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Relations sociales Suresnes, la ville-entreprise

Le point sur | publié le : 15.10.2018 | Lys Zohin

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Relations sociales Suresnes, la ville-entreprise

Crédit photo Lys Zohin

Pionnière en matière de dialogue social, la ville de Suresnes veut essaimer son concept de dialogue social renforcé. En France comme ailleurs. Pour échanger sur les bonnes pratiques dans ce domaine, elle organise, le 18 octobre, les 6e Rencontres du dialogue social.

Elle avoue – avec une satisfaction non dissimulée – qu’elle fait son petit effet lorsqu’elle proclame, dans ses échanges avec des élus ou des chefs d’entreprise, que « le taux de syndicalisation est bien trop faible en France ». Beatrice de Lavalette, élue (UDI), adjointe au maire de Suresnes (92) et vice-présidente du conseil régional d’Île-de-France, chargée du dialogue social, milite en effet depuis une dizaine d’années pour un dialogue social de qualité, qui, selon elle, manque encore dans l’Hexagone. Et qui passe par une plus grande représentation syndicale. Pour faire essaimer ce concept, elle organise, à Suresnes, les 6e Rencontres du dialogue social des secteurs public et privé le 18 octobre. Car elle est convaincue qu’un tel dialogue offre, à travers la satisfaction et l’engagement des collaborateurs, la garantie d’une performance économique accrue pour les organisations, qu’elles soient publiques ou privées.

Elle s’est d’ailleurs inspirée d’initiatives privées pour signer plusieurs accords avec les partenaires sociaux de la Ville. Ainsi, à l’image d’AXA France, qui a lancé, dès 1990, un chèque syndical d’une cinquantaine d’euros, aujourd’hui, Suresnes offre le même dispositif à chaque salarié. Ce dernier, qui le reçoit chez lui, pourra, s’il le souhaite, le donner à l’organisation syndicale de son choix, afin de contribuer à la formation des représentants, à leurs déplacements, à l’achat de matériel… « C’est une occasion pour les syndicats de mesurer leur audience et de faire valoir les services qu’ils offrent aux collaborateurs », déclare ainsi Sibylle Quéré-Becker, directrice du développement social chez AXA France.

Salaire au mérite

Prenant exemple sur AXA France, Suresnes l’a, d’une certaine façon, dépassée. Alors que le variable est une tradition dans le secteur de la banque-assurance, Suresnes a mis en œuvre un régime indemnitaire au mérite depuis 2015, avec des bonus et des malus en cas de bonne ou de mauvaise performance, le tout encadré par des critères stricts, négociés avec les syndicats. « Nous avons aussi fait un accord pour ouvrir la médiathèque le dimanche et nous n’avons pas connu un jour de grève depuis une éternité ! », précise l’adjointe au maire. La municipalité, à Suresnes, a signé, au total, une vingtaine d’accords sur le handicap, l’égalité femmes/hommes, la qualité de vie au travail, sans oublier une charte de reconnaissance du parcours syndical, approuvée par l’ensemble des représentants syndicaux et visant à accompagner les agents dans la conciliation des deux parcours, syndical et professionnel, pour favoriser l’engagement syndical. AXA France, de son côté, a une longue tradition de dialogue social, avec la signature sur trois ans d’une soixantaine d’accords avec ses organisations syndicales, qui vont de la transition activité-retraite à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), en passant par le télétravail et le droit syndical. De même qu’AXA en France organise tous les ans un forum économique et social dans ses locaux, qui réunit direction et partenaires sociaux ainsi que des intervenants extérieurs, dans le but de réfléchir et d’interagir sur des thèmes prospectifs. « Nous sommes persuadés qu’avec des partenaires sociaux bien formés et bien informés, nous avons un dialogue social de meilleure qualité », explique Sibylle Quéré-Becker. D’autant que « les partenaires sociaux sont des vecteurs d’opinion au sein de l’entreprise, en plus d’être les porte-paroles des collaborateurs. Leur parole est importante à écouter », ajoute-t-elle. Une écoute essentielle et un dialogue crucial en cette période de transformation et de recherche de compétitivité des entreprises, puisque les enjeux doivent être compris par toutes les parties prenantes si l’entreprise veut réussir sa mue et accéder à la pérennité. « Le dialogue social nous nourrit mutuellement », conclut à cet égard la directrice du développement social chez AXA France.

Mauvais classement de la France

Si AXA France n’a pas fait d’études pour vérifier que sa performance économique s’est accrue grâce au dialogue social, « les pays les mieux classés en matière de compétitivité sont également ceux qui affichent la meilleure performance en matière de dialogue social », affirme Béatrice de Lavalette, en se fondant sur la corrélation, établie par les études du Forum économique mondial, notamment, entre compétitivité économique et qualité du dialogue social.

Or la France a des progrès à faire dans ces deux domaines… Le rapport 2017/2018 du Forum économique mondial ne la classe que 22e en matière de compétitivité, tandis qu’en ce qui concerne le dialogue social, elle se trouve dans les profondeurs du classement, à la 109e place. « Et encore, en 2015, la France était classée 116e ! », tonne Béatrice de Lavalette. Autant dire que le taux de syndicalisation, qui ne s’affiche qu’à 8 % en France, contre une moyenne de 23 % en Europe et un niveau de 78 % en Suède, ne permet pas des négociations constructives entre patronat et syndicats, et, de manière générale, ne contribue pas à un dialogue social apaisé, comme c’est le cas en Suède, par exemple.

Sur fond de loi Pacte, l’élue veut passer à la vitesse supérieure. Elle rêve non seulement de créer, comme dans le cadre des 6e Rencontres du dialogue social, des occasions supplémentaires d’échanger sur les bonnes pratiques des entreprises comme des organisations publiques, françaises ou étrangères, mais veut s’embarquer dans une croisade à travers la France, pour convaincre, toujours et encore, des bienfaits du dialogue social, dans les entreprises comme dans les administrations et développer cette nouvelle culture, à laquelle, signe que les choses bougent quand même en France, de plus en plus de DRH semblent vouloir adhérer…

Auteur

  • Lys Zohin