Au fond, qui sont les patrons ? Dans ce livre collectif regroupant 36 entretiens de dirigeants, le sociologue Michel Offerlé tente d’éclairer leurs motivations et la vision de leur métier. Dans cette galerie de portraits, c’est surtout l’extraordinaire diversité des profils et des parcours qui surprend. On y croise un cadre dirigeant d’une chaîne de grande distribution, des commerçants, des artisans ayant repris l’entreprise familiale, une fondatrice d’un site d’économie collaborative, ou encore l’ex-patron de Saint Gobain… Des patrons – et quelques rares patronnes – souvent passés par le salariat, parfois reconvertis sur le tard : « Il y a une forme d’ethnocentrisme entreprenarial qui repose sur ce volontarisme de l’expérience, comme le fait d’être un gros bosseur et d’en vouloir », pointe Michel Offerlé. Un engagement « presque sacrificiel » qui nourrit leur rejet des 35 heures, ainsi « qu’une méfiance envers les politiques, trop éloignés de la réalité de l’entreprise ». S’ils semblent unis par la fierté d’avoir leur propre entreprise et de créer des emplois, « il est cependant difficile de savoir comment ces patrons gèrent leurs relations avec leurs salariés, en matière de droit du travail », admet le sociologue. Le livre est d’ailleurs assez taiseux sur ce point. Certains patrons montrent un attachement presque paternaliste aux conditions de travail, comme ce dirigeant de PME qui estime « que le respect des gens, ça commence par les payer correctement ». Un autre affirme respecter ses collaborateurs, mais se dit avant tout motivé « pour gagner de l’argent ». Un kaléidoscope fascinant.