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Gestion des Compétences : Les métiers verts et verdissants et verdissants gagnent du terrain

L’enquête | publié le : 25.04.2017 | Solange de Fréminville, Marie-Madeleine Sève

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Gestion des Compétences : Les métiers verts et verdissants et verdissants gagnent du terrain

Crédit photo Solange de Fréminville, Marie-Madeleine Sève

Les métiers et les pratiques liées à l’écologie préoccupent les services RH qui cherchent à accompagner la vague verte (ou bleue) en interne. Soit parce que l’activité est au cœur de la transition énergétique ou de la protection de l’environnement, soit parce que le respect de la planète impacte les métiers traditionnels. Leur credo : sensibiliser et former.

« Après le digital, le développement durable et la transition énergétique constituent le deuxième facteur de transformation des entreprises », affirme Caroline Renoux, fondatrice de Birdeo, cabinet de recrutement expert en développement durable et RSE. Avec un fort impact sur la composition de leurs équipes. « Le BTP, notamment, recrute des ingénieurs avec des compétences dans la construction de bâtiments à basse consommation d’énergie, capables d’exprimer en termes business l’intérêt d’être écologique. Dans les métiers de la finance ou des achats, des entreprises cherchent, en plus des savoir-faire métier, une compétence écologique, savoir calculer un bilan carbone, choisir des produits durables… », précise-t-elle. Selon Jens Bicking, directeur d’Elatos, cabinet de recrutement spécialisé dans les énergies renouvelables et l’environnement, « des métiers émergent dans les énergies marines et dans la gestion intelligente des réseaux. Il y a aussi une multitude d’acteurs nouveaux, tels les pilotes énergie chargés de diminuer la facture énergétique, l’empreinte carbone, et d’optimiser la gestion des ressources ». Sans compter les auditeurs pointus pour établir les diagnostics ad hoc.

Le cap du Greenwashing est passé

Les métiers verts seraient un véritable gisement d’emploi selon les déclarations (ou vœux) des politiques, présidentiables ou non, qui misent sur la transition énergétique et l’économie circulaire pour réduire le chômage. Les chiffres de la Dares ont pourtant de quoi tempérer les ardeurs. Selon une étude parue en janvier(1), près de 4 millions d’emplois sont recensés, en hausse de 2,4 % de 2007 à 2012. Parmi eux, les professions “vertes” (gestion des déchets, de l’énergie, de d’eau, protection de la nature), qui représentent seulement 144 000 emplois, mais augmentent de 9,1 %. Puis les professions “verdissantes”, plus nombreuses : 3,7 millions d’emplois, dans tout secteur, surtout le bâtiment, l’industrie, les transports, l’agriculture, ciblés par les réglementations environnementales. Leur progression atteignait + 2,4 % de 2007 à 2012 (mieux que le + 1,4 % pour l’emploi dans l’Hexagone). Le sujet préoccupe donc les grandes et même les petites entreprises. En témoigne, le sondage réalisé par l’Institut Elabe en décembre 2016, pour le compte du Medef, auprès de patrons de PME et TPE (de 10 à 249 salariés) : 81 % des dirigeants sondés estiment que la « transition verte » aura un impact, en particulier sur l’organisation du travail ; 50 % des sondés ont déjà mis en place des plans d’action et 45 % des formations. Pour les RRH et DRH, former est bien, en effet, la clé pour répondre aux nouveaux impératifs écologiques, pris à cœur par un très grand nombre d’entreprises à la suite des conférences sur l’environnement, en 2007 (Grenelle) et 2015 (COP 21). « Ils ont passé le cap du greenwashing en vogue il y a dix ans en vue de gagner en notoriété et d’attirer les talents, pour entrer dans le vif du sujet, s’attaquer aux enjeux énergétiques, climatiques et sociétaux » observe Caroline Renoux chez Birdeo. Un constat partagé par Élisabeth Laville du cabinet Utopies (lire l’interview p. 23).

