Pôle emploi est-il chroniquement inefficace ? Dans un ouvrage très fouillé issu de sa thèse, le sociologue Jean-Marie Pillon s’attache à montrer que l’introduction de politiques de management public fondée sur les objectifs chiffrés entraîne des dérives. Ainsi, les contrôleurs de gestion, présents à tous les niveaux de la hiérarchie, réduisent la marge de manœuvre des managers de Pôle emploi. Quant aux conseillers des agences, surchargés, leur priorité est devenue de renseigner les indicateurs de suivi. Quitte parfois à tricher un peu, pour régulariser la situation de certains demandeurs d’emploi qu’ils n’ont pas eu le temps de voir en entretien. Aussi compétents soient les agents, constate le sociologue, les indicateurs et le manque de moyens ne permet pas de repérer les gens ayant des difficultés complexes. Et la création des plates-formes téléphoniques pour les demandeurs d’emploi et les entreprises, où les conseillers sont indépendants des agences, n’augmente pas la qualité du service. Faute de personnel, « Pôle emploi joue surtout le rôle de boîtes aux lettres pour les offres d’emploi », constate Jean-Marie Pillon. Un travail à la chaîne qui nuit à la qualité des annonces, comme l’a récemment montré la CGT.