Historiquement transfrontalière, la banque encourage le bilinguisme de ses salariés pour accompagner sa croissance sur le marché français.
Fondée voici 75 ans à Sarrebruck, à cheval sur la frontière entre la Sarre et la Moselle, la SaarLB revendique depuis les années 1960 son caractère franco-allemand. Doté de succursales à Strasbourg et à Paris, l’établissement bancaire est passé en 2002 sous contrôle de la Bayern LB, qui lui a confié la mission de renforcer sa présence de l’autre côté de la frontière. « Au cours des dix dernières années, nous avons fortement renforcé notre activité auprès des collectivités françaises, mais aussi dans l’immobilier et dans le secteur des énergies renouvelables, à tel point que nous réalisons dans ce pays près de la moitié de notre encours clients. Pour connaître et analyser ces deux marchés, nous avons besoin de personnel qualifié, maîtrisant les deux langues », indique Jochen Legleitner, directeur général de la SaarLB et SaarLB France.
La banque s’est donné les moyens de ses ambitions linguistiques : sur un effectif global de 560 personnes, elle compte une centaine d’employés bilingues et une centaine d’autres en cours d’apprentissage de la langue du voisin. La stratégie du bilinguisme commence avec le recrutement de stagiaires ou d’apprentis français qui passeront leurs six premiers mois en immersion dans les locaux sarrois de la banque. SaarLB a renforcé sa visibilité auprès de l’université de Lorraine en proposant trois bourses d’un montant de 3 000 euros à des étudiants en droit, en informatique et en commerce. Elle diffuse régulièrement ses offres de stage et d’emploi auprès des grandes écoles régionales, dont l’ICN Business School à Nancy et l’école de management de Strasbourg, qui propose un parcours binational. Trois des onze stagiaires recrutés en deux ans ont déjà été définitivement embauchés.
La SaarLB finance également des cours de langues et de conversation durant le temps de travail des volontaires pour développer le bilinguisme parmi les salariés français et allemands. Des enseignants de l’école Berlitz de Sarrebruck viennent dispenser des cours de français à des groupes de six à huit participants allemands dans les locaux de la banque. Un enseignant retraité de Sarreguemines, en Moselle, propose des conversations en français axées sur la culture et l’actualité. Les Français suivent les cours de l’organisme de formation KPM Krauthammer à Sarrebruck et du Goethe Institut à Strasbourg, où la quasi-totalité des 10 employés sont déjà bilingues. « Dans notre région frontalière, nous n’avons pas de débutant complet. Mais il arrive que les employés suivent 1 h 30 de cours hebdomadaires durant quatre ans pour atteindre le niveau qui leur permettra d’être à l’aise dans leur travail », note Marion Hilt, DRH de la SaarLB.
Les cours de langue représentent environ 15 % du budget total de formation de la banque, dont le montant n’est pas communiqué. La législation allemande n’impose ni minima, ni information en la matière. Les demandes de cours de langues sont formulées auprès des managers, puis soumises au « Personnalrat », instance comparable au comité d’entreprise français, qui veille à l’équité de l’accès à la formation. Elles sont ensuite validées par le service des ressources humaines en fonction des besoins de l’entreprise.
Facultatif, dans la mesure où la quasi-totalité des documents de travail sont édités en français et en allemand, le bilinguisme constitue néanmoins un élément important de d’évolution professionnelle. L’inscription au cours est considérée comme un gage de motivation et d’engagement au sein d’une banque connue pour proposer des rémunérations et des plans de carrière attractifs. Outre son intérêt managérial, le bilinguisme de la SaarLB épouse l’objectif ambitieux affiché par la Sarre en matière compétences linguistiques. Le petit État frontalier s’est engagé en 2014 dans la Frankreichstrategie visant à inculquer le français – sans préjudice de l’apprentissage de l’anglais – à l’ensemble de sa population en l’espace de deux générations. La banque du Land joue un rôle de précurseur et d’ambassadeur de cette stratégie territoriale.