De nombreuses entreprises de Woippy, dans la banlieue de Metz, se plaignent de difficultés de recrutement dans les postes techniques, dont des mécaniciens poids lourds. La Maison de l’emploi et de la formation et le groupe d’intérim Axia coopèrent pour leur apporter une réponse de proximité.
À Woippy, banlieue pauvre de Metz, le chômage culmine à 27 % dans les quartiers classés politique de la ville, qui regroupent près de la moitié des 13 000 habitants de la commune. Dans le même temps, les nombreuses entreprises du territoire rencontrent les plus grandes difficultés à recruter des chauffeurs, mécaniciens ou logisticiens.
En lien avec les employeurs et le Greta, la Maison de l’emploi et de la formation (Mef) de la ville et l’agence d’intérim Axia ont créé une méthode inspirée des filières courtes pour atténuer ce paradoxe. Fin 2016, une première expérience a permis de recruter 50 logisticiens pour répondre aux besoins d’AGE Logistique, qui venait de s’implanter dans la commune voisine d’Ennery. Cet automne, douze stagiaires entameront un certificat de qualification professionnelle qui leur garantira un emploi de mécanicien poids lourds auprès de cinq entreprises locales.
La réparation d’un moteur de camion ne s’improvisant pas, la sélection des candidats à la formation revêt une importance cruciale. « Il faut sortir du jeu de dupes où les uns font semblant de chercher du travail et les autres semblant de les former. Les places de stagiaires sont rares et je ne veux pas y inclure des touristes. J’ai donc mis au point une méthode qui n’exclut personne, mais qui intègre en fonction des aspirations et du potentiel de chacun », explique Jean-Marc Teutsch, responsable formation innovation recrutement auprès du groupe Axia.
La sélection s’effectue en plusieurs étapes, le tamisage conduisant à retenir en moyenne un candidat sur dix. Dans un premier temps, une large campagne de sensibilisation annonce les besoins en recrutement et les prérequis exigés – en l’occurrence, une appétence pour la mécanique et des notions de base du fonctionnement d’un moteur. La Mef ne se contente pas d’informer les demandeurs d’emploi recensés sur ses fichiers. Ses équipes sortent de leurs murs et vont au contact de la population dans les marchés et autres lieux publics. « Nous nous adressons à un public souvent très peu qualifié, prêt à travailler mais trop découragé pour rechercher un emploi en poussant la porte d’une agence d’intérim ou d’une mission locale. Le contact direct fonctionne : fin 2016, 200 personnes patientaient avant l’ouverture des portes pour postuler aux emplois de logisticiens », souligne Stéphanie Kiss, responsable de la Mef.
La première réunion collective insiste sur les compétences, même empiriques, que les participants sont invités à démontrer au cours d’une autoévaluation. Le vivier de CV ainsi constitué pourra être utilisé à d’autres occasions. Un deuxième entretien, individuel cette fois, permet de confirmer la motivation des candidats, qui sont ensuite convoqués à une séance sur un banc d’essai. Au cours de cette étape – la plus éliminatoire –, un tuteur de l’entreprise examine les gestes et postures révélatrices du potentiel de la personne. S’il est convaincu, elle sera invitée à suivre une semaine en entreprise dans le cadre de la période de mise en situation en milieu professionnel (PMSP) proposée par Pôle emploi. Les liens entre le tuteur et le futur apprenti s’en trouvent renforcés.
Au terme de cette immersion, le stagiaire intégrera un contrat de professionnalisation d’une durée de huit mois, dont les trois quarts auront lieu en entreprise. Il sera payé au Smic grâce au cofinancement de l’employeur et du FAF.TT, l’Opca de l’intérim. La formation théorique se tiendra au Greta de Lorraine Nord, implanté dans le seul lycée professionnel de la Moselle à être équipé d’une fosse et d’un équipement poids lourds. Groupe Axia vise 100 % de CDI à l’issue de la formation et regrette le manque de moyens qui permettrait d’amplifier ce succès. « Le plateau technique du lycée n’est pas extensible et le nombre de formateurs permet de former au total 36 mécaniciens poids lourds par an. Il en faudrait le triple », estime Jean-Marc Teutsch. Les chefs d’entreprise ayant recruté dans le vivier local ont quant à eux témoigné, à l’initiative de la Mef, de leur entière satisfaction.