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Canada : Emploi des amerindiens : Le cas Enbridge

Sur le terrain | International | publié le : 15.03.2016 | Ludovic Hirtzmann

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Canada : Emploi des amerindiens : Le cas Enbridge

Crédit photo Ludovic Hirtzmann

Enbridge, le géant de l’énergie, bien que souvent critiqué pour ses mauvaises pratiques environnementales, a fait le pari de la diversité en facilitant l’embauche d’Amérindiens, population fréquemment discriminée dans l’emploi. Le choix de l’énergéticien n’est toutefois pas dénué d’arrière-pensées.

« Nous avons de longue date une pratique consistant à attirer, embaucher et développer une main-d’œuvre représentative de l’endroit géographique où nous travaillons », confie Graham White, le porte-parole d’Enbridge. Au Canada, le géant du gaz et du pétrole, qui compte 6 000 salariés et dont les exploitations sont souvent situées dans des territoires inhospitaliers du nord du pays, à proximité de réserves indiennes, a fait le choix de travailler avec les Amérindiens.

Enbridge a conçu un programme spécifique de gestion de la main-d’œuvre des Premières Nations, l’Aboriginal Employment Committee (comité d’emploi des autochtones). L’idée de cette structure est non seulement de favoriser les embauches d’Amérindiens, mais aussi de répercuter les idées et les inquiétudes de ces derniers dans l’entreprise. « Historiquement, les Amérindiens n’ont pas bénéficié des mêmes opportunités d’emploi et d’avancement que leurs concitoyens non autochtones », note Graham White.

Des bourses pour les étudiants

Pour être parfaitement efficace, Enbridge commence son action d’intégration professionnelle très tôt, dans les lycées, en offrant à la fois des bourses d’éducation et des emplois aux jeunes Indiens, « principalement pour ceux qui sont dans des réserves ». Dans une récente interview au quotidien montréalais Le Devoir, Randall Benson, ingénieur amérindien d’origine Cri exercant en Alberta, déclarait : « Dès la 10e année scolaire (classe de seconde du lycée), les enfants font des stages au sein des entreprises de l’industrie énergétique. C’est presque leur seule possibilité d’emploi une fois qu’ils seront sur le marché du travail. » Quand Enbridge recrute des Amérindiens, une formation de niveau collégial (deux années équivalentes de la terminale et d’une première année d’études supérieures) leur est dispensée s’ils n’ont pas atteint ce niveau d’éducation. La DRH d’Enbridge réalise ensuite des bilans d’emploi tous les trois ans pour s’assurer que les Amérindiens s’adaptent à leur environnement professionnel et qu’ils bénéficient bien d’avancement.

Sur 133 000 personnes travaillant dans le domaine énergétique en Alberta, on retrouve environ 17 000 membres des Premières Nations, un pourcentage bien supérieur à celui des Amérindiens dans la vie professionnelle canadienne (de l’ordre de 2 %). Selon l’institut national Statistique Canada, lorsque le taux de chômage était de 7,9 % chez les Canadiens (autochtones exclus), il était de 13,3 % parmi ces derniers.

Des questions sans réponses

Interrogé sur le nombre d’Amérindiens qui ont bénéficié des aides à l’embauche d’Enbridge, le taux de rétention et sur les différences de management par rapport aux autres Canadiens (même si les Amérindiens ne se considèrent pas comme des Canadiens), Graham White préfère ne pas répondre. Politiquement correct oblige, mais aussi parce que le sujet des Amérindiens au Canada est un tabou. La moindre déclaration jugée controversée peut amener des poursuites judiciaires de la part des groupes amérindiens.

Or travailler avec des Amérindiens exige beaucoup de tact, en raison des inimitiés historiques entre ces derniers et leurs colonisateurs. « Ils sont vaillants. Malheureusement, dès qu’ils ont accumulé un petit pécule, ils peuvent disparaître du jour au lendemain pour aller le dépenser à la ville. Le vrai souci n’est pas de faire travailler les Indiens, mais de les garder », confie cet ancien employé d’une compagnie aérienne du Grand Nord québécois, qui préfère rester anonyme. Au-delà du souci de responsabilité sociale, Enbridge, comme d’autres sociétés qui travaillent dans des milieux géographiques difficiles, par grand froid ou dans des endroits isolés, sait que les populations autochtones sont familières des lieux et n’ont pas besoin de faire d’efforts pour s’y adapter, contrairement aux Blancs.

Enbridge, qui est très critiquée pour ses pratiques peu écologiques, a aussi souvent été accusée de vouloir acheter les Amérindiens à coups de subventions pour pouvoir mener des projets énergétiques sur les réserves. Si cette critique est récurrente non seulement chez les groupes écologistes mais aussi dans certaines tribus, le groupe a le mérite d’embaucher les Amérindiens, ce qui en fait une exception dans le monde du travail au Canada.

Dans les médias

L’ACTUALITE La vie des Canadiens à 30 dollars le baril

La chute des cours du pétrole devrait constituer un manque à gagner de 1 500 dollars annuels par Canadien, si l’on en croit des propos du gouverneur de la Banque du Canada. Si d’autres économistes sont en revanche plus optimistes, l’effondrement des cours du brut a fait grimper fortement le chômage en Alberta. Mars 2016, L’Actualité, magazine d’informations générales.

Auteur

  • Ludovic Hirtzmann