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Sur le terrain

Retour sur… La lutte contre l’absentéisme à Transilien

Sur le terrain | publié le : 25.04.2017 | Rozenn Le Saint

DEPUIS L’ÉTÉ 2016, l’antenne de la SNCF a entamé une démarche visant à faire remonter les irritants professionnels qui peuvent provoquer des absences à terme, afin de traiter le problème à la source.

Une forte poussée de 8 points du taux d’absentéisme enregistrée fin juin 2015 par rapport à l’année précédente, avec un cumul moyen de 9,1 jours par agent, a été l’élément déclencheur pour mettre en route une politique de lutte contre l’absentéisme chez Transilien.

Une première démarche axée sur le « rappel de la réglementation » et les sanctions encourues en cas d’absence non déclarée auprès des managers n’a pas porté ses fruits. La direction a alors souhaité « aborder l’absentéisme autrement, sans culpabiliser, au plus près des équipes, en traitant les irritants », indique Mélanie Montocchio, responsable Mieux vivre au travail à Transilien, qui compte 14 000 salariés, dont 6 000 personnels de gare, 3 500 conducteurs, 2 500 agents de maintenance, 800 contrôleurs et 1 200 employés en directions. Elle a présenté au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) un plan qui comporte trois leviers d’action.

Le premier consiste à travailler avec la médecine du travail. « Même sur la maladie pure, l’entreprise peut agir en mettant en place une campagne de vaccination contre la grippe », illustre Mélanie Montocchio. Surtout, une rencontre entre le DRH, les 15 médecins du travail et les représentants de tous les métiers, une fois par trimestre, est actée.

Horaires fixes

Rapidement, il en ressort que le roulement de travail des agents accroît leur fatigue. Alors, depuis septembre 2016, Transilien expérimente une nouvelle organisation du travail avec des horaires fixes pour les agents d’accueil, qui sont de l’équipe du matin, de celle de l’après-midi ou de la nuit. « Moi qui peux me lever comme me coucher à 2 heures du matin dans la même semaine selon mes horaires, j’imagine que des horaires fixes sont moins mauvais pour la santé », témoigne Fabien Dumas, conducteur de train à Paris Nord et secrétaire général de Sud rail.

Autre exemple, des outils de travail vieillissants, conçus il y a plus de vingt ans en fonction de la taille moyenne des agents à l’époque, ne sont plus adaptés et provoquent une pénibilité. Le matériel, onéreux, n’est pas remplacé… Mais des formations aux gestes et postures sont mises en place. Des applications sur les smartphones professionnels ne sont pas forcément maîtrisées, ce qui stresse les agents : idem, la direction déploie des formations.

Le deuxième levier a consisté à placer le manager au cœur de l’organisation du travail et de la prévention de l’absentéisme. DRH, managers et médecins du travail se sont retrouvés pour deux séminaires de trois heures chacun, animés par Elisabeth Dagbovie, coordinatrice des médecins du travail Transilien. « Le but était de modifier le regard des managers sur les personnes absentes. Ils ont parfois tendance à les assimiler à des tire-au-flanc qui obtiennent des arrêts maladie de complaisance », remarque la doctoresse.

L’idée est donc de sensibiliser ces 30 managers au retour d’arrêt maladie et à l’entretien de « réaccueil », qui peut se faire de manière informelle, le temps d’un café. « La plupart des managers ne réalisaient pas d’entretien de réaccueil alors qu’il est important de vérifier si l’agent est à l’aise dans son travail ou si cela se passe bien dans l’équipe », décrit la responsable Mieux être au travail. « Il faut verbaliser l’absentéisme et montrer que l’agent a manqué », confirme Angèle Caillé, assistante de la RRH.

Dialogue facilité

Pour faciliter le dialogue entre les managers et les équipes, leur taille a été diminuée. Elle est passée de 25 à 10 agents, en abaissant le niveau hiérarchique : des agents de maîtrise sont devenus managers pour que chaque agent ait au moins un contact quotidien avec un encadrant de proximité. « Sauf qu’à présent, les agents de maîtrise sont perçus comme des hiérarchiques, cela peut casser le lien tissé », reproche le représentant Sud rail.

Encore une fois, le but est de mieux faire remonter et traiter les irritants : comme ces portiques trop peu sécurisés qui n’empêchaient pas les fraudeurs de sauter au-dessus, et ce, juste devant les agents. Pour éviter ce sentiment d’impuissance, le matériel a été revu. Chaque matin, les personnels d’accueil se retrouvent pour le « point 5 minutes ». « Avant de commencer, les managers font le point sur ce qui peut poser problème dans la journée », décrit Marie-Christine Galmiche, conseiller en management et référente absentéisme.

Le troisième levier d’action a consisté à renforcer le pilotage de l’opération prévention en menant des analyses locales pour mieux identifier les facteurs d’absentéisme, quitte à modifier l’organisation globale. Ces observations ont révélé que les métiers en gare, en contact direct avec la clientèle, étaient les plus sujets à l’absentéisme. Or les 5 000 agents d’accueil sont davantage victimes d’incivilités. Une première démarche a consisté à comprendre ce qui peut agacer le passager puis à réajuster le parcours client en améliorant la signalétique, par exemple. En cas de retards des trains ou en période de pointe le matin ou le soir, ces agents sont particulièrement sous tension. Transilien a travaillé à informer plus rapidement ses personnels d’accueil pendant ces situations perturbées. « Face à des gens qui perdent les pédales, il faut surtout être bien formés et en nombre, sauf que cela a un coût que la direction n’est pas prête à payer », reproche Fabien Dumas. Toutefois, la démarche de Transilien commence à payer. Sur l’année 2016, l’absentéisme a baissé de 2 %, et sur le premier trimestre 2017, par rapport à la même période en 2016, il a baissé de 8,8 %.

Auteur

  • Rozenn Le Saint