’une femme ou des femmes en général par les mêmes RH ou les managers. Une collaboratrice vient-elle d’entrer dans l’entreprise ? Cela explique peut-être un écart de salaire qui sera comblé au fur et à mesure qu’elle se déploiera dans la fonction. A-t-elle, de la part de ses équipes ou de son manager, une appréciation en dessous de la moyenne en ce qui concerne son comportement ou sa performance ? Autant d’éléments de nature à expliquer un écart de salaire – ou un biais inconscient…

Si la première analyse des données 2018 n’est pas encore terminée, celle de 2017, sur 12 000 cadres, dont 2 800 femmes, dans six pays, a fait ressortir 150 cas à étudier de près par les RH, précise Bérengère de Lestapis. Une fois tous les cas étudiés, il a été décidé, pour 70 d’entre eux – qui accusaient des écarts de rémunérations de l’ordre de 10 % – toutes choses étant égales par ailleurs –, de les traiter en donnant un coup de pouce supplémentaire lors de la revue annuelle sur les augmentations de salaires (et dont les deux critères de base sont l’analyse de la performance individuelle et la comparaison entre le salaire chez Faurecia et la tendance du marché en général). Dans les 80 autres, les RH pouvaient expliquer l’existence du fossé.

Cercle vertueux

« Les RH gardent aussi une attention particulière sur les cas qui ont été corrigés, pour vérifier ce qui se passe les années suivantes », précise encore Bérengère de Lestapis.

L’idée étant de ne pas recreuser le fossé une fois comblé, évidemment. Sur les informations préliminaires fournies par Galea pour 2018, rien ne semble indiquer que ce type de phénomène ait pu se produire, indique la spécialiste RH.

Mieux, elle estime que, grâce à la démarche de « gender diversity » – largement soutenue par la direction – la culture de l’entreprise a changé. La prise de conscience, côté RH et managers, est très positive, dit-elle. Côté collaborateurs, ces derniers ont accès aux résultats de la méthode utilisée pour « mouliner » les données massives, et semblent s’en féliciter, même si aucune enquête n’a été effectuée par les RH sur leur satisfaction. « Nous avons noté cependant que notre Mooc sur la rémunération, qui inclut la méthode choisie pour mesurer l’écart de salaires, a été consulté », se félicite Bérengère de Lestapis.

Auteur

  • L. Z.