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LES EMPLOYEURS IRONT-ILS au-delà du contrat responsable ?

ZOOM | publié le : 23.06.2015 | Séverine Charon

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LES EMPLOYEURS IRONT-ILS au-delà du contrat responsable ?

Crédit photo Séverine Charon

Un texte de janvier 2015 autorise la mise en place d’une surcomplémentaire qui dépasse les plafonds du contrat responsable sans remettre en cause les exonérations fiscales et sociales du socle. En pratique, les entreprises sont encore rares à opter pour cette solution.

Depuis le 1er avril 2015, le caractère “responsable” des contrats santé répond à une nouvelle définition. Le décret qui définit ce nouveau contrat énumère un certain nombre de planchers et de plafonds à l’intérieur desquels les garanties doivent s’inscrire pour qu’employeur et salariés bénéficient du cadre fiscal et social attaché. De l’aveu des assureurs et des courtiers, il est plus simple de partir de zéro et de mettre en place pour la première fois un contrat que de mettre en conformité des couvertures existantes.

évaluation des conséquences financières

Il faut en effet d’abord balayer l’ensemble des garanties actuelles pour déterminer précisément quels postes modifier et, en général, les revoir à la baisse, notamment en optique et en matière de dépassement d’honoraires des médecins. Pour ces derniers, une distinction doit même être introduite entre les praticiens adhérant au contrat d’accès aux soins (CAS) et les autres. En parallèle, il faut revoir d’autres prestations à la hausse. C’est le cas du forfait hospitalier, qui doit désormais être intégralement pris en charge.

Une fois réalisée cette revue de détail, l’assureur ou le courtier se livre à une simulation qui permettra d’évaluer les conséquences financières de la mise en conformité du contrat sur son compte de résultat. Ainsi, le courtier Gras Savoye a mené une revue sur son portefeuille d’entreprises de plus de 1 000 personnes assurées et estime que le passage au nouveau contrat responsable devrait aboutir à une baisse des remboursements de l’ordre de 3 % à 5 %. Quand les salariés sont majoritairement situés en région parisienne, la diminution des prestations (et de fait l’augmentation du reste à charge moyen) peut aller jusqu’à 10 %, précise de son côté la société de conseil Mercer. « La plupart des très grandes entreprises ont commencé à mesurer l’impact du passage au contrat responsable sur leur contrat santé dès le mois de février », observe Olivier Huet, directeur grands comptes chez Harmonie Mutuelle.

Une fois ces éléments en main, l’entreprise peut alors redessiner et renégocier de nouvelles garanties santé, en fonction de ses priorités et des revendications des partenaires sociaux (maîtrise du budget alloué à l’assurance santé, maintien du niveau global des garanties et du reste à charge moyen assumé par le salarié…).

C’est seulement à ce stade que va aussi être négociée et définie l’architecture des garanties. Initialement, assureurs et courtiers annonçaient, de manière assez unanime, l’émergence d’un nouveau modèle comportant un contrat socle collectif et responsable, auquel devaient s’adjoindre une surcomplémentaire collective – éventuellement cofinancée – et un système d’options individuelles souscrites par les salariés.

Plusieurs scénarios se profilent

Depuis la fin du mois de janvier et la publication d’une circulaire de la Direction de la Sécurité sociale, on sait qu’il est désormais possible de proposer un contrat responsable et un second, non responsable, qui ne vient pas “contaminer” le premier. Cette circulaire ouvre une voie aux employeurs qui souhaitent maintenir le niveau de garantie précédent sans trop augmenter le budget global alloué à la complémentaire santé (seule la garantie supplémentaire sera taxée comme un contrat non responsable).

Dans les faits, une fois les répercussions du passage au contrat responsable évaluées, plusieurs scénarios se profilent, et la surcomplémentaire n’y a qu’une place marginale. « Quand le contrat santé est déficitaire, nombre de DRH s’appuient sur ce constat pour conclure que la mise en conformité contribue à rééquilibrer le contrat par la baisse des prestations et permet ainsi d’éviter une nouvelle hausse des cotisations », indique Julien Vignoli, directeur général délégué du courtier Gras Savoye.

Lorsque le contrat est équilibré, et puisque les modifications s’imposent à l’entreprise, celle-ci se propose d’améliorer certains postes, comme le dentaire ou l’audioprothèse, qui ne sont pas limités par le contrat responsable. En réponse à la hausse du reste à charge sur les postes optique et dépassements d’honoraires, l’entreprise peut aussi éventuellement proposer des options facultatives, à la charge du salarié, pour aller au-delà des plafonds du contrat responsable.

« Les négociations ne sont pas toujours faciles, car les partenaires sociaux constatent que certaines prestations vont baisser de manière significative. Alors que les salariés sont demandeurs d’un maintien de garantie, l’entreprise se contente de mettre en place un contrat collectif facultatif, qui ne bénéficie d’aucun financement patronal », explique Vincent Harel, directeur du marché des grands comptes chez Mercer. Les salariés peuvent aussi souscrire de telles options de leur propre chef, en dehors du cadre de l’entreprise. « Le plus souvent, ce sont plutôt des salariés non cadres qui souscrivent ce type d’options, afin de se protéger contre les à-coups dans leurs dépenses », remarque-t-il.

Portabilité des droits du salarié

C’est seulement dans le cas où l’entreprise considère que le niveau global des garanties doit être maintenu que se pose la question de mettre en place une surcomplémentaire en partie financée par l’employeur. Mais de l’avis des courtiers et assureurs, ce cas de figure restera marginal. Car le budget alloué à la complémentaire santé, en augmentation régulière, n’est pas indéfiniment extensible, sachant qu’il devra aussi comprendre le surcoût lié à la portabilité des droits du salarié, qui s’applique au contrat socle et à la surcomplémentaire, si elle est cofinancée.

Une interrogation subsiste

Lorsqu’une entreprise souscrit deux contrats indépendants, un socle dont les garanties s’inscrivent dans le cadre responsable et une surcomplémentaire, collective également, offrant des prestations au-dessus des plafonds responsables, elle sera soumise à la taxe réduite sur les conventions d’assurance à 7 % pour le socle, et à 14 % pour la surcomplémentaire seulement. Il n’y a pas de “contamination” du socle par la surcomplémentaire.

Mais une interrogation subsiste : une entreprise doit-elle financer 50 % au moins du panier minimum de soins instauré par l’ANI ou au moins 50 % de la couverture santé responsable mise en place dans l’entreprise ? Les interprétations divergent et, si certaines entreprises ont opté pour la première possibilité, c’est sans doute parce que le risque ne viendrait pas des Urssaf, mais se limiterait, le cas échéant, à une démarche prud’homale des salariés pour obtenir le financement de 50 % de la couverture responsable.

Auteur

  • Séverine Charon