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Management : Le télétravail, symbole d’une révolution culturelle plus large

L’enquête | publié le : 12.03.2018 | Lys Zohin

Pour nombre de DRH, l’accord sur le télétravail permet d’impulser une nouvelle dynamique dans l’entreprise et de renforcer la confiance. Les managers sont souvent ceux qui ont le plus de mal…

Que ce soit pour répondre à une demande de la part des salariés, impulser une nouvelle culture d’entreprise ou simplement accompagner un changement plus ponctuel, comme un déménagement, nombreuses sont les entreprises qui profitent des nouveaux dispositifs sur le télétravail pour le mettre en place. « Le télétravail existait déjà chez nous, raconte Emmanuel Saussard, DRH Europe à Arc France, spécialiste des verres en cristal et plus généralement des arts de la table. L’évolution récente des dispositifs légaux va nous permettre de formaliser les choses en interne avec un accord. » De fait, plusieurs salariés, notamment des cadres de l’entreprise (qui emploie plus de 5 000 salariés), sont parisiens ou lillois, tandis que le siège de l’entreprise est situé à Arques, dans le Pas-de-Calais. « La demande d’un accord sur le télétravail n’est pas venue des syndicats, précise Emmanuel Saussard, c’est la direction qui l’a initiée. » Pour plusieurs raisons. Au-delà de la formalisation d’un état de fait – certains cadres travaillant le lundi et le vendredi chez eux – et de la volonté d’offrir la possibilité de télétravailler à plus de salariés, hormis ceux qui, à l’usine, travaillent en équipe, c’est un changement culturel que souhaite le nouveau DRH, en poste depuis 2016, « afin de sortir d’un management par le “physique” pour arriver à un management de leadership », explique-t-il.

Former les managers

Même démarche du côté du conseil régional d’Ile-de-France, relate Fabienne Chol, directrice générale adjointe chargée des ressources humaines : « Le changement de lieu, avec notre récent déménagement à Saint-Ouen, a été un levier pour mettre en œuvre de nouvelles valeurs : autonomie, responsabilité, confiance. » Et si le travail en open space, qui touche désormais tout le monde, y compris la direction générale, est emblématique de la mue du conseil régional vers un fonctionnement plus « libéré », « le télétravail, officiellement en place depuis janvier 2018, est un élément tangible de nos nouvelles valeurs », conclut-elle.

Et ceux qui ont le plus de mal à accepter le télétravail, ce sont les managers, habitués qu’ils sont, pour certains, à demander des comptes en permanence, relèvent aussi bien Fabienne Chol qu’Emmanuel Saussard. D’où la mise en place fréquente d’un système permettant au manager d’accepter une demande de télétravail, mais l’obligeant à en référer à son propre supérieur s’il souhaite refuser. D’où l’intérêt, également, de former les managers. Même si les télétravailleurs doivent parfois eux aussi apprendre à télétravailler. « Au début, certains télétravailleurs voulaient absolument montrer qu’ils travaillaient et, pour cela, inondaient leur supérieur de mails ! », se souvient ainsi Fabienne Chol. « Il faut un vrai apprentissage de part et d’autre, mais il est clair que les managers étaient le plus inquiets », ajoute-t-elle. Pour aider les managers, le conseil régional d’Ile-de-France a également créé un réseau d’encadrants.

Code de conduite et contrat de confiance

Enfin, pour que le système fonctionne à la satisfaction de tous, « il faut établir des objectifs clairs pour le télétravailleur, prévoir des jalons pour vérifier que tout avance comme prévu, et fixer des délais pour la “livraison” », précise Emmanuel Saussard. Ainsi, dans l’accord Arc France, auquel la société apporte actuellement la dernière touche, sera inclus un code de conduite « et, si l’une des deux parties ne le respecte pas, nous pourrons suspendre le télétravail à titre individuel ». En plus des contraintes légales, comme le fait que le télétravail n’excède pas deux jours par semaine (trois selon le décret concernant la fonction publique), le dispositif, chez Arc, repose sur la confiance, pour que le salarié prenne bien ses 11 heures de repos d’affilée, par exemple. « En outre, nous avons, en parallèle de l’accord sur le télétravail, fait un accord sur le droit à la déconnexion », précise le DRH. Par ailleurs, si certains accords de télétravail incluent, de la part de l’entreprise, un défraiement pour la connexion Internet, voire un « loyer » pour la partie de salle à manger utilisée pour le télétravail, chez Arc France, seul un ordinateur portable est fourni, tandis que le conseil régional d’Ile-de-France offre en outre un accès au progiciel maison pour chaque collaborateur.

Enfin, Arc France mettra en place une commission de suivi de l’accord avec des indicateurs : nombre et profil des télétravailleurs, nombre de jours pris… S’il n’a pas l’intention de mener des études de productivité, Emmanuel Saussard entend bien faire un suivi de l’impact social, humain et managérial de l’accord.

Après trois mois d’expérimentation l’an dernier, Fabienne Chol a déjà noté les avantages pour le conseil régional : « Nous avons constaté un bien-être qui allait au-delà de nos espérances, avec des gens beaucoup plus détendus et qui travaillaient plus et mieux. Et lors des récentes chutes de neige en région parisienne, nous avons vraiment profité du dispositif ! », conclut-elle.

Auteur

  • Lys Zohin