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Formation : la reforme, accélérateur de l’e-learning

L’enquête | publié le : 08.03.2016 | Laurent Gérard

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Formation : la reforme, accélérateur de l’e-learning

Crédit photo Laurent Gérard

La réforme de la formation professionnelle, en accentuant la pression sur les coûts et les attentes, entraîne une forte augmentation des intentions de recours à l’e-learning de la part des entreprises.

L’e-learning poursuit son implantation dans les entreprises françaises. Lentement, mais sûrement. Et plusieurs signes en attestent. D’abord, selon le bilan formulé par Sally Ann More, organisatrice du dernier i-Learning Forum à Paris, en janvier, la fréquentation de ce salon a été nettement à la hausse, en nombre de prestataires présents (15 stands de plus que l’année précédente), comme en nombre de visiteurs inscrits (+ 18 %). On peut penser que les constats seront les mêmes lors du salon Solutions ressources humaines et E-learning expo, qui se déroulera du 22 au 24 mars à Paris. Après une ou deux années un peu en retrait, l’intérêt pour l’e-learning se manifeste à nouveau à l’occasion de ce type de salon.

Ensuite, on ne peut que constater la force de l’argument contenu dans la réforme de la formation professionnelle en cours : en diminuant les capacités de financement par la disparition de l’obligation légale fiscale de 0,9 % pour le plan de formation, la réforme accélère nettement le recours aux formations digitales, car moins d’argent et au moins autant d’attentes pédagogiques débouchent quasi mécaniquement sur une augmentation des intentions d’e-learning.

Selon le dernier baromètre des professionnels du secteur, celui de l’Association française des industriels numériques de l’éducation et de la formation (Afinef), plus de la moitié des entreprises de plus de 1 000 salariés affirment que la réforme les pousse à recourir davantage aux outils numériques de formation.

Ce résultat n’est pas surprenant, nombre d’observateurs l’ont pressenti depuis deux ans. Ce qui l’est en revanche, c’est le niveau d’impact prévu par ces grandes entreprises : 30 % d’entre elles pensent que l’e-learning représentera, à l’horizon 2020, entre la moitié (51 %) et la totalité de leur effort de formation ! 100 % dans certains cas ? C’est énorme.

Même si la prévision ne se réalisait qu’à un niveau de 75 % de l’ensemble de l’effort de formation de ce tiers d’entreprises, ce serait déjà une véritable révolution, tant on sait combien pèse aujourd’hui encore le présentiel dans les modalités pédagogiques utilisées par les entreprises, et combien il reste la modalité préférée des salariés français.

Projet global

L’e-learning, et toute la vague digitale, porte des changements profonds, comme en témoignent les entreprises qui s’expriment dans ce dossier. C’est ainsi que Dominique Porcheron, DRH du groupe La Boucherie, espère que tous ses encadrants et chefs de cuisine seront passés « d’ici à trois mois » par les modules d’e-learning mis à leur disposition. L’usage de l’e-learning « est un projet d’entreprise plus encore que de formation », confirme Luc Valentin, DRH de Nocibé. Un argument partagé par Aïda Scanzi, responsable programmes RH Groupe Ingénico : elle affirme que former les managers en recourant à l’e-learning est un choix lié à « un projet global de digitalisation ». Véronique Bonnard, responsable formation monde de Bioderma, témoigne également de l’enjeu : en mettant au point une plate-forme accessible par près de 20 000 utilisateurs, elle compte « véhiculer massivement des messages homogènes d’un pays à l’autre, aussi bien pour les salariés que pour des représentants médicaux et des vendeurs en pharmacie ».

Maturité digitale

Devant l’importance des enjeux, la majorité des entreprises (60 %) s’alarme de l’insuffisante maturité digitale de leurs collaborateurs, mais aussi des RH, des hiérarchies intermédiaires et du top management (lire Entreprise & Carrières n° 1278), selon l’étude réalisée par Comundi auprès de 168 entreprises. Alors même que, dans 60 % des cas, « un processus de transformation digitale » est bel et bien engagé dans l’entreprise. Les répondants en concluent que la formation des collaborateurs ressort nettement en tête (67 %) des pistes à privilégier pour assurer cette montée en compétences digitales, devant l’appel à des prestations externalisées (45 %). Et que la formation est le service sur lequel la direction souhaite investir en priorité (30 %), juste derrière le marketing (33 %), mais devant le commercial-vente (28 %).

Reste un point très sensible à surveiller dans les temps qui viennent : si l’e-learning s’affirme, est-ce que ses indicateurs de succès ou d’échec s’affineront ? Le prestataire Crossknowledge et le cabinet Féfaur, auteurs d’une étude parue récemment, ont tendance à le penser, constatant que, dans les entreprises les plus avancées, le taux de complétion de l’e-learning (le fait de consommer 100 % du programme) devient un critère secondaire d’appréciation. Plus parlant et plus fin est le gain de savoir ou de compétence mesuré sur ce qui a été consommé, même si cela est minime. Une observation qui témoigne d’une attente plus lucide et moins fantasmée à l’égard de l’e-learning.

Auteur

  • Laurent Gérard