logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Le point sur

« Le défi : articuler formations obligatoires et montée en compétences »

Le point sur | publié le : 19.11.2018 | Benjamin D’Alguerre

Image

« Le défi : articuler formations obligatoires et montée en compétences »

Crédit photo Benjamin D’Alguerre

Le Mooc « inter-banques » du CFPB-École supérieure de la banque a soufflé ses quatre bougies. Pour Gilles Macchia, son directeur R & D, le succès d’un Mooc repose avant tout sur la communauté d’apprenants que celui-ci est susceptible de fédérer.

Comment le CFPB en est-il venu à se lancer sur les Mooc ?

Nous avons commencé à nous y intéresser très tôt, dès 2012. À l’époque, cela nous apparaissait comme une modalité de formation intéressante puisqu’ils offraient la possibilité de créer de larges communautés d’apprenants. Ce que l’e-learning « classique » ne permet pas. Certains groupes bancaires avaient cependant déjà essayé ce mode de formation et s’en étaient détournés pour cause d’absence de résultats. Selon nous, ces échecs s’expliquaient par leur choix d’avoir mis en place des Mooc transmissifs (« X-Mooc ») qui ne sont jamais que des cours magistraux filmés. Cela nous a d’autant plus incités à aller, au contraire, vers le développement de Mooc collaboratifs (« C-Mooc ») qui comprennent une dimension sociale essentielle. C’est en tenant compte de ces bases que nous avons lancé, en 2014, notre cours destiné à développer la culture bancaire des salariés de la branche avec, comme partenaires, Axa Banque, LCL et BNP Paribas. Cette configuration convenait d’ailleurs parfaitement à une première expérimentation puisque nous avions réuni trois banques de tailles et de périmètres différents. Aujourd’hui, nous en sommes à notre quatrième promotion de participants et d’autres banques inscrivent des collaborateurs : Crédit mutuel, HSBC, Crédit agricole, mais aussi des établissements d’Afrique francophone. Notre Mooc rencontre d’ailleurs un certain succès puisque nous recensons 2 000 inscrits à chaque session dont 25 % poussent jusqu’à la certification finale (inscrite à l’inventaire du RNCP). C’est un beau ratio pour un Mooc.

Au-delà du vôtre, les Mooc sont-ils des dispositifs de formation régulièrement utilisés par le secteur bancaire ?

Assez peu, à ce que j’en vois. Seuls les Mooc liés à la transformation digitale sont vraiment prisés par les banques. Cela s’explique notamment par la forte augmentation de formations annuelles obligatoires au sein de notre secteur. Leurs définitions et modalités sont décidées par décret et soumises au contrôle de l’ACPR, l’autorité de régulation des banques. Cela laisse de moins en moins de temps pour d’autres formations proposées sous forme de Mooc ou sous d’autres formes d’ailleurs.

Finalement, les Mooc d’entreprise ont-ils tenu leur promesse initiale de former efficacement un maximum de collaborateurs comme cela a pu être annoncé lors de leur arrivée sur le marché voici quelques années ?

Il faut se méfier avec les effets d’annonce. Les Mooc ne sont qu’une modalité de formation venue s’ajouter à toutes celles qui existaient déjà. Selon moi, l’efficacité d’un Mooc est conditionnée au fait qu’il va susciter une large communauté apprenante. Et pour cela, il faut que son sujet s’y prête, intéresse le plus grand nombre et donne envie à un maximum d’apprenants de s’y impliquer. Pour notre Mooc inter-bancaire, nous essayons de créer cette communauté en confiant l’animation de certains forums à d’anciens « mooceurs » qui l’ont suivi au cours des années précédentes et qui peuvent donc partager leur expérience avec les nouveaux venus. Surtout, il faut se souvenir que les Mooc ne sont pas faits pour assurer des formations « lourdes », très techniques, qui exigent un fort accompagnement des apprenants.

On sait que les Opca étaient réticents à financer la formation digitale. Demain, la réforme offrira aux entreprises une vaste liberté en matière d’innovations pédagogiques. Dans le même temps, les fonds mutualisés de la formation disparaissent également pour les entreprises de plus de 50 salariés. Cela pourrait-il profiter au développement des Mooc ?

Oui. Mais pas seulement pour les Mooc. Dans le domaine bancaire, le plus gros défi à relever sera de parvenir à articuler ce qui relève des formations obligatoires et ce qui concerne le développement des compétences des salariés. Que les entreprises devront, en outre, financer sur leurs budgets propres. Les Mooc pourraient donc effectivement constituer un recours. Mais attention : le secteur a sans doute trop utilisé l’e-learning dans le passé au point de lasser les collaborateurs. Cela reprend doucement depuis 2010, mais il faudra veiller à ne pas saturer les salariés. Trop de Mooc pourraient tuer les Mooc !

Auteur

  • Benjamin D’Alguerre