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L’enquête

Arkema Lacq-Mourenx : Une longue réflexion nourrie d’un diagnostic social

L’enquête | publié le : 18.07.2017 | H.T.

Après avoir essuyé une grève, le site chimique béarnais s’est lancé dans une démarche QVT, alimentée par une enquête menée auprès des salariés. Le DRH creuse aujourd’hui la piste de la reconnaissance.

Le travail sur la problématique de la reconnaisance à Arkema Lacq-Mourenx (340 salariés) est un long chemin. Petit retour en arrière : fin 2013, Total abandonne l’exploitation commerciale du gaz de Lacq. Le chimiste Arkema, spin off du pétrolier en 2006, y exploite des unités de production pour transformer l’hydrogène sulfuré, composant toxique de ce gaz.

Après neuf mois d’une négociation « assez compliquée » avec les partenaires sociaux pour adapter l’activité de thiochimie (chimie du soufre), « nous avons redémarré en 2014 dans une nouvelle configuration », raconte Jérôme Leroy, DRH de l’établissement. Mais, en mars 2015, la direction essuie un important mouvement social du personnel posté (40 % des effectifs) qui réclame embauches et hausses de salaire.

Le protocole d’accord de sortie de conflit – conclu avec les quatre organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, CGT et FO) – engage l’entreprise dans une démarche de qualité de vie au travail (QVT). Première étape : l’établissement d’un diagnostic social partagé, avec l’aide d’un prestataire. Le cabinet Alternego (spécialisé en négociation et en gestion de conflits) remporte l’appel d’offres et convainc la direction de coconstruire le diagnostic avec les organisations syndicales (OS). « Les consultants ont d’ailleurs rencontré les syndicats avant la direction pour définir l’ossature du projet », raconte le DRH.

Sortir du rapport de force

L’enquête est réalisée à l’automne 2015 par le biais d’entretiens individuels et collectifs – avec un taux de participation de 87 %. Puis restituée par Alternego, sans que la direction n’en ait la primeur. « Nous avons travaillé sans filet, mais nous voulions sortir du rapport de force et passer à autre chose de façon concertée. L’adhésion des salariés a légitimé notre approche. » Et les recommandations formulées dans ce cadre vont alimenter le plan de progrès de l’entreprise, établi pour 2016 et 2017.

« Les thématiques soulevées étaient nombreuses, raconte-t-il : on y évoquait des problèmes d’organisation, de dialogue social, de culture d’entreprise (sentiment d’appartenance – le site de Mourenx étant perçu comme oublié –, reconnaissance), de valorisation des managers de proximité, de manque d’espaces de convivialité et d’information. On y pointait l’affichage de bonnes intentions de la part de la direction, mais aussi un manque de crédibilité des organisations syndicales. L’une des recommandations a d’ailleurs porté sur l’organisation d’une formation conjointe direction-syndicats sur le thème de la négociation raisonnée. Impensable jusqu’alors ! »

C’est après une présentation de cette démarche à l’ANDRH des Pays de l’Adour à laquelle participe VPHR que la reconnaissance au travail, dont ce cabinet a fait sa spécialité, apparaît comme une piste à creuser. « Dans notre diagnostic, il y avait beaucoup de sujets qui s’y rattachaient, reconnaît Jérôme Leroy. Et j’étais personnellement déjà convaincu que les salaires, plutôt confortables chez nous, n’étaient pas la question essentielle. »

Avec l’aval du comité de direction, et l’appui de VPHR, le DRH intègre donc un volet reconnaissance dans sa politique de QVT. Le sujet est lancé auprès de l’encadrement dans le cadre du “RH Day”, nouvel espace d’échanges mis sur pied pour les managers de proximité à l’issue du diagnostic social (entre 20 et 30 participants à chaque session).

« Après une explication sur les différentes facettes de la reconnaissance (lire p. 20), nous leur avons demandé d’exposer ce qu’ils faisaient dans ce domaine, puis de classer ces actions en fonction de leur typologie. Nous nous sommes rapidement rendu compte que la reconnaissance des efforts était le parent pauvre. Et que, comme beaucoup, nous mettions surtout l’accent les résultats. »

Reconnaissance à 360°

Une synthèse des différentes rencontres doit à présent être présentée au Codir. Ce qui permettra, de déployer un plan d’action. Sur quoi portera-t-il ? Le contenu sera décliné en fonction des services. Mais Jérôme Leroy en est persuadé : « Pour reconnaître, il faut connaître. Nous allons d’abord essayer de mieux nous connaître les uns les autres : salariés, managers, direction et syndicats, en évitant les postures. C’est une reconnaissance à 360°. Nous allons également travailler sur la reconnaissance de l’investissement personnel, qui est un registre compliqué car on est davantage sur le long terme. Et peut-être pourrions-nous, aussi, mieux valoriser l’expertise. »

En attendant, le DRH est certain que les managers regardent déjà leur équipe différemment. Manuel Bodéi, délégué syndical CFDT, n’est, lui, guère enthousiaste sur la démarche : « Nous n’avons eu qu’une présentation dans les grandes lignes de ce que peut être la reconnaissance, et le malaise est très profond dans notre établissement : certains n’ont de managers que le nom, les organisations syndicales ont été discréditées et, pour les salariés, la reconnaissance, c’est encore de l’argent. » Jérôme Leroy le sait : obtenir des résultats prendra du temps…

Repères

Activité

Thiochimie (transformation des produits contenant du soufre).

Effectifs

340 salariés (dont une soixantaine à Mourenx).

Chiffre d’affaires

N. C.

Auteur

  • H.T.