Les DRH adeptes du concept des générations X ou Y en seront pour leurs frais dans cet essai qui s’attaque au mythe du clivage entre les générations. Non, il n’existe pas de fracture entre les jeunes qui ont grandi avec Internet et les « anciens », qui d’ailleurs se sont approprié très vite les réseaux sociaux, estiment le sociologue Serge Guérin et le philosophe Pierre-Henri Tavoillot. Et les entreprises se trompent en survalorisant des jeunes soi-disant “digital natives” au détriment des salariés plus âgés. Pour eux, la lutte entre les générations n’est qu’un concept créé de toutes pièces par le marketing. Jeunes et vieux ne sont en rien opposés, la notion “d’actif” mais aussi la question du chômage traversant aujourd’hui tous les âges.

On reconnaîtra ici les idées de Serge Guérin, partisan d’une politique de solidarité et de coopération intergénérationnelle pour répondre à l’enjeu du vieillissement de la population française. L’analyse d’un faux clivage entre générations résonne juste, avec un recul philosophique intéressant. On est parfois moins convaincu par les pistes d’action avancées, les auteurs jugeant urgent de réformer le travail et l’assurance-retraite pour tenir compte d’une précarité grandissante dans le travail des jeunes ou de l’allongement de l’espérance de vie. Les préconisations défendues (protection sociale liée à l’individu, suggestion d’un permis de retraite à points pour sauver le système des retraites) prêtent à débat. Mais sur le fond, cet essai a le mérite de replacer l’individu et ses besoins selon son âge au cœur de la pensée sociale, y compris dans l’entreprise. L’idée serait d’individualiser le temps de travail, en le modulant selon l’âge du salarié, ses projets et les événements de sa vie familiale, notamment lors du soutien à un parent âgé.