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Rien ne sert de pourrir…

La chronique | publié le : 20.09.2016 |

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Rien ne sert de pourrir…

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Philippe Détrie la maison du management

Une récente publication

du quotidien Les Échos(1) comparait les deux meilleures universités au monde, Harvard et Stanford. Le classement de Shanghai confirmait la suprématie de Harvard dans cette guerre de l’excellence pour la quatorzième année consécutive.

Parmi l’impressionnante galerie des alumni, cinq ont attiré mon œil : Bill Gates, fondateur de Microsoft, l’acteur Matt Damon, l’écrivain John Steinbeck, Larry Page, fondateur de Google, et Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook. L’extraordinaire résidait dans le fait que chacun était entré à Harvard ou à Stanford mais n’avait pas terminé ses études. J’y vois un triple enseignement.

Miser sur soi plus que sur l’institution

Ils ont tous préféré troquer une reconnaissance officielle pour une aventure personnelle. À leurs yeux, l’enseignement et le rang de sortie ne présentaient pas d’intérêt, l’essentiel est de réussir le concours d’entrée, puisque c’est là qu’a lieu la sélection et qu’on vous assimile tout de même à un ancien élève. Gravir la marche la plus difficile pour obtenir un passeport d’excellence leur est apparu suffisamment différenciant : ils ont ensuite préféré le hors-piste, qui a contribué à dimensionner leurs personnalités hors norme. C’est ce qu’on dit en France : il y a plus fort qu’entrer à Polytechnique, c’est d’en démissionner…

Incroyable aussi, les trois stars du management citées, ainsi, que Steve Jobs (qui lui aussi a démissionné de Reed College) font partie du cénacle des cinq plus grandes réussites entrepreneuriales actuelles : Google, Apple, Facebook, Amazon(2), Microsoft. Ils ont bien fait de ne pas se laisser enfermer, voire “pourrir” ; le monde, d’ailleurs, peut les remercier d’être partis à point et d’avoir osé leur aventure pour notre plus grand bénéfice !

Revisiter les modalités d’apprentissage

Ces extraordinaires succès ne plaident pas en faveur de l’enseignement dispensé. Ils confirment les résultats du modèle d’apprentissage et d’innovation connu sous le nom de 70 : 20 : 10(3). Le développement vient :

• 10 % de cours, lectures, formations formelles ;

• 20 % de relations, d’échanges, d’interactions ;

• 70 % de missions difficiles, de l’expérientiel.

Au-delà de l’action, le challenge devient le meilleur pédagogue. Et c’est ce que le management d’aujourd’hui préconise : le goût du défi, la stratégie du chemin faisant, les démarches de “test and learn”, la culture start-up qui libère créativité, autonomie, droit à l’erreur… Adieu l’apprenance, vive l’appétence !

Changer notre management

Regardons nos organisations et nos process RH : tout date encore du siècle dernier !

• La formation consacre quasiment tout son budget à du traditionnel formel (les 10 %).

• Le recrutement apprécie les diplômes et les carrières linéaires, alors que l’expérience, les erreurs, les échecs sont bien plus formateurs.

• La promotion privilégie les résultats, peu les efforts ou les caractères. Ne parlons pas de la Fonction publique, qui s’appuie sur trois critères : le diplôme, l’ancienneté, la mobilité. Rien à voir avec la personnalité ou la qualité de service ! Au fou !

• La communication interne reste la voix de son maître et ne valorise que les succès.

Notre management laisse peu de place au risque et préfère le syndrome du “pdv” de mon ami Hervé Sérieyx, le “pas-de-vague”. Principe de précaution : tout doit être sous contrôle ! C’est si confortable mais si mortifère.

Trois conseils

• N’hésitez pas à évaluer votre satisfaction au travail et, si vous vous ennuyez, changez. Si vous pensez que l’aventure est dangereuse, essayez la routine, elle est mortelle !

• Donnez-vous des challenges : c’est une assurance d’engagement et de progrès.

• Métabolisez vos erreurs en retours d’expérience : vous transformerez les pépins en pépites.

(1) Les Échos Week-End, 26 et 27 août 2106.

(2) Son fondateur Jeff Bezos est diplômé de l’université de Princeton. Le pauvre !

(3) Le “Model for Learning and Development” a été mis au point par les chercheurs Morgan McCall, Michael M. Lombardo et Robert W. Eichinger du Center for Creative Leadership, et publié en 1996 dans The Career Architect Development Planner.