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Réforme de la Formation : L’analyse des besoins évolue

L’enquête | publié le : 04.04.2017 | Laurent Gérard

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Réforme de la Formation : L’analyse des besoins évolue

Crédit photo Laurent Gérard

L’expression des besoins en formation et en compétences dans les entreprises change : l’entretien professionnel et le CPF augmentent le poids des demandes individuelles. Ce qui explique peut-être que certains experts constatent une baisse de technicité des appels d’offres, et des cahiers des charges qui se sont généralisés.

Les entreprises analysent-elles leurs besoins en formation aujourd’hui comme elles le faisaient il y a quatre ou cinq ans, voire il y a dix ans ? Ou bien cette notion de besoin et son processus de remontée changent-ils du fait de la réforme en cours, de l’entretien professionnel, du compte personnel de formation, de la disparition du 0,9 % légal sur le plan, de la digitalisation de l’acte pédagogique, etc. ? Les constats semblent indiquer que cette réforme impacte aussi l’analyse des besoins au sein des entreprises.

« Dans les grands groupes, les pratiques de cahiers des charges et d’appels d’offres sont devenues la norme. En revanche, les pratiques d’enchères inversées ont fort heureusement disparu. Mais on sent une montée des demandes individuelles et des intra de deux jours, affirme Jean Wemaere, président de la Fédération de la formation professionnelle, qui rassemble surtout des prestataires de formation à statut privé. Dans les PME, ce n’est pas forcément pareil. »

« L’analyse des besoins est fortement remise en cause avec le digital, les Mooc et tout le nouveau contexte réglementaire, constate de son côté Marc Dennery, dirigeant du cabinet C-Campus. On passe d’une analyse collective des besoins à une analyse individuelle des besoins avec la logique de positionnement et de personnalisation. »

« Cela ne date pas de la réforme, mais elle pousse en ce sens : les entreprises ont besoin de compétences ou de professionnalisation, mais pas de formation, précise Jean-Pierre Willems, consultant et expert en droit de la formation. On mesure l’impact de la réforme au nombre d’entreprises qui raisonnent toujours en besoin de formation – le monde d’avant – et celles qui ont changé de braquet et ont fait évoluer leur plan de formation en plan de développement professionnel, des talents, etc. Mais les habitudes sont prégnantes ! L’objectif de favoriser l’approche compétences et une définition très large de la formation – et pas uniquement la définition habituelle ou légale – doit se retrouver dans une petite partie des entreprises. »

Montée de la demande individuelle

Du côté des responsables formation, tous ressentent une montée de la demande individuelle, et insistent sur la nécessité de professionnaliser au mieux ce moment si particulier de l’analyse du besoin. Sophie Meyer, responsable des ressources humaines du confiseur Haribo, admet que l’entreprise est passée d’un système plutôt informel, où les demandes de formation étaient ponctuelles, à « une politique liée à la stratégie de l’entreprise et incluse dans les missions du management ».

Christophe Pons, directeur de la formation du groupe de services Onet, explique avoir essayé de fonctionner sans catalogue interne pour raisonner par compétences, mais l’expérience lui a montré que « les personnes ont besoin d’être guidées dans l’expression des besoins pour leur donner une orientation ».

Quant à Valérie Lesguillons, responsable de la politique et du financement de la formation chez Darty France, un des objectifs est précisément d’avoir une vision unifiée et globale entre Darty et Fnac qui fusionnent, mais « nous sommes assez synchrones sur l’analyse des besoins des formations incontournables, notamment les parcours d’intégration pour les nouvelles recrues », reconnaît-elle.

Digitalisation des échanges

Les cinq experts que nous avons sollicités (experts en organisation des services et de la gestion de la formation ou en externalisation de ces mêmes services) restent circonspects sur les bienfaits de la réforme en cours et constatent des tendances lourdes que l’on peut résumer ainsi : moins de temps, moins d’argent, plus de digital.

Qu’il s’agisse de Céline Delort, Pdg du cabinet d’externalisation Alithia, de Bernard Masingue, consultant associé à Entreprise & Personnel, d’Alain Meignant, consultant individuel aujourd’hui et auteur d’un livre qui fait référence depuis trente ans, de Christophe Parmentier, dirigeant du Cabinet Clava, ou de Philippe Joffre, Pdg du cabinet de conseil et d’externalisation de la gestion de la formation Paradoxes, le constat est partagé : l’entretien professionnel et la digitalisation des échanges prennent de plus en plus de place dans les processus d’analyse des besoins de formation, au détriment d’un travail d’analyse assuré par le management. Et ils ne sont pas certains que ce soit gagnant.

Auteur

  • Laurent Gérard