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Sur le terrain

RETOUR SUR… La démarche de validation des acquis de l’expérience chez Cars Berthelet

Sur le terrain | Pratiques | publié le : 01.09.2015 | Laurent Poillot

FIN 2014, l’autocariste a recouru à la validation des acquis de l’expérience (VAE) afin de soutenir l’employabilité de ses chauffeurs, pour qui le titre professionnel vaut plus que les seules formations obligatoires.

Pour conduire un car de voyageurs, il ne suffit plus d’être titulaire du permis D et d’une Fimo (Formation initiale minimale obligatoire) voyageurs. De plus en plus d’employeurs privilégient le titre de “conducteur du transport routier interurbain de voyageurs” délivré par le ministère de l’Emploi, qu’ils estiment plus reconnu, car réputé équivalent à un CAP.

À Crémieu, dans l’Isère, 75 % des conducteurs embauchés par Cars Berthelet, une PME de 247 ETP (équivalents temps plein), ont réussi un parcours de 420 heures, accompli dans le cadre d’un contrat de professionnalisation ou d’une formation prise en charge par Pôle emploi.

Ce titre favorisant mieux l’employabilité que le couple permis-Fimo, la direction réfléchissait depuis 2012 au moyen de le rendre accessible afin d’empêcher un écart de qualification à poste équivalent, tout en évitant de voir les conducteurs sans diplôme partir trois mois entiers en centre de formation.

L’idée d’une VAE collective remonte à cette époque. « Nous avons régulièrement communiqué sur ce sujet par voie d’affiches, que nous avons réalisées dans ce but, et dans notre revue trimestrielle interne », raconte Line Perrot, la responsable de formation de l’entreprise.

HUIT PARCOURS VALIDÉS

Depuis, huit conducteurs (dont une femme) ont réussi le parcours que l’entreprise a lancé en octobre 2014 et conclu en janvier 2015. Ils avaient cinq ans d’ancienneté dans l’entreprise en moyenne. Leur accompagnement a été confié à l’organisme certificateur Aftral (ex-AFT-Iftim), qui a mobilisé un formateur à hauteur de 20 heures pour préparer les candidats, lors de deux regroupements dans l’entreprise (l’un pour les faire travailler sur leur récit professionnel, l’autre pour les habituer au jury d’examen), entrecoupés d’entretiens téléphoniques ou d’e-mails pour élaborer leur livret de VAE.

Élodie Labrune, directrice adjointe du centre Aftral, n’attendait pas de l’accompagnateur qu’il se montre formaliste vis-à-vis de la rédaction des rapports proposés par les salariés : « L’objectif était de faire ressortir l’expérience, pour que les professionnels du jury puissent retrouver la quintessence du métier. Les fautes d’orthographe et de syntaxe n’ont pas été jugées. »

Pendant la même période, deux formations complémentaires de deux jours ont été dispensées : l’une de sauveteur-secouriste du travail, l’autre de prise en charge du handicap. L’entreprise a organisé ces interventions sur le temps de travail des conducteurs. « Nous nous sommes accordés avec le service d’exploitation pour remplacer les candidats par des personnels sédentaires auxquels nous faisons appel – formateurs, mécaniciens, carrossiers ou gestionnaires de planning – pour compenser les absences occasionnelles », explique Line Perrot.

La responsable de formation tire son chapeau à l’Opca Transports pour avoir monté le dossier de financement et préparé la négociation avec l’État afin de capter un financement. Line Perrot dit que ce « travail d’équipe » a limité le reste à charge pour l’entreprise au tiers de la dépense totale, qui se monte à 18 000 euros, grâce à l’utilisation des heures de DIF et à une Adec (Action de développement de l’emploi et des compétences) négociée avec l’État. Le tiers restant à charge pour Cars Berthelet a servi à payer une partie des coûts salariaux et des formations, qui n’avaient pu être financées par l’Opca en totalité. Dans le même temps, l’entreprise a obtenu qu’Aftral concède une remise sur les coûts de formation. L’organisme a par ailleurs proposé de caler son planning d’intervention sur les disponibilités des candidats, entre 9 heures et 16 heures. Élodie Labrune retient que l’effet de groupe joue sur l’appétence à la VAE : « Lorsque nous avons répondu à l’invitation de l’entreprise au cours d’une journée d’information à ses salariés, en juillet 2014, seulement trois ou quatre personnes étaient intéressées. Elles ont été beaucoup plus nombreuses à s’engager en fin de compte. On peut penser que certaines d’entre elles ne l’auraient pas fait si elles avaient dû y aller seules. »

Selon Line Perrot, chacun a été averti que la VAE ne garantirait pas, à court terme, une progression de salaire ni de responsabilités. Dès lors, qu’est-ce qui a motivé les salariés ? « Se sentir au même niveau que les autres conducteurs munis d’un titre professionnel, répond-elle. Nous avons tenu les résultats secrets jusqu’au dernier moment et organisé une remise de diplômes, en présence de la direction et des managers d’exploitation. Rien n’a changé pour eux depuis, sinon qu’ils se sentent tous considérés par l’entreprise. »

Autre conséquence : elle a observé que « certains salariés ont repris confiance en eux ». L’un d’eux lui aurait suggéré, à l’issue du parcours, d’utiliser son CPF pour se donner les moyens d’évoluer dans le transport touristique, par des formations complémentaires servant, par exemple, à définir un itinéraire, réserver des logements pour un groupe et prendre la parole à bord d’un car.

Auteur

  • Laurent Poillot