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Canada : Québec veut bannir les signes religieux dans les entreprises publiques

L’actualité | publié le : 15.10.2018 | Ludovic Hirtzmann

Le nouveau Premier ministre du Québec, François Legault, veut interdire les signes religieux dans les entreprises de l’État.

Turbans, kippas, croix et voiles seront bientôt interdits dans les entreprises publiques du Québec. Ce sera la première loi du gouvernement populiste de François Legault, chef de la Coalition avenir Québec (CAQ). Les contrevenants perdront leur emploi. La nouvelle législation concernera les fonctionnaires et agents du service public en situation d’autorité, tels que les enseignants, policiers, magistrats ou gardiens de prisons. « Les personnes auront la possibilité de se relocaliser, d’occuper un autre emploi, si elles souhaitent maintenir le port du signe religieux », a précisé la députée Geneviève Guilbault, l’une des porte-paroles du gouvernement de transition lors d’une entrevue aux médias. Le Premier ministre sortant, Philippe Couillard, a situé la CAQ « à l’extrême droite ». Marine Le Pen a assuré François Legault de son soutien au lendemain de sa victoire le 1er octobre.

Professeur en relations du travail à l’université du Québec à Trois-Rivières, Jean-Claude Bernatchez confie : « Les néo-québécois sont de plus en plus présents dans les entreprises. Le Québec a promulgué en 2002 la loi d’accès à l’égalité en emploi qui impose aux entreprises publiques d’employer une main-d’œuvre, qui, sur le plan socio-démographique, est analogue aux caractéristiques démographiques de la population de leur bassin de recrutement », avant d’ajouter : « La présence des signes religieux en contexte de travail est donc un phénomène appelé à se développer. »

Espace multi-confessionnel

Si, dans les entreprises publiques québécoises, les pratiquants qui s’affichent sont rares, dans le privé, les entreprises ont créé des locaux de prière multiconfessionnels. « Toutes les religions cohabitent dans notre entreprise. Il y a une petite salle qui est réservée aux prières », confie un cadre qui demande l’anonymat. Local de prière ou aménagements horaires religieux sont fréquents. La Commission scolaire anglophone de Montréal accorde par exemple de deux à quatre jours de congés payés religieux par an.

Tant Jean-Claude Bernatchez que le professeur Gilles Trudeau de l’université de Montréal, spécialiste des relations de travail, estiment que les conflits entre les employés qui portent des signes religieux et la majorité qui n’en portent pas sont rares.

Québec contre Canada

Alors pourquoi ce débat ? D’abord par question de principe, mais aussi par une différence de perception entre le Canada et le Québec.

Dans le très multiculturel Canada, la société doit s’adapter à l’étranger et non l’inverse et la liberté religieuse prime sur tout. Depuis quelques années, au Canada anglais, les demandes d’accommodements religieux se multiplient dans le travail.

Les gendarmes d’origine sikh gardent leurs turbans. Dans les entreprises publiques anglophones fédérales, des employées portent le voile. Déjà au Québec, lors de l’adoption de la loi 62, des chauffeurs de bus avaient déploré un texte difficile à appliquer au quotidien, refusant de devenir des policiers du niqab. Les associations musulmanes avaient, elles, dénoncé une loi qui violait leur liberté religieuse. Le futur texte du nouvel exécutif sera donc certainement contesté en justice par des travailleurs, ce qui promet une belle bataille entre les différentes communautés religieuses et l’État.

Auteur

  • Ludovic Hirtzmann