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L’INTERVIEW : DAMIEN BROCHIER* ANIMATEUR DE LA COMMISSION NATIONALE FORMATION ET COMPÉTENCES DE L’ANDRH (EN PARTENARIAT AVEC LE GARF) SUR LA RÉFORME DE LA FORMATION DEPUIS MARS 2015.

L’enquête | L’INTERVIEW | publié le : 07.07.2015 | L. G.

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L’INTERVIEW : DAMIEN BROCHIER* ANIMATEUR DE LA COMMISSION NATIONALE FORMATION ET COMPÉTENCES DE L’ANDRH (EN PARTENARIAT AVEC LE GARF) SUR LA RÉFORME DE LA FORMATION DEPUIS MARS 2015.

Crédit photo L. G.

« L’entretien professionnel doit être articulé avec la dynamique interne de formation de l’entreprise et avec la dynamique externe du conseil en évolution professionnelle »

Quelle est la maturité des entreprises vis-à-vis de l’entretien professionnel ?

Il y a de fortes différences. Les entreprises qui ont déjà un usage stratégique de la formation n’auront pas de mal à intégrer cette nouvelle donne. Pour celles qui ont plutôt un usage assez instrumental ou adaptatif de la formation – et qui sont à mon avis les cibles de la réforme en cours –, il faudra plus de temps pour intégrer les nouveaux enjeux. En particulier, cette idée de faire des entretiens dont la portée dépasse le cadre annuel de l’élaboration du plan de formation sera difficile à mettre en œuvre.

100 % en mars 2016 : l’objectif sera-t-il tenu ?

Il pourra être tenu formellement, mais il n’est pas sûr que la qualité soit au rendez-vous.

Comment enclencher cette dynamique de réflexion avec des salariés bloqués ou en retrait vis-à-vis de ce sujet ?

L’enjeu est surtout, j’insiste, de tout faire pour ne pas stigmatiser ces populations, au moment où on cherche à mieux les repérer. Il faut arriver à échanger avec elles pour leur montrer l’intérêt de se remettre dans une dynamique d’acquisition de compétences. Il faut partir de ce qu’elles font et de ce qu’elles ont appris à faire au cours du temps. Cela peut leur montrer qu’elles détiennent déjà un « stock » de connaissances et de compétences. Mais cela est plus facile à dire qu’à faire.

Le n + 1 est-il la bonne personne pour mener l’EP ?

La question se pose, dans la mesure où les enjeux liés à cet entretien dépassent a priori le seul cadre du développement des compétences directement opérationnelles à court terme. Des DRH s’interrogent sur le fait de savoir si ce n’est pas à eux de conduire les entretiens. La voie qui semble s’esquisser est de former les managers à la conduite des entretiens en leur expliquant la dynamique dans laquelle ils s’inscrivent.

Est-ce une gageure de vouloir que le salarié parle de son avenir avec son n + 1, alors qu’il ne le souhaite pas forcément ?

Oui, effectivement, l’EP, à travers les perspectives d’échange sur le devenir professionnel qu’il offre au salarié, peut poser des questions de ce type. D’où l’importance de bien le préparer.

Externaliser une partie de l’EP vous semble-t-il envisageable ?

Non, ce serait vider une bonne part de la dynamique attachée à la réalisation de la politique de formation d’une entreprise. Ce qui peut être envisageable en revanche serait d’articuler l’EP et la dynamique interne de formation d’une entreprise avec l’apport du conseil en évolution professionnelle (CEP) auquel un salarié peut avoir droit, à l’extérieur de l’entreprise. Ce n’est cependant pas évident, car les instances en charge du CEP semblent plutôt construire les bases de leur positionnement en extériorité par rapport aux entreprises. Mais il y a un vrai enjeu à établir des liens entre les DRH et les CEP pour trouver un mode de relation bénéfique aux salariés. Si le CEP est vécu comme une sorte de « mini-bilan de compétences », le risque serait que les éléments que le salarié tire d’un entretien avec un CEP soient purement et simplement rejetés par le DRH, au prétexte que c’est lui qui garde la main sur la politique de formation interne. Pourtant, je crois vraiment que le couplage CEP/EP pourrait représenter la base d’un co-investissement formation entre le salarié et l’entreprise.

Quelle forme doit prendre la traçabilité de ces entretiens, dans l’optique de l’entretien des six ans prévu par la loi ?

La plus mauvaise chose serait de s’en tenir à un simple tableau Excel avec des données quantitatives ! Il faut trouver une forme qui mêle des éléments concrets – qu’est-ce que j’ai appris de nouveau cette année ? avec quels moyens ? avec l’aide de qui ? – et des éléments plus formels – attestations, certi ? ficats, éléments de progression professionnelle. L’ensemble doit permettre de savoir si les critères fixés par la loi ont été respectés ou pas.

* Damien Brochier est chef du département travail, emploi et professionnalisation du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq).

Auteur

  • L. G.