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Chronique

La chronique juridique d’avosial

Chronique | publié le : 21.06.2016 | Florent Millot

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La chronique juridique d’avosial

Crédit photo Florent Millot

Détachement de personnel en France : points de vigilance

Un plan national établi pour la période 2013-2015 a fixé cinq objectifs prioritaires de lutte contre le travail illégal, dont la lutte contre les fraudes au détachement dans le cadre des prestations de service internationales.

Sur le terrain, les objectifs fixés se sont traduits par une intensification des contrôles opérés par l’inspection du travail.

Au plan législatif, on connaissait déjà l’obligation de vigilance découlant de l’article L. 8222-1 du Code du travail et imposant à tout donneur d’ordre ou maître d’ouvrage la collecte, auprès de son cocontractant, d’un certain nombre de documents visant à s’assurer de son existence légale et de la régularité de sa situation vis-à-vis des administrations sociales. À la clé, en cas de non-respect, la solidarité financière du donneur d’ordre, ce dernier pouvant être tenu de payer les cotisations sociales, pénalités, majorations, rémunérations, indemnités et charges dues par son cocontractant.

L’accent a été mis dernièrement sur le détachement de salariés étrangers sur le territoire français et cela en deux temps : la loi du 10 juillet 2014 (dite loi Savary) puis la loi du 6 août 2015 (dite loi Macron).

Dorénavant, les entreprises non établies en France qui détachent des salariés sur le territoire national, soit pour effectuer une prestation de service, soit pour leur compte propre, sont tenues :

– d’effectuer préalablement une déclaration de détachement auprès de l’inspection du travail (art. L. 1262-2-1 I) ;

– de désigner un représentant de l’entreprise sur le territoire national, chargé d’assurer la liaison avec l’administration française (art. L. 1262-2-1 II) ;

– d’appliquer à leurs salariés un “noyau dur” de dispositions issues de la législation française, notamment en matière de rémunération minimale légale mais aussi et surtout conventionnelle.

Afin de garantir l’effectivité de ces dispositions, les lois des 10 juillet 2014 et 6 août 2015 ont accentué les obligations et les sanctions :

Tout d’abord, l’entreprise française qui va avoir recours à une entreprise basée à l’étranger (dans ou hors Union européenne) devra vérifier que cette dernière a effectué la déclaration préalable de détachement (loi Savary) et, en son absence, effectuer celle-ci dans les 48 heures suivant le début du détachement (loi Macron).

L’entreprise donneuse d’ordre qui n’opère pas la vérification ou qui n’effectue pas elle-même la déclaration de détachement s’expose à une amende administrative, dont le montant maximum de 2 000 euros par salarié détaché (4 000 euros en cas de récidive dans un délai d’un an) est fixé par le Direccte.

S’agissant du paiement du salaire minimum, la loi Macron a prévu une obligation pour le donneur d’ordre, informé par écrit d’une irrégularité en ce domaine, de dénoncer le contrat de prestation de service qui le lie avec son cocontractant en cas de non-régularisation de la situation.

Les obligations des entreprises donneuses d’ordre devraient s’amplifier encore avec le projet de loi El Khomri (en discussion à l’heure où nous écrivons), qui envisage notamment :

– d’étendre l’obligation de vérification du donneur d’ordre à toute la chaîne de sous-traitance. Cela signifie que le donneur d’ordre devrait à l’avenir contrôler que son cocontractant direct a opéré la déclaration ainsi que les sous-traitants de second rang et au-delà ;

– une nouvelle sanction associée à l’obligation de déclaration subsidiaire du donneur d’ordre : la possibilité pour l’administration de suspendre la réalisation de la prestation de service pour une durée d’un mois maximum (sanction qui existe déjà, mais uniquement pour des manquements graves en droit du travail : salaire minimum, durée du travail, repos…).

Simples, ces obligations nécessitent toutefois une grande attention car, bien souvent, les interlocuteurs internes chargés d’assurer leur mise en œuvre ne mesurent pas les conséquences et les sanctions découlant de leur non-application ou de leur mauvaise application. Élaborer une procédure écrite détaillée et largement diffusée est donc très fortement recommandé.

Auteur

  • Florent Millot