Comment faire passer l’entretien professionnel à 1 600 consultants en portage salarial (essentiellement en CDD, ils passent majoritairement en CDI depuis l’ordonnance d’avril 2015 qui institue le CDI de portage) répartis sur l’ensemble du territoire, avec peu de permanents encadrants ? « C’est la même situation que beaucoup d’entreprises, qui ont de fortes populations dispersées ou difficiles à sortir du terrain mais avec des managers en moins !, plaisante Éric Dumartin, le DRH d’Ad’Missions. À raison d’une heure par entretien, ça faisait 1 600 heures, soit une année de travail à temps plein pour un RRH ou un manager, plus son remplacement pour faire son travail normal, et je passe le coût des déplacements de nos consultants. »

Fin 2015, Éric Dumartin rencontre la société We Are Learning, spécialisée dans la création de serious games. « L’objectif n’était pas un énième e-learning pour aider les managers et les salariés à mener ou à suivre efficacement l’entretien, je voulais un truc qui fasse l’entretien à distance, presque tout seul. L’idée de base était de rendre l’entretien virtuel plus efficace qu’un entretien en face à face. » Au final, un outil en mode SaaS, accessible en tout lieu et à toute heure.

Dans une première partie, il aborde les dispositifs issus de la réforme de la formation : CEP, CPF, entretien professionnel mais aussi le CIF. « Vous connaissez un manager capable d’expliquer comment ça fonctionne à un salarié ?, justifie Éric Dumartin. Nous avons fait des liens sur les sites ad hoc des Opca ou des Fongecif pour offrir une réponse hyper précise et personnalisée. »

La seconde partie propose un questionnaire reprenant les recommandations des Opca, les compétences acquises et les difficultés d’apprentissage (exprimés sous forme de texte libre et de cases à cocher), puis les souhaits d’évolution, les besoins en formation… « On peut customiser l’outil à l’infini, rajouter des vidéos, des tests, tout ce qui constitue un apprentissage digital performant. Mais nous nous sommes limités à 35 questions », précise le DRH.

L’entretien digitalisé dure trente minutes en moyenne, puis l’outil élabore un compte rendu détaillé et fait ressortir les points clés de l’entretien sur une matrice à 5 dimensions (“Évolution”, sur le projet professionnel futur ; “Compétences acquises” ; “Business” sur la perspective d’évolution de leur activité de consultant, “Dépendance Client” sur la fragilité des revenus ; et “Portage” sur la satisfaction par rapport à ce mode d’activité). Après l’entretien digitalisé, le salarié doit obligatoirement conclure par un bref entretien en face à face ou en visioconférence avec le RRH ou éventuellement un délégué régional. Il a accès à un entretien plus approfondi s’il le souhaite. En permanence, l’outil affecte à chaque manager le suivi de son équipe, les relance pour réaliser l’EP, l’état d’avancement et un rapport détaillé.

« L’avantage du distanciel est qu’il qualifie l’entretien verbal qui suivra, en le préparant mieux en mettant l’accent sur les sujets à aborder, analyse Éric Dumartin. Car, à l’inverse d’un entretien classique, le salarié a le temps de revenir sur les points qui l’intéressent pendant la phase digitale, et il s’exprime plus librement. Ce système fait gagner 70 % de temps à l’entreprise, il est plus pertinent pour le salarié, qui conserve tout de même un contact, et il offre une source d’exploitation et de suivi optimale pour l’entreprise. »

Selon le DRH, cet entretien digitalisé est personnalisable à l’infini, peut intégrer des liens avec tous les partenaires formation de l’entreprise, et, en termes de coût par entretien, se situe « à un niveau bien inférieur à 8 euros, et ce peut être beaucoup moins pour des volumes supérieurs ».

Bilan du déploiement à ce jour ? « On a commencé bien sûr par les CDI de plus de deux ans, mais l’objectif est de passer tous les CDI en deux vagues annuelles. Un premier test sur 100 consultants a modifié l’outil en fonction des retours, pour en faire un dispositif de pilotage en RH et en formation, capable surtout de gérer la masse d’informations collectées. Mes RRH gérant chacun 150 consultants en moyenne, ils effectueront un premier niveau de consolidation, dont le processus est en cours d’ajustement. Environ 50 % des consultants répondent sans relance. Le contexte de ces semi-indépendants est un peu particulier, car ils se sentent moins “obligés” que dans une structure classique ! »

Activité

Portage salarial.

Effectif

1 600 consultants.

Chiffre d’affaires

43,8 millions d’euros.