Intermarché mise sur la formation pour recruter ses futurs directeurs d’hypermarchés et de supermarchés. À cet effet, l’enseigne aux mousquetaires a choisi de s’associer avec l’Idrac Business School et l’association professionnelle DCF (Dirigeants commerciaux de France) afin de développer un cursus de formation inédit « Manager et dirigeant de la grande distribution ». Réalisée en contrat de professionnalisation, cette formation oriente ses apprenants vers un titre professionnel équivalent à un master 2. Cerise sur le gâteau, Intermarché s’engage à offrir un CDI de directeur (ou de directeur adjoint) dans l’un de ses magasins à ceux qui auront décroché leur diplôme à l’issue de leurs deux années de parcours. Une première promotion de quinze personnes entrera dans ce cursus dès septembre 2019 au sein de l’un des campus de l’Idrac. Paris ou Lyon, la décision finale n’est pas encore tranchée.

Pour Intermarché, cette manière inédite de recruter répond aux profonds changements que connaît le métier de la grande distribution. « La fonction commerciale se transforme, les futurs dirigeants vont devoir intégrer l’intelligence artificielle dans leur métier. Nous nous devons d’accompagner cette évolution », explique Laurent Espine, directeur d’Idrac Business School. « La grande distribution devient de plus en plus exigeante professionnellement sur la partie commerciale, légale, mais aussi digitale », abonde Éric Lanciaux, DRH du groupe Les Mousquetaires. L’enseigne investit ainsi de plus en plus dans le secteur du drive qui, en 2018, a connu une croissance de 16 %, deux fois supérieure à celle du marché. « Nous avons besoin de managers sensibilisés à l’IA. L’évolution multimodale de nos magasins passera de toute façon par l’intelligence artificielle, c’est le sens de l’histoire ! », résume-t-il.

Pas étonnant, donc, que le cursus coconstruit entre l’Idrac et Intermarché fasse la part belle au développement de la stratégie et de l’innovation économique, associant contenus habituels du catalogue de la Business School et programmes spécifiques à la formation, développés spécialement pour ce cursus précis. « Ce que nous voulons former, ce sont surtout des entrepreneurs », insiste Éric Lanciaux. La formation, qui pourra comprendre un volet e-learning, sera accessible à tout candidat pouvant justifier d’un master 1 (ou équivalent bac + 3) même obtenu dans un domaine autre que celui du commerce. « C’est la compétence commerciale à l’état brut du candidat qui va nous intéresser, même s’il sort d’un cursus juridique ou scientifique ! », lance Laurent Espine. Durant leurs parcours en alternance, les apprenants seront tutorés par les directeurs des magasins et seront mêmes amenés, pendant une semaine, à prendre complètement la direction des enseignes dans le cadre de simulations en situation de travail. Si cette nouvelle formation tient ses promesses à l’issue de sa première promotion, elle sera déployée largement dans les réseaux de l’Idrac (huit écoles en France métropolitaine) et d’Intermarché.

En mettant en place cette formation largement ouverte aux nouvelles exigences induites par le digital, Intermarché fait figure de pionnier. À en croire une étude Opinionway commandée par DCF (Dirigeants commerciaux de France) et dévoilée le 19 septembre, les entreprises françaises semblent ne pas avoir encore réalisé que leur évolution passait par la transformation de leurs fonctions commerciales. « L’insuffisance de culture et d’intelligence commerciale explique une bonne part du déficit de notre balance commerciale », regrette Jean Muller, président de DCF. Selon le baromètre, 43 % des chefs d’entreprise considèrent que le système de formation initiale forme mal les futurs commerciaux. Conséquence de quoi, 67 % des sondés indiquent avoir des problèmes à en recruter. Selon DCF, 150 000 postes de commerciaux ne trouveraient pas preneurs, faute de compétences. « La France forme des techniciens… pas des commerciaux dotés de la culture du métier », explique Michael Nino, chargé de comptes au sein de l’agence marketing ComData. Comment expliquer ce manque de compétences commerciales ? « En France, les établissements qui se donnent le titre de Business Schools sont le plus souvent des instituts de management ou de RH. Dans leurs cursus, les compétences commerciales pures passent souvent au second plan ! », avertit-on à l’Idrac.