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Sur le terrain

Retour sur… L’actionnariat salarié chez GT Logistics

Sur le terrain | publié le : 05.09.2017 | Hélène Truffaut

Si les actionnaires salariés de cette entreprise familiale peuvent largement se féliciter de leur investissement, le patron s’est pour sa part rendu compte qu’il lui fallait animer davantage cette communauté et faire remonter ses propositions.

En 1992, cinq ans après la signature d’un premier accord d’intéressement, le groupe GT ouvrait son capital à ses salariés, aujourd’hui au nombre de 2 400. La moitié d’entre eux détiennent des actions ou des obligations de cette entreprise familiale fondée en 1946, qui a réalisé, en 2016, un chiffre d’affaires de 186 millions d’euros.

Outre son activité historique de location de véhicules industriels avec conducteurs, rassemblée sous la bannière GT location, le groupe s’est doté, en 2001, d’une branche logistique (intervenant directement sur les sites industriels de ses clients), forte de 700 salariés. Éric Sarrat, petit-fils du fondateur, tient le gouvernail de cette entité « à croissance rapide et très profitable », assure-t-il.

De fait, la valeur de l’action de GT Logistics a bondi de 17,5 % entre 2016 et 2017 (contre 7,61 % pour celle de GT Location). Les actionnaires salariés de cette branche – ils sont 265, soit environ 40 % de l’effectif éligible – détiennent 8,82 % du capital. Et, depuis trois ans, perçoivent des dividendes. Une option non envisagée au démarrage du dispositif, qu’il a fallu expliquer. « Dividende est presque un gros mot. Mais c’est ce qui permet aux salariés concernés, au-delà des plus-values, de vivre pleinement leur statut d’actionnaire sans attendre le déblocage des fonds au bout de cinq ans », explique Éric Sarrat.

Beaucoup de transparence

Même si la démarche oblige à beaucoup de transparence – et à une certaine sobriété des dirigeants –, ce partage de la valeur ajoutée a plusieurs vertus. Dont celle de décomplexer complètement cet entrepreneur chrétien très attaché à la performance économique et à la création de richesse. Cela permet aussi d’avoir des salariés plus impliqués dans la vie de l’entreprise. Et de rassurer les clients quant au risque d’une cession.

Reste que l’actionnariat salarié ne s’auto-entretient pas. « Ça se travaille ! », insiste le président. Les nouveaux entrants, pour la plupart opérateurs logistiques, ne sont pas naturellement tentés. « Le discours type est qu’avec leur salaire, ils n’ont pas les moyens d’acheter des actions », reconnaît Éric Sarrat, qui y voit aussi une certaine aversion au risque. De fait, l’actionnariat salarié a beaucoup plus de succès, jusqu’à 100 % d’adhésion, lorsque les managers de site (l’entreprise en compte 32, de toutes tailles) sont eux-mêmes convaincus de l’intérêt du dispositif et suffisamment pédagogues.

L’entreprise communique depuis longtemps auprès de sa population d’actionnaires salariés par le biais de SMS. Des messages courts, qu’elle a complétés par des e-mails envoyés à leur adresse personnelle. Mais il l’admet : « Il y a eu des périodes où nous avons « gaspillé » cet actionnariat en n’expliquant pas suffisamment les choses. Nous avons du reste essuyé des grèves. »

D’où la volonté du patron, fin 2016, de reprendre en main l’animation de cette communauté, avec une phase d’information plus complète concernant notamment le nouveau projet d’entreprise, Cap 2020, lancé en 2017. Mais aussi une incitation à exprimer questions, avis et propositions. « Ils savent qu’ils ont tous la possibilité d’interpeller directement leur président par téléphone ou SMS. » GT Logistics porte une attention particulière aux salariés qui ne sont pas uniquement motivés par le rendement, et peut aujourd’hui compter sur un petit groupe en développement d’une quinzaine de contributeurs bien identifiés.

Une aide précieuse pour un patron souvent loin du terrain : « Ils m’éclairent sur la réalité de ce qui se passe à leur niveau, et je veille à ce qu’ils obtiennent une réponse de leur hiérarchie locale. » Les suggestions sont de tous ordres : relance d’une distribution d’actions gratuites, possibilité de siéger dans les instances de gouvernance de l’entreprise, participation à un challenge sportif interentreprises. Parfois, ils questionnent les choix stratégiques de l’entreprise.

Formation économique

Une des demandes portait sur une formation économique de base. GT Logistics a donc créé un module e-learning sur les termes les plus courants de la gestion d’entreprise, et prévoit de développer un niveau 2, qui abordera des notions plus poussées (construction d’un bilan, endettement…). « Démystifier ce qui paraît compliqué est un de nos grands défis », reconnaît-il.

Les actionnaires salariés ont également demandé à rencontrer les actionnaires familiaux. Souhait qui s’est concrétisé par une assemblée festive organisée en mai dernier à Bordeaux. Était au programme, outre les présentations sérieuses d’usage : une dose d’humour servie par des acteurs qui ont improvisé à partir des interventions de la direction, de l’interaction via l’application dédiée Klaxoon, un cocktail déjeunatoire, et un atelier de dégustation à la Cité du vin. Un franc succès estime le patron, pour qui cette journée a permis aux salariés actionnaires de se faire une idée plus précise de ce qu’est une entreprise familiale et, surtout, de se sentir parties prenantes.

Une détention directe sur le PEE

Le dispositif repose sur la détention directe d’actions sur le plan d’épargne entreprise, sans l’intermédiaire d’un FCPE. « Il n’y a pas de diversification du risque et aucune garantie de rendement. En termes de pédagogie, nous sommes très fermes sur ces points, souligne Éric Sarrat. Même si l’histoire montre que le placement a été profitable, chacun sait qu’il peut perdre. »

L’action est valorisée chaque 1er avril. Elle vaut aujourd’hui 9,70 euros. La formule repose classiquement sur l’actif net comptable (ANC) divisé par le nombre d’actions. L’entreprise assure aux salariés actionnaires une liquidité permanente des titres en s’engageant à racheter tous ceux qui sont mis en vente.

Auteur

  • Hélène Truffaut