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L’enquête

L’interview : Olivier Liaroutzos responsable du departement experimentations et developpement des outils et methodes (edom) de l’anact

L’enquête | L’interview | publié le : 15.03.2016 | Virginie Leblanc

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L’interview : Olivier Liaroutzos responsable du departement experimentations et developpement des outils et methodes (edom) de l’anact

Crédit photo Virginie Leblanc

« Il faut réfléchir en amont sur l’aptitude d’une organisation à intégrer toutes les différences des salariés »

Le plan santé au travail 2016-2020 et le plan cancer 2014-2019 font du sujet du maintien dans l’emploi une priorité. Comment le réseau Anact-Aract est-il appelé à intervenir ?

Le plan santé au travail donne une impulsion pour agir, en mentionnant spécifiquement dans ses priorités d’action l’élaboration de solutions permettant le maintien en emploi des salariés atteints de maladies chroniques évolutives (MCE). Il incite notamment au rapprochement entre santé publique et santé au travail, ce qui est une bonne chose pour aider les médecins du travail à se coordonner avec les médecins “de ville”. Cette articulation permet d’anticiper les situations et de prendre des dispositions adaptées, tandis que le patient-salarié et l’employeur sont, le plus souvent, pris au dépourvu. Le réseau Anact-Aract est aussi identifié par le plan cancer pour porter une expérimentation avec l’Inca (Institut national du cancer) au niveau national, dans une approche globale du maintien dans l’emploi. Cinq régions se mobilisent particulièrement. L’Aract Aquitaine, qui était déjà en avance sur ce sujet pour avoir accompagné des entreprises depuis plusieurs années, fait partie des régions pilotes. Sont également impliquées : la Basse-Normandie, le Languedoc-Roussillon, la Martinique et la Picardie. Au niveau national, un club des grandes entreprises animé par l’INCa se réunit une fois par trimestre. En échangeant sur leurs pratiques, en auditionnant des chercheurs, le principe est de montrer que le maintien en emploi des personnes atteintes d’une maladie chronique relève d’une politique d’entreprise qui peut être outillée. Ce dispositif est aussi ouvert aux trois fonctions publiques. Nous sommes clairement sur un objectif de déploiement où il s’agit de tester une méthode dans des environnements variés avant de transférer à plus grande échelle. Enfin, un partenariat avec l’Ires aboutira à la publication d’un document spécifique davantage axé sur le rôle des partenaires sociaux. Les résultats de l’ensemble de ces travaux seront mis à disposition des prochaines Assises nationales du maintien dans l’emploi.

Plus précisément, comment le réseau Anact-Aract accompagne-t-il les entreprises sur cette thématique ? Quelle est la spécificité de votre approche ?

Nous nous intéressons avant tout aux conséquences de la maladie, y compris aux effets du traitement sur le travail. Nous recherchons en quoi une situation de travail devient incompatible, ou pas, avec l’état – physique et psychique – de la personne. Au regard de cette analyse, des changements d’horaires, un aménagement des postes de travail, une mobilité… peuvent être nécessaires. Cet éclairage porte sur les ressources de l’organisation du travail. Les leviers d’action sont mis en perspective avec les salariés de l’équipe – ou un échantillon – et en impliquant les managers de proximité. À souligner que cette démarche participative est d’autant plus intéressante que l’ensemble des salariés peut bénéficier des dispositions prises. Elle permet également aux collègues de sortir d’un registre strictement compassionnel, qui montre vite ses limites.

Pour faire connaître cette approche, nous diffusons des supports auprès des entreprises, organisons avec elles et les institutions concernées des manifestations et, bien sûr, nous proposons une offre d’accompagnement. Les entreprises peuvent soit s’inscrire dans une action collective, soit dans un accompagnement individuel.

Avant d’en arriver là, encore faut-il que le salarié malade chronique se dévoile…

En effet, pour agir en amont sur le sujet, cela implique que les personnes ayant des problèmes durables de santé le signalent. Certaines le font, d’autres pas ou tardivement. C’est pourquoi les services de médecine du travail sont impliqués dans les comités régionaux que nous organisons, avec également les acteurs de la réinsertion, comme l’Agefiph. Les DRH ont intérêt à mieux anticiper ces situations. Nous incitons donc les entreprises à recenser les personnes atteintes et, parallèlement, à analyser leur bilan social ainsi que leur pyramide des âges. C’est aussi un moyen d’estimer, selon les métiers et les situations de travail, les formes de pénibilité auxquelles risquent d’être particulièrement exposées les personnes atteintes de maladies chroniques. Et plutôt que d’envisager, faute de solutions, l’inaptitude de ces personnes, nous sommes convaincus qu’il faut inverser la posture. C’est-à-dire réfléchir le plus en amont possible à l’aptitude d’une organisation à intégrer toutes les différences des salariés.

Auteur

  • Virginie Leblanc