« La loi Travail s’inscrit dans une perspective de long terme à laquelle toutes les majorités politiques ont contribué »
La loi du 8 août 2016 poursuit un objectif de création d’emplois par la libéralisation des procédures permettant aux entreprises d’agir sur le temps de travail. Elle parachève un mouvement démarré il y a trente ans avec les lois Auroux, ensuite poursuivi par les lois Robien, Aubry, Larcher… Leur philosophie est de donner davantage d’autonomie aux partenaires sociaux. La loi Travail s’inscrit donc dans une perspective de long terme à laquelle toutes les majorités politiques ont contribué.
Ses apports sont d’institutionnaliser l’autonomie de la négociation d’entreprise et la procédure référendaire ; le référendum était déjà pratiqué mais sans avoir force de loi. Ce renforcement de la démocratie sociale était déjà à l’œuvre dans la loi du 20 août 2008, qui donne aux salariés le droit de voter pour désigner les syndicats, négociateurs des accords.
La loi Travail donne aux entreprises dépourvues de délégué syndical davantage de possibilités pour négocier. C’est une réponse à la faible implantation des syndicats dans les PME. Mais le problème des syndicats, c’est aussi leur division, qui induit parfois des effets de surenchère peu propices à la négociation. C’est pourquoi la loi donne aussi un pouvoir référendaire aux salariés. D’un côté le législateur renforce la négociation d’entreprise et l’institutionnalisation des syndicats, ce qui compense leur faiblesse, de l’autre, il renforce le pouvoir des salariés, ce qui compense la division des syndicats.
Non, ce n’est pas une loi de commande : elle s’inscrit surtout dans la tendance française évoquée plus haut. Mais il est vrai que beaucoup de pays européens accordent une place importante aux partenaires sociaux et que cela a pu influencer le législateur français.
La consultation d’experts issus de la société civile en vue de préparer une loi n’est pas une nouveauté. En revanche, les mois qui ont précédé la préparation et l’examen de la loi ont été marqués par une profusion de rapports et de publications (Combrexelle, Terra nova, Jean Jaurès, Institut Montaigne, Badinter et Lyon-Caen) qui tous allaient dans le sens d’une autonomisation des partenaires sociaux et de la négociation d’entreprise. Cela a possiblement créé un contexte qui a influencé le gouvernement et les parlementaires.
Benoît Hamon prévoit de la supprimer, Emmanuel Macron et François Fillon estiment au contraire qu’elle ne va pas assez loin. Quoi qu’il en soit, je pense que la généralisation de la validation des accords en 2019, telle qu’elle est prévue par la loi, sera maintenue.
Bien sûr ! La loi Travail peut avoir des conséquences sur la stratégie de l’entreprise et les accords concernant la sécurisation de l’emploi et la compétitivité ont une incidence directe sur la situation et les finances des entreprises. Le dialogue social devient donc un levier de création de valeur entre les mains des RH, ce qui renforce l’importance de ces dernières au sein de l’entreprise.