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Chronique

La chronique juridique d’avosial

Chronique | publié le : 10.05.2016 | Nathalie Pequiman

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La chronique juridique d’avosial

Crédit photo Nathalie Pequiman

Le contrôle des messageries electroniques

La Cour de cassation continue de construire sa jurisprudence avec l’interdiction d’accès de l’employeur aux courriels issus de la messagerie personnelle des salariés (Cass. soc., 26 janvier 2016, n° 14-15.360). Cet arrêt est l’occasion de rappeler quelques règles circonscrivant le contrôle par l’employeur de l’utilisation par ses salariés des moyens informatiques mis à leur disposition dans le cadre de leur activité professionnelle.

Le salarié a droit, même au temps et au lieu du travail, au respect de l’intimité de sa vie privée, sur le fondement de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), de l’article 9 du Code civil et de l’article L. 1121-1 du Code du travail (Cass. soc. 2 octobre 2001, n° 99-42.942, Nikon).

Les courriels personnels du salarié sont protégés par le secret des correspondances, dont la violation constitue un délit réprimé, aux termes de l’article 226-15 du Code pénal, par une peine d’emprisonnement d’un an et une amende de 45 000 euros ; ils ne sauraient valablement constituer un moyen de preuve dans le cadre d’une instance prud’homale.

Les courriels émis de la messagerie professionnelle mise à la disposition du salarié sont présumés revêtir un caractère professionnel, à moins que le salarié ne les identifie comme étant personnels (Cass. soc. 15 décembre 2010, n° 08-42.486), étant précisé que les courriels et fichiers intégrés dans le disque dur de l’ordinateur mis à la disposition du salarié par l’employeur « ne sont pas identifiés comme personnels du seul fait qu’ils émanent initialement de la messagerie électronique personnelle du salarié » (Cass. soc. 19 juin 2013, n° 12-12.139).

L’employeur ne peut valablement prendre connaissance des messages personnels émis et reçus par les salariés grâce à un outil informatique mis à leur disposition, même au cas où il aurait interdit une utilisation non professionnelle de l’ordinateur (Cass. soc. 2 octobre 2001, précité).

Toutefois, l’employeur peut recourir au juge, sur requête ou en référé, en vue d’obtenir une ordonnance mandatant un huissier pour prendre connaissance des messages personnels d’un salarié dans le cadre de la procédure prévue par l’article 145 du Code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige (Cass. soc. 23 mai 2007, n° 05-17.818), étant précisé que, dans cette affaire, l’huissier avait rempli sa mission en présence du salarié.

Saisie de la requête d’un ressortissant roumain, qui invoquait la violation de l’article 8 de la CEDH, la Cour européenne des droits de l’homme a considéré, dans un arrêt récent, qu’un employeur peut, sans violation de l’article susvisé, vérifier que ses salariés accomplissent leurs tâches pendant les heures de travail en accédant à un compte Yahoo Messenger, créé pour répondre aux demandes des clients et par lequel il s’est avéré que des messages personnels avaient été échangés en violation du règlement intérieur (CEDH, 12 janvier 2016, Barbulescu c. Roumanie, n° 61496/08).

Dans la même lignée, les messages écrits (short messages service ou SMS) envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l’employeur est en droit de les consulter en dehors de la présence de l’intéressé, sauf s’ils sont identifiés comme étant personnels. La production en justice des messages non identifiés comme étant personnels par le salarié ne constitue donc pas un procédé probatoire déloyal (Cass. com. 10 février 2015, n° 13-14779, rendu après avis de la chambre sociale, avis Cass. 13 novembre 2014, n° 13-14.779).

Nul doute que le contentieux en la matière va continuer de s’intensifier au regard de l’utilisation toujours croissante de la messagerie électronique dans toutes ses formes (courriels, SMS, plates-formes de communication en ligne, etc.).

Auteur

  • Nathalie Pequiman