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L’enquête

CPF, suivi, évaluation : Les responsables de formation attendent beaucoup des prestataires

L’enquête | publié le : 27.10.2015 | L. G.

Dans le cadre de la réforme de 2014, les attentes des entreprises vis-à-vis des prestataires sont nombreuses et très fortes.

Qu’attendez-vous des organismes de formation aujourd’hui ? Avez-vous le sentiment qu’ils sont en mesure de vous le donner ? Ces deux questions ont été posées par Entreprise & Carrières à des membres du Groupement des animateurs et responsables de la formation (Garf). Les réponses sont unanimes.

Géraldine Deschins, Olivier Facon et Isabelle Tessier, tous trois responsables de formation à Sodexo, attendent « des méthodes pédagogiques innovantes et adaptées aux différents profils de participants », du « conseil sur la mise en place d’une fiche d’évaluation pertinente de fin de formation, et une technique pour analyser le retour sur investissement des formations », c’est-à-dire « des retours en amélioration continue à la suite des actions menées ». Autres demandes : la prise en compte des contraintes des participants, des tarifs décents, du multimodal, une capacité à gérer des volumétries importantes sur le territoire national avec une qualité homogène et une gestion centralisée…

« Modularisation, certification et hors temps de travail », résume la responsable formation de la CAF de Gironde, Cécile Gouspy. « Politique de l’offre, politique des prix, de promotion et de distribution de la formation : les organismes doivent revoir leur business model et leur politique marketing dans un court délai et avec des perspectives incertaines ! », affirme Christophe Pons, directeur de la formation à Onet.

Trois points particuliers ressortent : le CPF, le suivi et l’évaluation. Sur le CPF, les responsables formation attendent que les prestataires leur proposent « autant que faire se peut, et selon les domaines, des actions éligibles », « des formations « CPFiables » au niveau national et de la branche professionnelle ». Mais certains reconnaissent que « c’est sans doute le plus compliqué ».

L’attente en termes de suivi est également importante. Pascal Billaudel, responsable du développement des RH chez Diehl Metering, désirerait « un accompagnement en amont pour définir les objectifs à atteindre en termes de compétences ; la définition d’un plan d’action pendant la formation et les moyens à mettre en œuvre ; et enfin, en aval, un accompagnement de l’entreprise et du manager concerné pour transformer les connaissances acquises en compétences à l’issue d’une session de formation. Pour les deux dernières phases, les organismes de formation ne sont pas, pour l’instant, en mesure de nous l’apporter, car il s’agit d’un changement profond de conception de leur métier ». Cette analyse est confirmée par Béatrice Quertain, responsable du service formation de l’entreprise KSB : « Cela manque encore d’accompagnement et de personnalisation des besoins, d’évaluation et de suivi, de sérieux dans les sessions maintenues, de conseil sur la réforme et la législation et de prise en compte des appréciations des apprenants. »

Enfin, l’évaluation des formations fait l’objet d’une très forte et très récurrente attente. Vincent Molinari, responsable recrutement et développement des compétences de la Fondation de France, souhaite que « les organismes de formation intègrent systématiquement à leur offre de services une prestation en termes d’évaluation de la formation ne concernant pas seulement le niveau 1 – l’évaluation de la satisfaction – ou le niveau 2 – les apprentissages –, mais bel et bien le niveau 3, donc les transferts ou les comportements ». Trois pistes sont envisagées pour y parvenir : investir davantage en amont, industrialiser ce dispositif en coordonnant les organismes, et faire des Opca les pilotes du sujet.

Mise en œuvre des compétences

Thierry Mariette, responsable formation de Gefco France, confirme le souhait « d’une évaluation des compétences, voire des connaissances acquises durant la formation et transférées en situation réelle de travail, et une association du manager du “formé” à la mise en œuvre des compétences acquises ». C’est également la « principale attente aujourd’hui » d’Elsa Delamorinière-Larrazet, responsable formation chez Logirem.

Et la responsabilité de l’entreprise dans cette évaluation ? Ne serait-elle pas oubliée ? « La plus grande part de responsabilité est à attribuer à l’entreprise, reconnaît Béatrice Quertain. Pour autant, l’organisme de formation doit avoir ses propres outils d’évaluation et accompagner son client dans l’atteinte des objectifs, idéalement par un suivi prolongé. » Vincent Molinari reconnaît que « cela nécessite de mettre en place des indicateurs. C’est un travail que j’ai engagé récemment ! »

« La mise en concurrence est plus facile »

« Les organismes de formation ne vont pas bien ; les moins sérieux d’entre eux ne tiendront pas l’année, témoigne François Mazoyer, RRH d’une entreprise industrielle de 200 salariés à Grenoble. Ils ont connu un gros coup de frein sur les formations autres qu’obligatoires ou réglementaires, et ils constatent que les budgets du plan de formation sont, au mieux, équivalents à ceux de l’année passée. Je n’ai jamais eu autant de facilité pour négocier les formations managériales. Les journées d’ingénierie, payées il y a cinq ans au même tarif que les journées de formation, ne sont tout simplement plus facturées. Je fais jouer plus facilement la concurrence en bureautique et en langues. Même ceux qui ne négociaient jamais leurs prix, notamment les organismes de branche, consentent aujourd’hui des remises. La fin de l’obligation de cotiser associée aux exigences de certifier les formations accomplies dans le cadre du CPF a perturbé le jeu des opérateurs. De plus, les entreprises ont pris de nouvelles habitudes avec le développement des prestations de gestion externalisée du plan de formation : beaucoup se sont mises à tirer sur les prix. » Propos recueillis par Laurent Poillot

« L’offre de formation est arrivée à maturité »

« Spontanément, ce que j’attends d’un organisme de formation ?, demande Bettina Rosconval, responsable développement RH, au groupe Crédit Agricole Assurances. Du professionnalisme, du sérieux et de la qualité ; de bons profils pédagogiques des formateurs ; une relation de proximité et de partenariat ; de l’innovation et de l’anticipation sur des nouveaux concepts ; de l’originalité dans leurs approches pédagogiques ; de la flexibilité ; et de l’écoute et de l’intelligence relationnelle. » Mais est-ce vraiment différent avant et après la réforme ? « Non. Avant, on avait parfois déjà du mal à obtenir ce type de réponse ou d’attitude ; après, c’est pareil ! En fait, je ne sens aucune différence depuis la réforme dans les pratiques des prestataires. Les bons, qu’ils soient petits, moyens ou gros, ont survécu à la crise de 2008 et après. Les “pas bons”, quelle que soit leur taille également, ont disparu. Ils savent que nous sommes de plus en plus exigeants et, de ce fait, font davantage attention à la qualité de leurs contenus, de leurs programmes. Ce n’est pas tant la réforme que nos besoins qui deviennent de plus en plus pointus, et qui ne laissent pas de place à l’amateurisme. Parfois, les organismes de formation ne me semblent pas concernés par la réforme en cours. En fait, ils sont attentistes, car nous, les entreprises, n’avons rien demandé de différent ! Les gros prestataires s’informent et certains se sont adaptés en proposant des offres intéressantes, mais ils sont rares. Les petits continuent leurs business sur mesure : on en a besoin. Au final, nous sommes plutôt affairés à l’optimisation avec nos Opca, et moins centrés sur l’offre, qui est arrivée à maturité. » Propos recueillis par L. G.

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  • L. G.