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Sur le terrain

RETOUR SUR… L’évaluation de la formation chez L’Oréal

Sur le terrain | publié le : 07.07.2015 | Nicolas Lagrange

Après trois ans de tests, le leader mondial des cosmétiques généralise, en 2015, l’évaluation des formations dans l’ensemble de ses 60 filiales avec l’outil forMetris.

« Ne pas se limiter à la mesure de la satisfaction des stagiaires, pouvoir démontrer l’impact des formations »… C’est l’objectif affiché par L’Oréal en 2012, résumé par Laurent Reich, directeur de la pédagogie et des solutions formations du groupe. Le Français forMetris est choisi pour administrer l’évaluation des formations, livrer des éléments d’analyse et de comparaison avec d’autres entreprises de son panel, après un appel d’offres auprès de prestataires français et anglo-saxons.

« Jusque-là, les salariés en formation étaient interrogés à la fin sur leur degré de satisfaction, et nous compilions les résultats sans pousser plus loin l’analyse et sans élément de comparaisons », relate Laurent Reich. Désormais, les salariés sont interrogés à chaud par e-mail, hors la présence du formateur, un ou deux jours après la session et répondent depuis leur ordinateur ou un poste partagé. Objectifs : « Savoir à quel point la formation a répondu à leurs attentes, au plan de l’organisation, des supports, du contenu, de l’animation…, explique Laurent Balagué, directeur général de forMetris. Mais aussi appréhender l’utilisation qu’ils espèrent faire de leurs apprentissages et l’impact potentiel qu’ils imaginent sur leur travail. » À ce stade, les n + 1 ne sont pas questionnés, ils ne le sont qu’à froid, en même temps que les salariés.

Un taux de réponses élevé

Deux à quatre mois plus tard, salariés et managers reçoivent un questionnaire par e-mail rappelant les objectifs pédagogiques, pour apprécier la mise en pratique des compétences acquises, via des notes sur 100 et des verbatim. « Des relances automatisées et par téléphone permettent d’obtenir un taux de réponses élevé, assure Laurent Balagué. Pour mesurer l’impact de la formation, le questionnaire à froid reprend notamment les réponses et le plan d’action définis à chaud par le salarié. »

En 2012, un test a lieu sur une trentaine de sessions pilotées par le groupe et la zone Europe, dont un programme stratégique en marketing. Bilan ? « Très encourageant, affirme Laurent Reich. 80 % des salariés ont participé à l’évaluation à chaud, satisfaits de donner leur avis, et les patrons du business ont été bluffés par la finesse des analyses, des indicateurs et des verbatim. »

En 2013, les six zones géographiques du groupe sont concernées : le groupe finance l’évaluation, et chaque zone choisit les pays les plus matures et les formations stratégiques à évaluer. Résultat, 400 sessions évaluées par 6 000 collaborateurs formés et 3 000 managers.

« Certains prédisaient des difficultés avec les centres de formation locaux craignant une prise de contrôle centrale et les conséquences de mauvais résultats éventuels, raconte Laurent Reich. D’autres disaient qu’un système unique ne prendrait pas en compte les spécificités des pays et que l’évaluation représentait une tâche supplémentaire pour les managers. En fait, l’appropriation du dispositif s’est bien déroulée et près de 60 % des managers ont répondu au questionnaire. » Laurent Balagué conseille de ne pas trop les solliciter, de bien choisir les formations à évaluer et d’amener ces encadrants à faire le point avec leurs collaborateurs formés, avant de répondre.

En 2014, le département formation groupe établit la liste des séminaires clés stratégiques à évaluer, en concertation avec les responsables des 18 “pratiques professionnelles”. Au final, plus de 1 000 sessions sont évaluées, par 12 000 salariés et 4 000 managers (ces derniers étant interrogés deux fois en moyenne).

Une mesure d’impact encourageante

Tous pays confondus, la mesure d’impact moyenne des formations restituée par forMetris, définie comme la contribution de la formation au business, dépasse 70 sur 100 (71 en 2013 et 73 en 2014). Les résultats sont communiqués aux prestataires, invités à procéder à des ajustements en cas de sous-performance, et les nouveaux organismes sont informés des niveaux de notes à atteindre. Ce qui en fait un puissant levier de changement : il n’a pas de valeur contractuelle mais entre dans les bilans annuels de chaque prestataire, et les équipes de formation de tous les pays ont accès à tous les résultats.

Pour Laurent Reich, le bilan est triplement positif. Premièrement, « l’administration totalement anonyme par forMetris garantit la qualité des réponses. L’outil ne sert pas à mesurer la performance des salariés ni à mettre en concurrence les pays. Les résultats chiffrés et les verbatim permettent d’ajuster si besoin la durée, le lieu, l’animation, le séquençage, l’équilibre entre la théorie et la pratique, la composition du groupe de stagiaires… »

Deuxièmement, « l’évaluation permet à la fonction formation d’être plus présente à la table du business, sans tomber dans le calcul du retour sur investissement, trop compliqué, mais en communiquant sur l’impact des formations ». Enfin, troisième bénéfice, « la pratique de l’évaluation renforce le dialogue au long cours avec les opérationnels et accroît la capacité à anticiper les besoins liés aux orientations stratégiques à moyen terme ».

Une évaluation généralisée

Conséquence : en 2015, l’évaluation est généralisée à toutes les formations, qu’elles soient groupe, zones ou pays. Avec quelques exceptions motivées : les sessions obligatoires sur la sécurité (« la mise en pratique des formations extincteurs est difficile, voire impossible », assure Laurent Reich), les formations diversité et préparation à la retraite (« moins pertinentes à évaluer ») ou les modules de gestion du temps et du stress (« dont la mise en pratique peut nécessiter des modifications d’organisation »). Autre décision : l’outil forMetris est connecté au SIRH (SAP RH) pour éviter les doublons et faciliter sa diffusion.

Point important : le coût de l’évaluation, désormais pris en charge par chaque filiale, n’est pas un obstacle. Même si le montant de la facture n’est pas communiqué, il serait inférieur à 1 % du montant des investissements mondiaux en formation de L’Oréal.

Auteur

  • Nicolas Lagrange