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Sur le terrain

Une conversation privée ne peut justifier un licenciement.

Sur le terrain | publié le : 08.10.2018 | Laurent Beljean

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Une conversation privée ne peut justifier un licenciement.

Crédit photo Laurent Beljean

La liberté d’expression trouve notamment ses limites dans le caractère public des dénigrements ou injures exposés par le salarié.

C’est ainsi que la jurisprudence s’est déjà prononcée sur le fait que des propos tenus sur « le mur » d’un réseau social accessible à tout un chacun avaient une nature publique, ce qui permettait à l’employeur de faire état de ces propos jugés excessifs et de les sanctionner.

Mais qu’en est-il lorsque ces propos sont tenus dans le cadre d’un groupe virtuel fermé ? Une salariée licenciée pour faute grave après avoir tenu des propos qualifiés d’injurieux et d’humiliants à l’encontre de son employeur sur un réseau social, avait saisi la juridiction prud’homale afin de contester la légitimité de la rupture de son contrat de travail.

La cour d’appel après avoir confirmé la nature injurieuse et dénigrante des propos tenus par la salariée, avait considéré néanmoins le licenciement sans motif réel ni sérieux dès lors que l’employeur n’avait pas démontré le caractère public des échanges. La Cour de cassation confirme par une décision du 12 septembre 2018 cette analyse.

Les hauts magistrats indiquent en effet que les propos qui avaient été diffusés sur le compte ouvert par la salariée sur le site Facebook n’étaient accessibles que des personnes agréées par cette dernière et se trouvaient en petit nombre, c’est-à-dire 14 personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation privée.

Cette décision laisse en définitive à l’appréciation des juges du fond le soin de qualifier de privés ou de publics les échanges entretenus sur les réseaux sociaux. S’il est certain que des échanges laissés sur un espace ouvert à tout internaute doivent être qualifiés de publics, il n’est pas pour autant évident que le seul fait d’avoir constitué un groupe fermé dont l’accès nécessite l’autorisation préalable du salarié suffise à lui conférer un caractère privé. Les hauts magistrats relèvent en effet que les juges du fond ont estimé que la faible composition de ce groupe fermé lui conférait un caractère privé. Il pourrait en être autrement si le nombre d’accès à ce groupe était beaucoup plus important, ou si ce groupe était accessible à d’autres personnes que les seuls salariés de l’entreprise.

Les décisions futures nous apprendrons à partir de quelle audience un « club privé » virtuel perdra son caractère sélect. Laurent Beljean, avocat en droit social.

Auteur

  • Laurent Beljean