logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

L’enquête

Efi Automotive : Le pari de la GPEC

L’enquête | publié le : 21.06.2016 | É. S.

Coconstruit par la direction et la CFDT, l’accord veut « mettre en mouvement » les salariés de l’équipementier. Objectif : accompagner la transformation du site pour écarter les menaces sur l’emploi, mais aussi pour renforcer à terme l’employabilité de tous.

Comment maintenir sa rentabilité avec une pression sur les prix de plus en plus forte et un volume d’activité en repli ? Sur le site français de l’équipementier Efi Automotive, telle est la question qui agite les esprits en ce début 2015. Évoquée à mi-mots, l’hypothèse du PSE commence à faire son chemin, avant d’être écartée… par les dirigeants de l’entreprise familiale eux-mêmes. « Un actionnaire peu attaché à l’emploi aurait déclenché un PSE, car à ce moment-là les perspectives budgétaires étaient très difficiles. En l’occurrence, on nous a donné trois ans pour nous adapter, en mettant la priorité sur l’alignement des compétences », explique le DRH, Franck Fernez.

Il faut dire que le précédent plan social, en pleine crise de 2009, bien que fondé sur des départs volontaires, a laissé des cicatrices : « Quand l’activité est repartie, l’organisation n’était pas préparée, car on s’était focalisés pendant toute la durée du plan sur les départs », se souvient Nicolas Innocenzi, délégué syndical CFDT.

Dès lors, la solution de la GPEC s’impose. Appuyée par l’union régionale et le cabinet Syndex, la CFDT (seul syndicat présent) insiste pour que l’accord, alors en cours de négociation, soit étroitement articulé à la stratégie et au plan de transformation envisagés. « La consultation obligatoire sur les orientations stratégiques a été un levier efficace pour que le comité de direction finalise sa réflexion », confie Franck Fernez.

Le document cartographie les emplois en plusieurs catégories (à forte évolution, stables, menacés). « Pour chaque métier, on détermine les évolutions sur 2016, 2017 et 2018, avec une réévaluation chaque année. Le cas échéant, on indique le nombre de postes amenés à disparaître d’ici à un, deux ou trois ans », poursuit Nicolas Innocenzi. « Plutôt que de présenter des orientations générales – cas le plus fréquent dans les entreprises –, c’est presque un livre 2 qui a été élaboré, complète Gilles Amiet, directeur associé du cabinet Oasys, qui a conseillé la DRH. Schématiquement, au lieu de faire un livre 2 et un livre 1, Efi Automotive a utilisé le cadre juridique de la consultation sur la stratégie et celui de la GPEC, en y mettant les moyens généralement alloués aux PSE. »

Des Emplois en évolution

Début 2015, une quarantaine de CDI étaient menacés, surtout dans les emplois hors production. Une prévision revue finalement à la baisse, après qu’une dizaine de personnes « se sont reconverties en interne ou ont choisi une mobilité externe sécurisée, détaille le DRH. Actuellement, il n’y a plus d’emplois menacés à court terme, mais c’est très évolutif, et cela dépendra aussi du succès du volet qualitatif de la GPEC, qui doit contribuer à un regain de performance économique et de compétitivité ».

Car c’est là que réside désormais l’enjeu prioritaire : environ 30 % du personnel indirect, soit une centaine de personnes, occupent des postes dans des emplois « en forte évolution ». Pour eux, il s’agit notamment de pouvoir suivre les changements technologiques et l’internationalisation des fonctions. Or « les écarts de compétences peuvent être importants », souligne le DRH. Quant aux opérateurs, ils seront à moyen terme confrontés à l’automatisation des process et à des produits de plus en plus complexes.

Pour « mettre l’entreprise en mouvement », l’accord GPEC comprend un certain nombre de mesures : le budget formation doit passer de 250 000 à 400 000 euros par an pendant ses trois ans d’application. La certification CléA (qui valide un socle de compétences et de connaissances) est proposée aux opérateurs. Efi Automotive s’est aussi rapproché du dispositif de GPEC territoriale Alliance, qui organise des détachements temporaires pour les salariés des entreprises partenaires. « Ce dispositif peut permettre au salarié volontaire de s’oxygéner, d’expérimenter un autre emploi et d’enrichir son profil de compétences », précise le DRH. Animé par des consultants d’Oasys, un « espace développement » est en place depuis fin 2015. Il sera accessible à tous les salariés pendant les trois ans de l’accord afin de les accompagner dans leurs réflexions. Une longévité exceptionnelle, note Gilles Amiet.

Pour autant, rien n’est joué d’avance. Si une centaine de personnes se sont rendues à l’espace développement, « on y compte encore trop peu de salariés sur des métiers en forte évolution, regrette le DRH. On voit aussi qu’il est parfois difficile pour la hiérarchie d’annoncer aux collaborateurs qu’il leur manque des compétences et qu’ils doivent se former. Et, jusqu’à présent, les salariés peuvent avoir du mal à “challenger” leurs compétences si leur emploi n’est pas directement menacé ».

Des opérateurs intéressés

Mais il est vrai que, chez Efi Automotive, entreprise plutôt paternaliste avec un faible turn-over, la mobilité n’est pas dans les habitudes. « Il n’y avait pas de dynamique de GPEC avant 2015, pointe Claire Monnier, responsable régionale du cabinet Syndex. Ce qui explique qu’on se situe aujourd’hui dans une optique défensive. » Laquelle s’ancre aussi, selon elle, dans une démarche globale de RSE, l’objectif des partenaires sociaux étant – au-delà des adaptations nécessaires pour le site – de renforcer l’employabilité de l’ensemble des salariés. D’ailleurs, ce sont les opérateurs qui se montrent les plus intéressés : « Le dispositif CléA suscite un réel enthousiasme auprès d’une population depuis longtemps sortie des bancs de l’école, se réjouit Franck Fernez. Nous venons même de monter deux CQPM. » Le début du changement ?

Repères

Activité

équipementier automobile (capteurs).

Effectifs

1 400 salariés dont 700 en France.

Chiffre d’affaires (Europe)

140 millions d’euros en 2015.

Auteur

  • É. S.