Le formatage de l’humain
Dans le système néolibéral, l’individu est tout, le collectif compte de moins en moins. L’idéologie méritocratique aime à caresser le mythe du self-made-man, auteur de ses réussites comme de ses échecs, et qui doit donc logiquement être récompensé pour les unes et payer pour les autres. Sous la direction d’un psychosociologue, une équipe pluridisciplinaire en sciences humaines et sociales s’inspire de la pensée de Cornelius Castoriadis et d’Herbert Marcuse pour remettre en cause cet individu supposé souverain, qui devrait presque tout à lui-même et si peu aux autres. Les contributeurs expliquent comment le capitalisme détermine non seulement les conditions de la vie matérielle des individus mais formate aussi les esprits pour produire des êtres calibrés selon ses standards : opportunistes, décidés à gérer leur vie comme une entreprise, à s’embarrasser le moins possible des autres et de scrupules, et à investir une bonne part de leur désir dans la consommation. Le système tend à favoriser l’émergence de personnalités narcissiques et prédatrices. La position critique, qui consiste à démonter les mécanismes de la domination psychique, a, selon les auteurs, pour vocation de s’en affranchir.