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Éloge du pragmatisme

Chroniques | publié le : 18.06.2018 |

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Éloge du pragmatisme

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Philippe Détrie la maison du management

Le pragmatisme n’a pas bonne presse en France. Certaines élites considèrent que plus c’est théorique, plus c’est noble. Plus vous faites de l’application, plus c’est vulgaire, voire mercantile. Les Canadiens nous moquent tendrement : « Vous les Français, vous reconnaissez quand ça marche. Mais vous ajoutez tout de suite après : Oui d’accord, mais en théorie ? »

Notre penchant culturel pour l’intellectualisation et le plaisir de la spéculation nous fait admirer celui qui pense plus que celui qui met en œuvre, le concepteur plus que l’opérationnel. Les connaissances et le raisonnement sont survalorisés, ce sont d’ailleurs les seules clés d’une progression tout au long de notre vie scolaire et d’étudiant. L’action ne serait bonne que pour les manuels sans cerveau : vive les gros bras et les petites mains.

Limites de l’intellectualisme

Il ne s’agit pas de dénigrer les apports de la théorie, de la capacité à formuler une relation de cause à effet.

« Rien n’est aussi pratique qu’une bonne théorie », nous lance avec défi le psychosociologue Kurt Lewin. Il est vrai que disposer d’un système explicatif du monde et des événements satisfait notre quête de sens et repose l’esprit : un préjugé économise tant de dilemmes inutiles et fatigants ! Le bonheur pour un marketeur serait d’adapter le marché aux réalités de sa recherche !

L’opposition du sens pratique à l’intellectualisation constitue le trait principal de la définition du pragmatisme. Mais le pragmatique réfléchit aussi et pense à une solution pratique. Il sait utiliser les bonnes compétences à un instant t sans sur-réfléchir ni sur-penser, ce qui mène le plus souvent à l’inaction et la paralysie. Il n’est pas dénué d’intellect comme on pourrait le théoriser !

L’effet des faits

Ce ne sont pas les idées qui changent le monde, ce sont les caractères. Ce sont les entrepreneurs qui, bien sûr à partir d’idées plus ou moins neuves, font évoluer le cours des choses. Pragmatisme vient du grec pragma (le résultat de la praxis, l’action en grec) : ceci signifie être proche du concret, du particulier, de l’action et s’oppose aux idées de l’intellectualisme considérées comme abstraites et vagues. La religion du fait. Un pragmatique fait preuve d’action, recherche des solutions viables et fiables, il s’inscrit dans le réel. Il sait prendre en main une situation complexe, s’adapter aux contraintes de la réalité, évaluer les différentes conséquences de ses actions. Il ne se soucie que d’efficacité, et cette qualité, l’entreprise aime.

Vive le GBS, le grand bon sens

En fait (c’est le cas de le dire), une bonne idée est une idée qui marche, un bon plan est un plan qui donne des résultats. Nous savons qu’en entreprise, les grandes idées ont besoin autant de train d’atterrissage que d’ailes.

Descartes écrit que « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ». Revenons plutôt à Juvénal pour qui « le sens commun est le sens rare ». Ce dernier a raison : il n’y aurait pas toutes ces guerres dévastatrices, ces conflits d’ego puérils et vaniteux, ces idéologies tordues qui font croire par exemple que si on tue un homme, on est un assassin, si on en tue des milliers, on est un héros ! Le bon sens est loin de nos vies ! Tellement tentant d’aller vivre en Théorie, car en Théorie tout se passe bien…

Réhabilitons le pragmatisme

Rappelons la Prière de la Sérénité de Niebuhr, attribuée parfois par erreur à Marc Aurèle ou François d’Assise : « Donnez-moi la sérénité d’accepter les choses que je ne peux changer, le courage de changer celles que je peux changer, et la sagesse de distinguer les premières des secondes. »

Voici une bonne philosophie du pragmatisme. Vous pouvez la relire ou tourner la page.