logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

La semaine

Discriminations : Après le testing, le Name and Shame ?

La semaine | publié le : 20.12.2016 | Lydie Colders

Image

Discriminations : Après le testing, le Name and Shame ?

Crédit photo Lydie Colders

Une étude du ministère du Travail révèle des pratiques discriminantes selon l’origine dans les grandes entreprises. Sur 40 testées, 12 privilégient nettement une candidature portant un nom français plutôt que maghrébin.Le gouvernement assure qu’il publiera leur nom si elles ne s’amendent pas.

Les grands groupes sont loin d’être exemplaires en matière de non-discrimination selon l’origine. Une étude de testing présentée le 12 décembre par le ministère du Travail et réalisée auprès de 40 entreprises de plus de 1 000 salariés* démontre une discrimination selon l’origine du candidat. Ceux dont le patronyme a une consonance maghrébine ont moins de chances d’être convoqués à un entretien : sur 3 000 faux CV envoyés entre avril et juillet derniers en réponse à des offres d’emploi courantes (chaque entreprise a été testée 40 fois sur quatre mois), l’écart de traitement est en moyenne de 11 points.

Pour un même poste, à profil strictement équivalent, 47 % des candidatures retenues par les RH portent un nom « français », contre 36 % un nom « maghrébin ». Toutes les entreprises ne sont pas discriminantes : sur 40 sociétés testées, 28 traitent de façon égale les deux types de candidats. Reste tout de même 12 grands groupes qui privilégient fortement les candidatures « hexagonales » avec des écarts de traitement allant de 15 points jusqu’à 35 points en défaveur des candidats portant un nom maghrébin ! Des discriminations significatives, « qui ne tiennent pas au secteur d’activité de l’entreprise, mais plutôt à l’organisation RH ou à la sensibilisation des équipes à la discrimination », précise Fabrice Forni, directeur des études d’ISM Corum, qui a réalisé cette campagne de testing.

Tous les types de poste.

Ces discriminations existent quel que soit le niveau de poste. Sur un poste d’employé, l’écart en défaveur des candidatures « maghrébines » est de 12 points, et de 9 points pour un poste de manager. « Nous avons vu des études où les discriminations liées à l’origine étaient plus importantes. Mais ce qui est frappant ici, c’est de voir que le phénomène concerne tous les types de poste, du management à des postes exposés aux relations avec les clients », pointe Éric Cediey, président d’ISM Corum.

Paradoxe : parmi les 12 entreprises montrées du doigt, « certaines ont des actions en matière de promotion de la diversité », indique Anousheh Karvar, directrice adjointe du cabinet de Myriam El Khomri. Les directions des quarante entreprises ont déjà été convoquées au ministère. « Certaines ont été surprises par leurs mauvais résultats ; elles mettent cela sur le compte d’un processus de recrutement décentralisé sur plusieurs sites, s’agace Anousheh Karvar. D’autres nous ont dit avoir formé leurs équipes à la non-discrimination il y a quatre ans, ce qui est nettement insuffisant. »

Le testing reposant sur des candidatures fictives, le ministère du Travail n’entend pas poursuivre les douze grands groupes incriminés. Mais il compte bien maintenir la pression : « Nous rendrons le nom des entreprises public si elles ne nous présentent pas un plan d’action correctif d’ici à fin janvier », prévient Anousheh Karvar.

La qualité des actions sera jugée par un groupe de travail composé de cabinets d’audits spécialisés et, sans doute, du Défenseur des droits.

* « Discrimination à l’embauche selon l’origine : que nous apprend le testing auprès des grandes entreprises ? ». Dares Analyses, décembre 2016.

Auteur

  • Lydie Colders