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Pays-Bas : protection sociale : Retraites : une périlleuse réforme en perspective

Sur le terrain | International | publié le : 20.10.2015 | Didier Burg

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Pays-Bas : protection sociale : Retraites : une périlleuse réforme en perspective

Crédit photo Didier Burg

Après le recul de l’âge de la retraite, c’est le principe de solidarité entre générations qui est remis en cause dans la réforme en cours. Les annonces de l’été inquiètent les syndicats.

Les Pays-Bas poursuivent à marche forcée la refonte de leur système de retraite. Après l’âge de la cessation d’activité – il passera à 67 ans en 2021 –, le principe de solidarité entre générations pour se constituer une retraite est aujourd’hui remis en question. Annoncé dans les grandes lignes cet été par le gouvernement, le projet concerne le financement du “deuxième pilier”, qui repose sur un régime par capitalisation. La gestion du système est confiée à des fonds de pension sectoriels ou internes aux entreprises auprès desquels cotisent obligatoirement les salariés.

Cotisations égales

Jusqu’ici, l’ensemble des salariés affiliés à un même fonds de pension doivent cotiser dans une proportion strictement identique à leur organisme de retraite. Le calcul de la constitution de la retraite est aussi le même pour tous. « L’obligation de cotiser, qui ne fait pas de différence entre hommes et femmes, gens bien portants ou malades, salariés jeunes ou seniors, présente tous les éléments de la solidarité nécessaire au deuxième pilier », argumente Chris Driessen, conseiller auprès de la FNV, confédération syndicale de salariés.

Reste que, pour le gouvernement, ces spécificités entretiennent une situation biaisée : « Ce système est injuste, car les cotisations versées par les jeunes salariés, et immobilisées plus longtemps, rapportent davantage au fonds de pension que celles de seniors bloquées sur un plus court terme », a justifié Jetta Klijnsma, secrétaire d’État aux Affaires sociales, lors de la présentation de sa réforme. En clair, les jeunes cotiseraient trop et les seniors pas assez.

Après avoir fonctionné pendant des décennies, le système actuel montre ses limites. « La question ne se posait pas tant que le jeune salarié devenait lui-même un senior dans l’entreprise. Mais aujourd’hui, les gens ne travaillent plus à plein temps pour le même employeur toute leur vie. Certains deviennent indépendants. D’autres adoptent le temps partiel. Et il y a aussi ceux qui souhaitent partir en préretraite. À l’heure actuelle, le système ne prend pas en compte cette diversité des affiliés au sein des fonds de pension », constate Theo Nijman, professeur d’économétrie à l’université de Tilburg.

Du côté des partenaires sociaux, le patronat estime que, face aux nouvelles données démographiques, le dispositif a vécu. « Alors que quatre ou cinq actifs finançaient un retraité jus qu’à la première partie du 20e siècle, il n’y en a plus que trois aujourd’hui et seulement deux dans quelques années », prévoit Ap Fraterman, expert de ces questions auprès de la VNO-NCW, confédération des grandes entreprises et de PME.

Montant colossal

L’abandon du principe de solidarité n’est pas sans risque. Premier écueil, le coût de compensation nécessaire pour ces seniors qui n’ont pas assez cotisé. Un montant colossal, estimé entre 30 milliards et 100 milliards d’euros avant que le système ne soit complètement remis à plat.

Fonds de pension

Une autre piste : la remise en cause de la sacro-sainte obligation d’adhérer à un fonds de pension d’entreprise ou de branche. Elle ne fait pas l’unanimité, étant donné le risque de déséquilibrer l’ensemble du deuxième pilier. « Le régime de retraite complémentaire est une pièce fondamentale du système de protection sociale aux Pays-Bas. Les trois quarts des salariés et 90 % des employeurs cotisent à un fonds de pension, soit 30 milliards d’euros versés chaque année dans les caisses de ces institutions. L’équivalent de quarante ans de cotisations permet, lors du départ à la retraite, de toucher 70 % du salaire », détaille Chris Driessen. Les divergences de vue flagrantes entre les partenaires sociaux vont pourtant devoir s’aplanir. La secrétaire d’État aux Affaires sociales a fixé une date butoir à octobre 2016 pour recevoir leurs propositions concrètes harmonisées sur cette réforme.

En l’état, le gouvernement ne serait pas partisan de moduler les cotisations en fonction de l’âge. Mais les droits capitalisés pour la constitution de la retraite le seraient, diminuant avec l’âge. En parallèle, des mesures permettraient aux salariés de personnaliser leur future retraite en fonction de leurs objectifs. Le Danemark et la Suisse connaissent déjà des régimes de ce type.

Dans les médias

Pensioen Pro. Les retraités les mieux nantis au monde

Après avoir passé au crible les régimes de retraite de 49 pays, une étude de l’assureur allemand Allianz conclut que les Pays-Bas disposent du meilleur système au monde, suivis par le Danemark et la Norvège. La France occupe le 20e rang. Au sein de la zone euro, seuls la Belgique et le Luxembourg réalisent un score inférieur à la France. Exhaustive, l’étude ne se fonde pas seulement sur les performances du premier, du deuxième et du troisième piliers. Elle prend aussi en considération l’étendue des couvertures du système de santé et les dispositions transitoires mises en place entre les dernières années de vie professionnelle et la cessation effective d’activité. Selon une étude précédente d’Allianz comparant le premier pilier, l’Australie arrivait en tête et les Pays-Bas en cinquième position. Octobre-novembre 2015. Pensioen Pro, revue bimestrielle spécialisée dans les retraites.

Auteur

  • Didier Burg