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Pr Gérard Lasfargues directeur général adjoint scientifique de l’ANSES (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail)

La semaine | L’interview | publié le : 28.06.2016 | Virginie Leblanc

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Pr Gérard Lasfargues directeur général adjoint scientifique de l’ANSES (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail)

Crédit photo Virginie Leblanc

« Il faut évaluer les coûts sociaux du travail de nuit »

L’Anses vient de publier un avis sur l’évaluation des risques sanitaires auxquels sont exposés les professionnels exerçant leur activité en horaires de nuit. Quel est l’apport de cette étude ?

C’est la première fois qu’une agence de sécurité sanitaire évalue l’ensemble des effets sanitaires possibles du travail de nuit avec ces niveaux de preuve. Notre rapport montre que ce type d’horaires engendre trois types d’effets : des effets avérés de court terme sur le sommeil et la vigilance ; de long terme sur le métabolisme ; et aussi des effets probables sur l’obésité, le diabète et sur les maladies cardiovasculaires et coronariennes. Et nous confirmons le caractère cancérogène probable du travail de nuit, déjà établi par le Centre international de recherche sur le cancer. On sait aussi désormais que le travail de nuit perturbe nos rythmes biologiques circadiens – calés sur 24 heures – et entraîne des dettes de sommeil et un sommeil de moins bonne qualité. Cela engendre un risque d’accident du travail plus fréquent, voire plus grave, avec un retentissement sur la vie familiale et sociale et, sur le plus long terme, des risques sur la santé psychique.

Quelles sont vos recommandations afin de réduire ces risques pour la santé ?

Nous préconisons d’adapter les horaires de nuit afin de réduire autant que possible les perturbations des rythmes biologiques. Il faut par exemple favoriser la récupération de sommeil, par des siestes, des pauses ; mais il est aussi nécessaire de tenir compte des caractéristiques individuelles de chacun. De plus, il nous paraît fondamental de s’intéresser à l’ensemble des conditions de travail : la pénibilité physique et d’autres contraintes spécifiques s’ajoutant au travail de nuit. Les entreprises doivent aussi s’assurer que le collectif de travail est capable de rattraper les erreurs individuelles. Enfin, par le dialogue social, il faut agir sur les parcours professionnels, afin d’éviter des durées d’exposition trop longues. Par ailleurs, si la loi précise que le travail de nuit est en principe exceptionnel et qu’il doit être justifié par la nécessité d’assurer la continuité des services d’utilité sociale ou de l’activité économique, cette dernière notion n’est pas définie. L’Anses préconise d’évaluer les coûts sociaux associés au regard des bénéfices potentiels et de réaliser un état des lieux des pratiques de terrain visant à protéger la santé des travailleurs de nuit.

Auteur

  • Virginie Leblanc