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Quelles solutions pour évaluer la charge de travail ?

LA SEMAINE | publié le : 22.09.2015 | Catherine Sanson-Stern

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Quelles solutions pour évaluer la charge de travail ?

Crédit photo Catherine Sanson-Stern

Comment mesurer la charge de travail des cadres dans un contexte de diffusion massive des outils numériques ? C’est l’une des questions majeures soulevées dans le rapport de Bruno Mettling “Transformation numérique et vie au travail” remis au gouvernement le 15 septembre. Détail des pratiques déjà existantes. Et des pistes qui seront débattues lors de la Conférence sociale.

C’est l’un des messages clés du rapport Mettling* “Transformation numérique et vie au travail” : il y a urgence à établir un diagnostic commun face à la rapidité de la diffusion du numérique dans les entreprises et à mettre en œuvre des mesures au niveau national, des branches et des entreprises. Parmi ses 36 préconisations, le rapport recommande l’adaptation rapide du droit français pour sécuriser le forfait-jours pour les travailleurs du numérique concernant les temps de repos. Il complète le droit à la déconnexion par un devoir de déconnexion (lire ci-contre). Le rapport du DRH d’Orange insiste sur la mise en place d’une politique de régulation de l’usage des outils numériques conformément à l’ANI de juin 2013 sur la qualité de vie au travail.

Mesure de l’expérience.

« La durée du travail n’est plus aujourd’hui un outil suffisant pour appréhender la contribution de tous les salariés, notamment pour l’économie de la connaissance. Elle peut être utilement complétée par l’évaluation de la charge de travail, des résultats attendus et des moyens associés », précise encore le rapport. Il conseille « d’intégrer par le dialogue social une mesure de la charge de travail plus adaptée que celle du temps de travail », en faisant « un préalable indispensable pour pouvoir étendre les cas d’usage du forfait-jours de façon raisonnable ». Et d’inviter à expérimenter les outils de mesure qui existent déjà.

L’Observatoire opérationnel de la charge de travail œuvre concrètement sur la question depuis un an avec une vingtaine de DRH de grands groupes. Il devrait publier un livre blanc d’ici à la fin d’année. « Pour les cadres, chefs de projet, métiers intellectuels, la mesure de l’expérience peut remplacer celle de la charge, explique Juliette Soria, qui travaille au sein de l’observatoire pour le cabinet Silamir. Plutôt qu’un outil complexe de chronométrage, nous adaptons aux salariés un outil simple développé pour mesurer la satisfaction client : le NPS (Net Promoter Score). Nous combinons cette mesure globale de l’expérience – hors situation de réorganisation – avec une mesure des “irritants” facilement objectivables et sur lesquels on peut travailler, avec un impact très fort en termes de transformation et de productivité. »

Autre initiative : une mesure de la charge mentale menée depuis un an par le cabinet Secafi et le CNRS auprès d’une population de cadres et d’ingénieurs de l’aéronautique, via un questionnaire. « La perméabilité très forte entre vie au travail et hors travail générée par la pratique du numérique, auparavant limitée aux cadres de haut niveau, se généralise aux niveaux inférieurs », constate Laurent Maunier, chargé de mission à Secafi. Il souligne la difficulté d’appréhender la charge mentale avec des outils qui nécessitent un apprentissage : « En prenant de l’âge, l’effort intellectuel est plus important. Et la charge mentale augmente. »

Prégnance cognitive.

Pour Jean-Claude Delgènes, du cabinet Technologia, il y a urgence à légiférer pour préserver la santé des cadres, dont 50 % travaillent régulièrement chez eux le soir. « Les moyens modernes de communication font que le travail envahit les autres sphères, avec une prégnance cognitive si forte que les gens ne décrochent plus », insiste-t-il. 12,6 % de la population seraient exposés au risque de burn-out, selon une étude de 2014. « Le travail n’est plus confiné dans un espace géographique, il faut donc trouver une autre façon de le réguler. La loi doit sanctuariser des plages de repos obligatoires et ne pas laisser les individus seuls face à ça. »

La question des conséquences du numérique sur l’organisation du travail est inscrite au programme de la conférence sociale du 19 octobre. Elle pourrait faire l’objet de réformes du droit du travail qui seraient présentées dès 2016.

Au sein d’Orange, une négociation sur une méthode d’évaluation et d’adaptation de la charge de travail a débuté en juillet. « C’est une des priorités de santé au travail du groupe, dans un contexte de baisse globale des effectifs », souligne la direction, qui précise vouloir « saisir l’occasion de cette négociation pour faire évoluer les pratiques de management, pour moins de contrôle, mais plus de dialogue sur le travail ».

* Piloté par le DRH d’Orange Bruno Mettling, le groupe de travail a rassemblé cinq responsables syndicaux et patronaux ainsi que des personnalités qualifiées.

Auteur

  • Catherine Sanson-Stern