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Business ou human partner, la fonction RH à la recherche d’un nouvel équilibre

La semaine | publié le : 04.10.2016 | Emmanuel Franck

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Business ou human partner, la fonction RH à la recherche d’un nouvel équilibre

Crédit photo Emmanuel Franck

La fonction RH subit une dérive administrative alors que les salariés attendent qu’elle prenne davantage en compte les facteurs humains, constate Cegos sur la base d’un sondage publié la semaine dernière. En se digitalisant, elle pourrait trouver un meilleur équilibre entre son rôle de partenaire du business et de partenaire de l’humain, estime le groupe de formation professionnelle.

Qu’espéraient les DRH lorsqu’ils sont entrés dans le métier ? Travailler sur l’humain. Qu’y font-ils ? De l’“administratif”. Qu’est-ce que les salariés attendent des DRH ? Qu’ils prennent davantage en compte le facteur humain. Cette 2e radioscopie des DRH* – la précédente datait de 2012 –, publiée par Cegos le 27 septembre, diagnostique un DRH « toujours à la peine pour résoudre l’équation human partner-business partner », relèvent les auteurs. Parmi les différents rôles qui incombent aux DRH, le plus pesant relève de l’administratif. Répondre aux contraintes légales, mettre en place des accords à la suite des évolutions réglementaires, suivre les processus imposés par l’entreprise consomme 29 % de leur temps de travail, surtout dans le secteur public (40 %). Une tendance qui s’est beaucoup accentuée (+ 15 points) depuis le précédent baromètre.

Leur rôle de conseil sur le terrain auprès des managers et des salariés n’arrive plus qu’en 2e position (21 % ; – 6 points), devant celui de partenaire stratégique et d’accompagnateur du changement (17 % ; – 5 points), d’expert technique et juridique (16 % ; – 2,5 points) et de négociateur avec les partenaires sociaux (16 % ; – 3 points). « Les rôles des DRH se déséquilibrent, au point qu’on peut se demander s’ils répondent toujours aux problématiques des entreprises et des salariés », estime Virginie Loye, responsable des formations RH à Cegos.

Évolutions réglementaires.

Certes, beaucoup de lois ont été votées depuis 2012 (lois Rebsamen, Macron, El Khomri) censées libérer des espaces de négociation, mais les DRH en perçoivent d’abord les difficultés. Ainsi, 81 % (+ 17 points) disent qu’ils passent beaucoup de temps à négocier des accords à la suite des évolutions réglementaires et 61 % qu’ils se heurtent au « manque d’engagement constructif des partenaires sociaux ». « Le fait de se voir plus régulièrement n’influe pas sur la qualité du dialogue social », analyse Virginie Loye. Ce qui aurait dû créer des marges de manœuvre dans lesquelles les DRH auraient pu exprimer leur potentiel est donc pour l’instant – en attendant les effets de la loi El Khomri ? – perçu comme un moment administratif.

Attentes d’individualisation.

Cette dérive pose problème à deux égards. D’abord, elle crée un décalage avec ce que les salariés espèrent des DRH. La qualité principale que les premiers attendent (65 %) des seconds est en effet d’être à l’écoute, or seuls 41 % des DRH pensent que cette qualité est importante. L’écart est tout aussi grand sur la question du respect des engagements et de la rigueur morale. Les salariés veulent un DRH de proximité (43 %) mais le perçoivent rarement (23 %) comme tel. Sans surprise, le principal reproche que les salariés adressent aux DRH est de ne pas suffisamment prendre en compte le facteur humain (56 % ; +19 points).

« Les entreprises s’organisent essentiellement par des processus collectifs, or les salariés, notamment les jeunes, ont des attentes d’individualisation de plus en plus fortes », explique Virginie Loye. Ensuite, et plus accessoirement, cette dérive crée un décalage entre ce qui a attiré les DRH dans ce métier – les deux tiers viennent de la filière RH – et la manière dont ils le pratiquent (voir le graphe). Pour autant, les DRH restent très attachés à leur fonction : les deux tiers s’y voient encore dans cinq ans et 74 % la recommanderaient.

Partenaire humain.

Ce qui semble de l’incohérence serait en fait de l’optimisme. Les évolutions de leur fonction que pressentent les DRH pourraient en effet réduire les décalages ressentis. Ils sont de plus en plus nombreux (48 % ; +37 points) à penser qu’au cours des cinq prochaines années, la fonction RH tiendra principalement le rôle de partenaire humain (RPS, QVT, accompagnement humain des projets…) et moins souvent (33 % ; -2 points) celui de partenaire business. Faut-il y voir un abandon de l’idée communément admise depuis des années par les DRH et promu par la littérature managériale selon laquelle le salut de la fonction RH réside dans la création de valeur économique ? « C’est peut-être un idéal, plus qu’une projection, tempère Annick Allégret, en charge de l’activité conseil et formation sur mesure de Cegos. Mais on est allés trop loin dans la recherche du partenariat business et il y a maintenant un retour de balancier. En tout état de cause, l’équilibre sera difficile à trouver. » Selon elle, la digitalisation de la fonction RH pourrait contribuer à ce nouvel équilibre. Cela tombe bien : 33 % des DRH (+ 31 points) pensent que la fonction sera de plus en plus virtuelle. Mais, au lieu de les éloigner encore plus du terrain, la digitalisation déchargerait les RH de certaines tâches et leur permettrait de mieux répondre aux attentes individuelles des salariés. C’est en tous cas le pari d’Annick Allégret : « Pour être plus humaine, la fonction RH doit devenir plus digitale. »

* Enquête menée en juin auprès de 245 DRH et RRH et 960 salariés d’entreprises de plus de 100 salariés, à 72 % dans le secteur privé.

Auteur

  • Emmanuel Franck