La question du temps de travail en France semble tellement frappée au coin de l’idéologie qu’il paraît impossible de la regarder sereinement. Plus qu’une problématique économique et sociale, elle se présente d’abord comme une question politique voire éthique. Comme s’il y avait d’un côté les salariés paresseux et de l’autre des patrons consciencieux et moraux, qui ne jurent que par le travail pour enrichir les nations. Mais alors que le travail se raréfie et se raréfiera toujours plus par la magie du numérique et de la robotisation, est-il vraiment judicieux d’en augmenter le temps obligatoire, sauf à vouloir accroître encore un peu le fossé entre ceux qui ont un emploi et ceux toujours plus nombreux qui n’en ont pas, ou pas assez pour vivre ?

À l’heure où la droite décomplexée prétend revenir aux 39 heures, les auteurs, l’un économiste et l’autre sociologue, expliquent que la question taboue de la réduction du temps de travail mérite de revenir sur la table. La semaine de quatre jours, déjà anticipée par Einstein dans les années 1930, pourrait, selon eux, provoquer ce fameux choc de solidarité susceptible de booster le partage du travail. Quatre jours (soit 32 heures) pour éviter les phénomènes d’intensification du travail corrélatifs de la loi Aubry – qui ont contribué à l’aggravation des risques psychosociaux et limité l’impact des 35 heures à la création de 350 000 emplois – pourraient engendrer un phénomène de reprise d’emploi de plus large envergure.