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Sur le terrain

Retour sur… Le programme de prévention des accidents d’Alstom à Ornans

Sur le terrain | publié le : 08.03.2016 | Mathieu Noyer

À la fin 2012, après avoir lancé son programme de prévention sécurité, l’usine de moteurs du groupe Alstom dans le Doubs a réduit son accidentologie à néant par paliers successifs. Deux éléments ont été décisifs : l’élargissement des actions à l’ensemble du personnel puis la création de l’“école” environnement-hygiène-sécurité (EHS).

“Rupture EHS” justifie bien son nom. Lorsqu’elle a lancé ce programme d’environnement, d’hygiène, mais surtout de sécurité au travail, en décembre 2012, l’usine Alstom d’Ornans (Doubs) s’était fixé l’objectif de casser les verrous qui empêchaient ses statistiques d’accidents de s’améliorer. Non pas qu’elles fussent catastrophiques : avec son taux de fréquence (IFR1) proche de 10, le site de moteurs pour trains, métros et tramways faisait déjà bien mieux que la moyenne de la métallurgie. Mais l’indicateur s’était dégradé courant 2012 : « Le site a alors décidé d’engager son propre programme, en plus de l’application de ceux du groupe, parmi lesquels le plan “zéro déviation” par rapport aux directives de sécurité pour les activités correspondant aux risques les plus élevés », indique l’actuel directeur Romuald Gicquel. Les risques les plus graves sont les risques électriques et les opérations de levage par exemple.

Aujourd’hui, le patron de l’usine de 340 salariés a tout lieu de lire les tableaux avec le sourire : le taux de fréquence est tombé à zéro depuis l’automne dernier et s’y maintient. La diminution est intervenue en deux étapes. L’IFR1 est d’abord descendu à 4 entre le début 2013 et le début 2014, grâce à une série d’actions centrées sur tous les managers. Chacun d’eux a reçu la consigne d’effectuer des tournées sécurité quotidiennes en ateliers, muni de sa “check-list de gestion des changements”. Le but était d’abord de clarifier les rôles et responsabilités de chacun, et de former les managers à mieux traduire les écarts entre les objectifs et la réalité. Cette première phase a débouché sur 500 actions de prévention et 400 000 euros d’investissements, par exemple dans un système d’aspiration des poussières au poste de travail.

Toutefois, le taux de fréquence s’était remis à monter à la mi-2014 pour redevenir proche de 6. « Pour franchir un nouveau palier, il est apparu qu’il fallait passer au stade supérieur, celui de l’implication de tous les collaborateurs », souligne Émilie Noël, responsable EHS.

Programme zéro accident

L’usine s’est alors engagée dans le programme “zéro accident”. Il a été préparé par un groupe de travail constitué de représentants de la production, de la qualité, du CHSCT et des services administratifs afin de bien associer le personnel des bureaux et de profiter de son regard plus neuf sur le sujet de la sécurité. Les membres de ce groupe de travail sont allés interroger les salariés pour déterminer les thèmes prioritaires. « On a vu clairement qu’il y avait un problème de bonne utilisation des EPI [équipements de protection individuelle] et, plus généralement, cela a mieux impliqué les gens. Avant, ils avaient l’impression que ces questions de sécurité passaient au-dessus d’eux », relate Max Régnier, opérateur au bobinage, représentant de la production dans le groupe. « L’initiative a été d’autant mieux ressentie qu’elle ne se focalise pas seulement sur ce qui va moins bien. En questionnant les salariés, le groupe de travail a aussi insisté sur les attitudes déjà positives », ajoute Jonathan Bolle, responsable de la qualité industrielle.

Le programme “zéro accident” comprend des formations-actions d’une demi-journée au maximum sur des problèmes donnés de port d’EPI, de bruit, d’ergonomie au poste, etc. Il inclut un plan d’action spécifique sur la protection des mains et sur les risques de manutention mécanique, qui constituent les deux principales sources d’accidentologie à Ornans. Mais son “joyau” est incontestablement l’École EHS. Cet espace a été aménagé courant 2015 dans une partie des locaux de l’école interne des métiers. Il présente les enjeux de prévention sécurité de façon ludique, mais avec un contenu parfaitement sérieux, adapté aux caractéristiques du site. Ainsi, une place importante est laissée au présentoir qui rappelle le bon type de gant à enfiler au bon moment : anticoupure, antichaleur, antisalissures, etc.

Pour sensibiliser aux risques liés aux manutentions mécaniques, le salarié est, par exemple, invité à répondre par oui ou par non si tel anneau de levage est bien conforme aux règles de sécurité. Ce type de “devinette” est aussi proposé pour les outils manuels courants, source potentielle de TMS. Un autre panneau propose de trouver les 20 situations à risque d’un atelier. Il est complété, de façon plus classique, par des photos et des vidéos de situations dangereuses (mélange de déchets, croisement entre piéton et chariot élévateur, mauvais rangement à l’origine de chute ou de blessure…). Un panneau voisin propose le même exercice pour les bureaux. La reproduction en réel d’un poste de travail permet d’ailleurs aux personnels administratifs de vérifier si leur position spontanée est ergonomique ou pas.

Depuis la mise en place de l’école EHS, le taux de fréquence d’Alstom Ornans est tombé d’abord à 2, puis à zéro. Ce n’est probablement pas un simple hasard : « Il y a de vraies améliorations et les idées des salariés ont été prises en compte. Mais le sujet de la santé-sécurité reste un chantier permanent. Aujourd’hui, nous abordons le thème des risques psychosociaux », relève Didier Marguier, secrétaire du CHSCT.

Auteur

  • Mathieu Noyer