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Les clés

Attractivité : Tirer les leçons d’un départ

Les clés | publié le : 20.12.2016 | Gaëlle Picut

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Attractivité : Tirer les leçons d’un départ

Crédit photo Gaëlle Picut

Comprendre les raisons pour lesquelles un collaborateur part, c’est se donner l’opportunité de cerner d’éventuelles failles dans l’organisation ou dans les pratiques managériales et d’y apporter des améliorations. Une mission partagée par les RH et les managers.

Si la grande majorité des DRH estiment que les entretiens de départ sont bénéfiques pour contribuer à l’amélioration des conditions de travail des employés, moins d’un tiers déclarent en mener de façon systématique, selon une étude réalisée par Office Team en 2006. « Les entreprises sont attentives à l’intégration des nouveaux collaborateurs, mais rares sont celles qui mettent en place une gestion managériale des départs, remarque Rosa Rossignol, consultante en RH. Les départs sont encore trop souvent traités sous les seuls angles financier et juridique. »

Le principal outil utilisé pour recueillir des informations est l’entretien de départ. « Il doit être mené le plus tôt possible après l’annonce du départ, car à la fin de son préavis, le collaborateur est déjà ailleurs. Cela permet également de préparer la communication en interne et envers les clients et les fournisseurs », recommande Rosa Rossignol. « Il est préférable qu’il soit mené par une personne n’ayant pas de rapport hiérarchique direct avec le salarié, sinon cela complique la parole de ce dernier », conseille de son côté Karen Demaison, RRH chez Enercoop. L’entretien doit être structuré et aborder à la fois les points de satisfaction et les points à améliorer. « J’utilise des questions très ouvertes pour que le salarié ne se contente pas de répondre par “oui” ou par “non”, indique Karen Demaison. J’ouvre différents champs de discussion : les motifs de son départ, les conditions de travail, le contenu du poste, les possibilités d’évolution, les formations proposées, la rémunération, les relations de travail avec les collègues, le management… » Si certains motifs de départ sont imparables (projet personnel, déménagement, problèmes familiaux, etc.), d’autres peuvent être liés à l’environnement professionnel. « L’intérêt de cet entretien sera plus ou moins grand, selon le degré d’honnêteté du salarié, reconnaît Karen Demaison. Il y a davantage de non-dits lorsqu’il y a eu des problèmes d’ordre managérial. »

Les remarques doivent être ensuite remontées aux personnes concernées, manager ou direction, pour essayer de trouver des améliorations, voire des solutions correctives. « Le suivi dépend beaucoup des managers, certains sont très attentifs aux remontées, d’autres n’ont pas forcément envie que cela change », reconnaît Karen Demaison. « La remise en question n’est jamais facile », confirme Rosa Rossignol. Sébastien Laboutade, DRH Groupe chez Ourry, est plus confiant. « Les managers voient l’intérêt de ces entretiens de départ car ils permettent de recueillir des mesures et des informations qu’ils n’ont pas forcément. Ces enseignements peuvent être très variés : métier trop compliqué pour le salarié, région où il a rencontré des difficultés avec les clients, problèmes de management… Cela nous permet de faire des ajustements, que ce soit en termes de recrutement, de gestion de carrière, de formation pour le management, de redéfinition de poste. »

Une opportunité d’amélioration

« Les informations recueillies lors des entretiens de départ visent à améliorer le fonctionnement de l’entreprise », confirme Béatrice Schifano, DRH d’Aramis Auto. Ainsi plusieurs départs de commerciaux leur ont permis de comprendre qu’ils n’avaient pas forcément bien compris les missions. « On a mis en place une journée découverte pour permettre aux candidats de mieux appréhender le métier avant de postuler, ainsi que des entretiens avec des pairs », indique la DRH. De la même façon, l’entreprise a été plus attentive à la capacité d’adaptation des salariés issus de grands groupes, après quelques déconvenues. « Dès le départ, nous sommes très clairs et très transparents sur notre fonctionnement afin de minimiser les erreurs de casting. » Enfin, certains départs ont également contribué à faire évoluer les modèles managériaux. « Il y a quelques années, cela nous a amenés à lancer un programme de formation pour nos managers et un accompagnement mensuel pour développer leurs compétences relationnelles », explique Béatrice Schifaro. « L’objectif n’est certainement pas de rendre fautifs nos managers mais de repérer les dysfonctionnements et d’y remédier, conclut-elle. Nous avons toujours privilégié une culture de l’amélioration continue. Nos managers sont habitués à l’évaluation (360°, Great Place to Work, Gallup…). »

Ces informations peuvent également aider à déceler des signaux d’alerte et à identifier des axes d’amélioration afin de diminuer le turnover. « On a tout intérêt à réagir et à sensibiliser les managers si on se rend compte que les ruptures conventionnelles s’enchaînent car cela a un coût important », estime Sébastien Laboutade.

L’objectif est de faire en sorte que le départ du collaborateur se termine sur une note constructive, et qu’il garde une bonne image de la structure. Chez Aramis Auto, plutôt que de subir ces départs, les RH ont souhaité capitaliser en mettant en place un réseau d’alumni début 2015. « Nous avons un groupe LinkedIn fermé afin de maintenir et d’entretenir le lien, explique Béatrice Schifaro. Il regroupe une cinquantaine d’anciens salariés de tous profils. L’objectif est de faire rayonner notre marque, d’élargir la cooptation aux anciens, de nouer des partenariats… ». Les alumni sont régulièrement conviés à des événements. « C’est un excellent moyen d’élargir notre réseau d’ambassadeurs », constate la DRH. Et d’ailleurs il arrive que d’anciens salariés reviennent ! ».

Les conseils du coach

Rosa Rossignol

Fondatrice de Carnet d’adresses RH, cabinet de conseil spécialisé en mobilité professionnelle, et auteure de l’ouvrage Gérer efficacement un départ (Dunod, 2012)

–1– Prévoir

Mettre en place des outils pour anticiper les départs et éviter la gestion de crise : organigramme de remplacement (pour les ressources clés, évaluer leurs probabilités de départ et voir qui pourrait les remplacer), favoriser la polyvalence des salariés, mettre en place des binômes. Privilégier le traitement préventif des signaux faibles (absentéisme…) et être à l’écoute des demandes des collaborateurs (entretien annuel, entretien de carrière) plutôt que le traitement correctif.

–2– Organiser

Effectuer et formaliser un entretien de départ structuré mais ne pas surestimer les enseignements que l’on peut en retirer car il y a toujours une part de non-dits, notamment lorsque les raisons du départ sont liées à des éléments intangibles tels que la non-reconnaissance, le manque de communication…

– Indiquer le coût de remplacement d’un salarié, surtout s’il s’agit d’un talent rare, est très utile. C’est un paramètre que les managers intègrent facilement et souvent plus efficace que de longs discours !

– Faire remonter les informations, plutôt que de les laisser dans un tiroir, et les utiliser pour mettre en place des politiques individuelles de carrière.

– S’intéresser aux anciens salariés, par exemple via la mise en place d’un réseau d’alumni.

Auteur

  • Gaëlle Picut