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Gestion d’équipe : Manager les collaborateurs sous contrat atypique

Les clés | publié le : 28.06.2016 | Florence Roux

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Gestion d’équipe : Manager les collaborateurs sous contrat atypique

Crédit photo Florence Roux

Comment intégrer, accompagner et motiver les salariés en contrats courts ou partiels, en temps partagé ou en portage salarial ? Tel est l’enjeu des managers de personnels en emploi atypique.

Saisonniers, CDD, intérim, temps partagé ou portage salarial… Divers, les modes “atypiques” représentent un tiers des emplois, mais deux tiers des embauches. « Les entreprises qui y recourent le font souvent dans l’urgence ou par habitude, note Chantal Prina, chargée de mission à l’Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail Auvergne Rhône-Alpes (Aravis, lire aussi p. 37). Or le manager doit bien se préoccuper de ces salariés pour faciliter à la fois leur parcours et la performance de l’entreprise. »

Des arguments qu’approuve Régis Courvoisier, directeur de l’office de tourisme (OT) Estérel Côte d’Azur, à Saint-Raphaël, dont l’équipe, en été, passe de 8 à 16 personnes : « Le management est la clé du tourisme. Pour vendre une destination, il faut l’apprécier, bien travailler ensemble et développer ses compétences. »

Dès leur arrivée, au printemps, les salariés d’été testent avec des permanents les balades et les animations. « Cette découverte des produits, informelle, rapproche les gens », note Régis Courvoisier. Puis les saisonniers enchaînent des briefs hebdomadaires, voient le directeur en cas de « contrainte personnelle, de type garde d’enfant », et font avec lui un bilan de fin de contrat. Cette année, l’OT expérimente le Mooc Tourism Academy. « Ils apprennent au gré de leurs pauses – mais rapidement – les fondamentaux du secteur, estime Régis Courvoisier. Ça crée une émulation, avec des “battles” qui fédèrent permanents et saisonniers. »

Autre cadre, mais même esprit, dans l’organisme de tourisme social Vacances ULVF (18 sites en France). « Nous travaillons à déprécariser et à fidéliser nos 400 saisonniers [pour 80 permanents, NDLR], en nous appuyant à la fois sur les directeurs de site, formés à l’accueil des personnels, et sur les managers de proximité, qui sont eux-mêmes saisonniers. » Cette année, un tiers des 90 saisonniers “titulaires” (qui ont travaillé 12 des 24 derniers mois et ont un emploi réservé) suivent quatre mois de formation au management. À la fois pour les fidéliser et pour structurer l’encadrement.

Jeune économe polyvalente, Mélissa Thimonier s’apprête à gérer le planning de quatre serveurs à Praz-sur-Arly (74) : « La formation nous a beaucoup appris sur nous-mêmes et sur la gestion d’équipe. Cet hiver, j’ai déjà été plus attentive aux serveurs que je formais aux règles de stockage. J’ai appris à déléguer. »

À la société des remontées mécaniques de Morzine-Avoriaz (Serma), où 240 des 300 salariés sont saisonniers, « les CDD ont une valeur de CDI », assure Thomas Faucheur, directeur adjoint et DRH. Les managers proposent une remise à niveau en début de saison. Convention collective oblige, les salariés peuvent retrouver leur poste la saison suivante et, « comme les permanents, note le DRH, ils ont des réunions, de l’évaluation, de l’ancienneté et sont souvent attachés à l’entreprise. En début de saison, ils sont souvent plus frais et motivés que ceux qui n’ont pas quitté leur poste ! ».

En Haute-Savoie également, le groupement d’employeurs GES 74 salarie 15 personnes – dont 13 en CDI – pour effectuer des missions tertiaires dans 31 TPE-PME. « À temps partagé, management partagé, affirme Christine Ginestet, directrice du GE. Les entrepreneurs qui ne voient leur secrétaire que pour une mission hebdomadaire se concentrent sur l’encadrement de l’activité. » C’est le GE, le « tiers employeur », qui coordonne les premiers contacts, la définition des fiches de poste et le suivi des personnes, même à distance. « Nous organisons au moins un repas par an pour fédérer l’équipe éparpillée du GE, ajoute la directrice. Peu à peu, nous collaborons mieux, avec de la GPEC, des grilles d’évaluation que je remets à l’entreprise, en confiance : il s’agit de management participatif ! »

Dynamique de groupe

Martine Bres, directrice Rhône-Alpes de l’Institut du temps géré (ITG), entreprise de portage salarial, préfère le terme d’accompagnement à celui de management pour les 300 consultants actifs qu’elle suit, salariés sans lien de subordination. « Experts, ils maîtrisent en général leur projet, dit-elle. En mission en entreprise, ils ont des relations de clientèle. Mais nous leur proposons tout de même, s’ils le veulent, hors de toute hiérarchie, des solutions contre l’isolement, des conseils. » La directrice mise sur la dynamique de groupe, avec réunions d’information, ateliers d’expertise et formations, mais elle assure aussi des entretiens et des débriefings individuels. « Et, ajoute-t-elle, les consultants en RH et en management sont plus demandeurs d’accompagnement que ceux qui sont sur des missions techniques. »

Les conseils du coach

Chantal Prina

Chargée de mission à l’Aravis-Aract*

–1– Soigner l’intégration dans l’équipe mixte

Gérer une équipe mixte, avec des personnels qui ont différents statuts (plein temps, temps partiel, réguliers ou juste de passage), implique d’accorder une attention particulière à ces salariés “atypiques”, d’être au courant de leurs contraintes d’organisation pour mieux les intégrer. Cela nécessite notamment pour le manager de vérifier que tous ont accès aux mêmes informations, de favoriser la coopération et le partage d’expérience dans l’équipe et d’organiser des coordinations, formelles ou non, sur des temps de travail communs à tous.

–2– Instaurer un dialogue autour du travail

Le dialogue sur le travail est central mais difficile à organiser dans certaines situations, surtout lorsqu’il implique à la fois le salarié, son employeur et l’entreprise dans laquelle il est mis à disposition. Avant, pendant, après une mission, les entreprises concernées doivent donc inventer des modalités de dialogue qui permettront au salarié de réaliser son travail en sécurité, rendront possible l’expression de ses difficultés éventuelles et, au-delà, faciliteront son parcours.

–3– Inscrire l’emploi dans la durée et sur le territoire

Le recours aux formes atypiques d’emploi et de travail est souvent, pour les entreprises, une réponse à des contraintes d’activité. Mais une gestion court-termiste ne contribue pas toujours à une performance durable et peut être source de tensions dans les équipes. Au-delà des pratiques managériales, les employeurs et les entreprises utilisatrices doivent mettre en place une politique RH anticipatrice, qui peut s’appuyer sur des relais-emploi-formation territoriaux.

* Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail Auvergne Rhône-Alpes. Elle est l’auteure du guide Formes atypiques d’emploi et de travail, pour des pratiques sécurisantes et performantes.

Auteur

  • Florence Roux