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L’humour, pour échapper au lourd

Chroniques | publié le : 17.09.2018 |

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L’humour, pour échapper au lourd

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Philippe Détrie la maison du management

Qui n’aime pas l’humour ?

Comment ne pas apprécier cet état d’esprit plus léger que l’air, plus ingénu que la critique, plus joyeux que la résignation, plus subtil que le calembour, plus bienveillant que l’ironie, plus spontané que la bête histoire belge éculée… ? L’humour ne se prend pas au sérieux, il est signe d’intelligence (analyse de la situation), de complicité et souvent de repartie immédiate (un humoriste peut très bien n’avoir aucun humour). Il se joue de l’ordre établi et désarçonne sans méchanceté : c’est une forme quasi amicale d’interprétation de la réalité et parfois de résistance non-violente. Vouloir le définir, c’est déjà prendre le risque d’en manquer. Voltaire confirme : « Ceux qui cherchent des causes métaphysiques au rire ne sont pas gais ». Bergson parle d’« interférence de deux idées dans la même phrase ». Disons que l’humour rapproche dans un élan ludique deux réalités contraires qui se télescopent de façon inattendue. Il s’empare de formes très codées, très respectables et y glisse un deuxième sens qui en est comme le négatif. Il juxtapose le réel et l’imaginé. Le paradoxe est l’emblème de l’humour : présenter ce qui ne va pas de soi comme allant de soi, ou inversement ce qui va de soi comme n’allant pas de soi. Freud citait le condamné à mort : « La semaine commence bien. » Raymond Devos : « Mon pied droit est jaloux de mon pied gauche. Quand l’un avance, l’autre veut le dépasser. Et moi, comme un imbécile, je marche. » Il y a humour quand le sens vacille gaiement.

Un drôle de savoir-être

Problème : 97 % des gens pensent avoir un sens de l’humour supérieur à la moyenne ! On valide ici que le monde se divise bien en trois : ceux qui savent compter et les autres…

L’humour est une disposition qui relativise une situation, détend le corps, produit de la dopamine, favorise la communication, stimule la créativité, développe le plaisir de travailler ensemble… Et c’est gratuit ! Pourquoi ne pas obliger son enseignement à l’école ? Valorisons-le au moins par l’attribution d’un prix d’humour dans chaque classe : les perles du mois. Mais l’humour n’a pas que des qualités : son persiflage n’est pas toujours partagé. Il déplace le problème, il peut tirer d’embarras mais pas d’affaire, selon l’expression de l’écrivain Louis Scutenaire. C’est le manager qui dit : « Pour vous prouver ma loyauté, je suis prêt à trahir qui vous voulez. » Ou : « Si tu as besoin de quelque chose, je suis à ta disposition, je te dirai tout de suite comment t’en passer. » Je pense qu’on peut plaisanter de tout, avec n’importe qui, mais à condition de ni blesser ni dégrader. L’humour est une matière subtile, tout dépend du contexte finalement…

L’humour : l’avenir de la relation ?

L’entreprise avait jusqu’à présent peu aimé l’humour qui apparaissait comme l’envers du sérieux et de ce qui est utile, efficace et fiable, de tout ce qu’elle cultive, étant le lieu par excellence de tension vers des objectifs et de rigueur. Je me rappelle encore l’éclat de rire de la vendeuse de la FNAC alors que je cherchais un livre sur l’humour en entreprise : « Ça existe, ça ? ». Aujourd’hui l’entreprise s’aperçoit que cet état d’esprit favorise l’implication, la connivence. Et que ce n’est pas un simple accessoire rhétorique mais une façon de créer de meilleures relations au travail. Elle en a besoin pour respirer et pour alléger le stress permanent de certaines professions à tenue ou à risque, comme les croque-morts (qui entre eux sont tout sauf sinistres, je peux en témoigner) ou les militaires (vous savez, ceux qui ne font rien, mais qui le font de bonne heure). L’humour c’est se détendre, adoucir, questionner, relativiser, humaniser, créer du lien… Réapprenons à rire et soyons heureux : c’est là le secret du vrai bonheur !