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Sur le terrain

Retour sur… Le recrutement des alternants chez Carrefour

Sur le terrain | publié le : 24.05.2016 | Catherine de Coppet

En 2013, le groupe de grande distribution a pris des engagements ambitieux en matière d’alternance. L’objectif a été atteint pour les volumes de contrats signés. Mais le bilan pèche par un faible taux d’intégration en CDI dans l’entreprise.

Embaucher quelque 15 000 jeunes en alternance sur trois ans, tel était l’objectif fixé par le groupe Carrefour en 2013 pour la France. Au sein de la filiale Hypermarchés Carrefour, qui concentre 60 % des effectifs, cette politique ambitieuse s’était traduite par un objectif de 10 000 embauches d’alternants, intégré au « pacte social » signé à l’occasion de la NAO 2013, avec la CFDT, FO et la CFE-CGC.

Trois ans après, l’heure est au bilan, plutôt positif. « Nous avons tenu nos engagements, puisque les “hypers” ont signé, sur la période, quelque 9 300 contrats de professionnalisation et 800 d’apprentissage », se félicite le DRH Pascal Monin. Des jeunes principalement recrutés pour répondre à des besoins récurrents dans l’entreprise : un tiers dans les métiers de bouche, un tiers au poste d’hôte(sse) de caisse.

Partenariat avec les CFA

Afin d’amplifier le volume de contrats en alternance, l’entreprise a d’abord passé des conventions de partenariat avec des centres de formation d’apprentis (CFA). De 10 en 2013, le nombre de ces CFA est passé à 17 selon la direction, synonyme notamment d’une meilleure répartition géographique des sources de recrutement. « Trois nouvelles écoles ont par ailleurs été labellisées en CQP boucher. Nous développons avec elles des classes dédiées Carrefour, et nous organisons tous les ans des sélections régionales pour notre concours national du meilleur apprenti boucher et boulanger », précise Pascal Monin.

Une diversité de compétences

Carrefour a ensuite aménagé certains parcours, afin de pouvoir affecter certains jeunes à plusieurs rayons en fonction de la saisonnalité des besoins. Un point non inscrit dans l’accord, mais qui a été utilisé pour les contrats de professionnalisation, selon la DRH. « Il s’agit de proposer aux jeunes de passer du rayon jardin, en mai, au rayon scolaire l’été, puis foire au vin en septembre, par exemple », explique Pascal Monin. L’idée étant de permettre au jeune de développer des compétences diverses et pour l’entreprise de proposer des contrats de professionnalisation d’une certaine durée. « La majorité des contrats de professionnalisation sont des parcours sur six mois », indique le DRH.

Enfin, la politique mise en place en 2013 comportait également tout un volet pour les salariés permanents de l’entreprise, afin d’encourager le tutorat des jeunes en alternance. Une formation de trois jours au tutorat était prévue. Quelque 2 800 salariés en ont bénéficié sur la période, avec à la clé une prime de 100 euros si le salarié menait sa mission de tuteur jusqu’à son terme. « Certains salariés sont très intéressés par la possibilité de transmettre leurs compétences, leur savoir-être et leur savoir-faire. Nous tenons à cette mémoire vivante de nos magasins », souligne Pascal Monin.

Malgré ces efforts, les hypermarchés n’ont pas atteint l’objectif de transformation en CDI fixé dans le pacte social, soit 50 % des alternants recrutés. « Nous transformons en CDI ou CDD 43 % de nos contrats en alternance », détaille le DRH. Un taux resté stable sur les trois ans.

Selon les organisations syndicales, sur l’ensemble des jeunes recrutés à l’issue de leur alternance, seule la moitié a été embauchée en CDI. « Cela confirme la tendance de ces dernières années, qui est à une baisse importante des effectifs, pointe Thierry Babot, délégué syndical central CFDT. Nous sommes passés de plus de 65 000 salariés en 2010 à un peu plus de 60 000 en 2015 ! C’est autant de pression sur les conditions de travail au quotidien… »

Une meilleure employabilité

Le DRH estime pour sa part que ce mauvais résultat ne doit pas cacher l’ambition de l’entreprise auprès des jeunes : « Nous tenons à cette mission de formation que nous assurons auprès des jeunes pour leur garantir une meilleure employabilité ; tous ne seront pas recrutés, mais nous avons toujours l’ambition d’atteindre les 50 % de transformation en CDI. »

Un discours qui ne passe pas très bien du côté des organisations syndicales, qui dénoncent le manque de cohérence de la politique RH et réclament une augmentation des effectifs. « L’entreprise abuse des possibilités offertes par l’État, estime Franck Gaulin, délégué syndical central CGT. Dans certains magasins, on a constaté un recours abusif aux PMSMP – Période de mise en situation en milieu professionnel, ex-EMT, à destination des personnes en insertion professionnelle et non rémunérée par l’entreprise d’accueil, NDLR. Avec l’alternance aussi, il y a un effet d’aubaine. » Un mécanisme de “vivier”, prévu par l’accord de 2013, a néanmoins été mis en place en 2015 : il consiste à garder le contact avec d’anciens alternants, afin de leur proposer des postes dans les quatre mois qui suivent la fin de leur contrat. Selon la direction, 300 jeunes en auraient bénéficié, pour des CDI ou des CDD.

Signé en février dernier par la CFDT, la CFE-CGC et FO, le dernier accord de NAO, pour 2016, n’inclut aucune disposition particulière concernant l’embauche de jeunes ou la politique d’alternance. La direction s’engage cependant à augmenter l’effectif global entre 2015 et 2016, mais uniquement en cas de hausse du chiffre d’affaires « hors taxes et hors carburant ».

Auteur

  • Catherine de Coppet