Ajouter des briques vertes aux savoir-faire

Dès lors il leur faut recruter, en particulier dans les activités des énergies renouvelables en plein essor, comme en atteste la diversification du groupe DCNS sur les énergies marines (voir p. 22), et surtout ajouter des briques vertes aux compétences de leurs collaborateurs. Ainsi, depuis 2013, le groupe BPCE sensibilise-t-il en continu, l’ensemble de ses acheteurs aux éco-achats de cartouches d’impression et papiers recyclables, de services pour gérer la fin de vie des automates bancaires… « Nous avons diffusé des guides méthodologiques, avec un chapitre sur l’environnement, demandant aussi aux fournisseurs d’être vertueux sur ce point, explique Catherine Pourvoyeur, responsable RSE de BPCE Achats, GIE Achats de la banque coopérative. À côté de la préoccupation économique, nos acheteurs doivent intégrer les dimensions durable et responsable des produits et prestations dans leurs négociations. » D’où l’idée des trois matinales de formation annuelles sur le sujet, également diffusées sur l’intranet. De leur côté, les hôpitaux, cliniques et Éhpad(2), à l’instar de l’hôpital de Cannes, se sont déjà attelés à la question ou s’y mettent sérieusement. Le transport et la logistique (sociétés spécialisées ou départements dans l’industrie ou la distribution) les ont parfois devancés. Selon l’enquête du Cereq menée par la chargée d’études Félicie Drouilleau, et portant sur ces deux secteurs, les métiers de la route et de la supply chain (gestion des flux) ont évolué aux fins de réduire les émissions de CO2 à la suite du Grenelle de l’environnement. Tel Carrefour, aux objectifs ambitieux : 40 % d’émissions en moins d’ici 2025 (lire p. 21). Dans ces sociétés, les conducteurs se sont formés à l’écoconduite, tandis que les gestionnaires de flux, notamment dans le secteur agro-alimentaire, ont cherché à optimiser le remplissage des camions, la planification des tournées… afin de réduire les kilomètres camion. Le club Déméter, réunissant des logisticiens d’entreprises aussi variées que Casino, Fleury-Michon, Fromageries Bel, Orangina, Danone Eaux France, Stef, les y ont aidés en proposant des stages spécifiques d’une journée. Ou même en orientant leurs salariés vers la VAE, en vue d’obtenir une licence centrée sur la logistique durable.

Des formations clés en main

D’autres organismes se sont mobilisés pour favoriser la montée en compétences environnementales dans les entreprises de toute taille. L’Ademe, en particulier, chargée par l’État d’accompagner la transition écologique, développe l’offre de formation continue. Depuis la fin 2015, elle en propose une de trois jours, « Devenir référent énergie en industrie », dispensée par neuf organismes sous licence et qui, en dépit de son intitulé, concerne également la grande distribution. Un métier tout neuf, bien distinct de celui de directeur ou responsable environnement. En Alsace, depuis une dizaine d’années, et dans la région Grand Est depuis quelques mois, l’agence met en place des formations-actions sur trois à quatre jours. Au menu : diagnostic environnemental sur les sites, formations collectives (inter-établissements) sur des thèmes divers (écoconception, achats responsables, efficacité énergétique, etc.), financées par les Opca ou par l’Ademe elle-même. Cette dernière est tout aussi active pour accompagner les artisans, en première ligne sur la rénovation thermique des maisons individuelles construites avant 1975, sans isolation. L’Agence déploie ses bonnes pratiques sur tout le territoire, talonnée par l’Institut négaWatt : « Les artisans nous disent : “La rénovation thermique, cela redonne du sens à notre métier” », note le directeur de l’institut, Vincent Legrand, qui compte sur cet élan pour développer ces formations sur chantiers. (cf. l’article ci-dessous). Une satisfaction partagée par les salariés des secteurs de la logistique et des transports. Globalement, dans les emplois verts ou verdissants, « les gens sont engagés, leur travail les passionne », assure Caroline Renoux, chez Birdeo, de même que Jens Bicking, à Elatos. Du coup, il y a peu de turn-over. Le souci de la planète est donc un puissant levier de motivation dont les DRH ont intérêt à se saisir.

(1) Professions de l’économie verte : quelle dynamique d’emploi ?, Dares analyses, janvier 2017, n° 6.

(2) Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Auteur

  • Solange de Fréminville, Marie-Madeleine Sève