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Sur le terrain

Retour sur… L’application du plan Transform à Air France

Sur le terrain | publié le : 26.04.2016 | Rozenn Le Saint

En 2012, un accord destiné à rétablir la rentabilité de la compagnie à l’horizon 2015 est signé. Et l’année dernière, Air France est redevenue bénéficiaire pour la première fois depuis sept ans. Pour autant, les personnels au sol, qui ont déjà payé un lourd tribut en termes d’emploi, subiront un nouveau plan de départs volontaires cette année. Les pilotes, eux, viennent de rejeter le nouveau plan, Perform 2020.

En 2015, Air France a enregistré un bénéfice net de 118 millions d’euros. Amélioration due, en grande partie, à la mise en œuvre du plan Transform 2015, expliquait en février Alexandre de Juniac, futur ex-Pdg du groupe Air France-KLM dans une interview accordée au Figaro. Mais, pour que la compagnie sorte complètement la tête de l’eau, il demande tout de même aux personnels « encore des efforts ». L’annonce de ces résultats s’est ainsi accompagnée de celle d’un nouveau plan de départs volontaires (PDV) portant sur 1 400 suppressions de postes en 2016 parmi les personnels au sol.

Cette catégorie de salariés a pourtant payé son tribut au plan d’économie Transform 2015. Cet accord, signé en 2012 avec la CFDT, la CFE-CGC et FO, mêlait suppressions d’emploi, gel des salaires, hausse du nombre de jours travaillés, règles d’avancement moins favorables, etc. Depuis 2010, environ 6 500 membres du personnel au sol ont quitté l’entreprise via les différents PDV. « Les économies ont déjà été faites pour cette catégorie de personnel. La direction n’a malheureusement plus qu’un seul levier unilatéral à actionner : le PDV. Elle ne peut guère l’utiliser pour les personnels navigants commerciaux (PNC) ou les pilotes, dont le nombre dans un cockpit est déterminé par des règles codifiées ; il n’y a pas tellement de marge de manœuvre », précise Béatrice Lestic, secrétaire générale de la CFDT à Air France.

Bras de fer avec les pilotes

Des accords équivalents avaient été signés à l’époque avec FO et l’Unsa pour les PNC, et avec le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) pour les pilotes. L’accord des PNC – à durée déterminée, comme celui des personnels au sol – prendra fin le 31 octobre 2016. De nouvelles négociations viennent de démarrer. Mais, pour les pilotes, l’application du plan Transform a donné lieu à un véritable bras de fer avec la direction. En cause : la non-application d’une partie de l’accord. « Le texte prévoyait de négocier des clauses ultérieurement, mais elles ne l’ont jamais été. C’est pourquoi une partie de l’accord est restée à l’état de vœu pieux », soupire Béatrice Lestic. C’est le cas, notamment, de la baisse de la majoration des heures de nuit ou de l’avancement lié au glissement vieillesse technicité (GVT). Le syndicat des pilotes se défend en expliquant que ces mesures dépendaient de contreparties « jamais mises en œuvre, selon Véronique Damon, secrétaire générale du SNPL. Comme le fait que l’activité soit supérieure pour compenser la baisse de la rémunération des heures de nuit, ou la meilleure répartition des objectifs pour la modification du GVT ».

La direction, de son côté, estime que les pilotes ont réalisé 13 % de gains de productivité au lieu des 20 % escomptés. Elle a même intenté une action en justice pour que le président de la compagnie puisse imposer l’application de l’accord, même sans l’aval de la commission de suivi. La cour d’appel lui a donné raison le 25 février, mais le SNPL a formé un pourvoi en cassation.

Quoi qu’il en soit, selon Béatrice Lestic, « pour les pilotes, les négociations du plan Transform n’aboutiront jamais. Ils ont d’autant plus la capacité de maintenir le statu quo que, lorsqu’ils arrêtent de travailler, ils plombent la compagnie, c’est leur force ». Le nouveau round de négociations, qui s’est ouvert en mars dernier, dans le cadre cette fois du plan Perform 2020, a bel et bien enterré Transform. Et par la même occasion, en prenant le relais, Perform semble bien effacer l’ardoise des pilotes. « Avec Transform, les efforts des uns étaient comparés à ceux des autres. Nous ne souhaitons plus aller vers cette direction : regarder dans l’assiette des autres n’est pas constructif », affirme Véronique Damon.

Pour autant il a été décidé, en février, qu’une prime exceptionnelle de 300 à 400 euros sera versée en 2016 à tous les personnels sauf aux pilotes, puisqu’elle est conditionnée à la finalisation du plan Transform. Et si les négociations ont bel et bien repris, la partie semble loin d’être gagnée. Un premier accord a été refusé par les pilotes en septembre dernier.

Les discussions ont repris avec Gilles Gateau, arrivé comme DRH de la compagnie le 2 novembre 2015, à peine un mois après l’épisode de la chemise arrachée de son prédécesseur Xavier Broseta (devenu DRH du groupe Air France-KLM). Et le 10 avril, la direction d’Air France a transmis aux syndicats de pilotes un projet de texte proposant non seulement une augmentation de la productivité et des mesures de flexibilité, mais aussi l’embauche de 600 pilotes d’ici à 2020.

Peine perdue : le SNPL a fait savoir dix jours plus tard qu’il rejetait cette nouvelle copie. Mais c’est aussi du côté des PNC que la mèche pourrait se rallumer. À l’issue de la première réunion de négociation, mi-avril, le SNPNC et l’Unsa ont qualifié les propositions de la direction de « provocation ». Et ils ont menacé d’un « conflit majeur »…

Auteur

  • Rozenn Le Saint