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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Chronique | publié le : 19.05.2015 |

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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

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LES SENIORS VALENT-ILS LE COÛT ?

L’embauche des seniors fait partie des sujets consensuels : la main sur le cœur et le cœur sur la main, tout DRH qui se respecte jure qu’il est prêt à recruter des personnes de plus de 45 ans (1). Mais s’agit-il de propos sincères, ou politiquement corrects ? Déclarer le contraire nuirait à l’image de l’entreprise, qui pourrait être accusée de discrimination à l’embauche et d’atteinte à sa responsabilité sociale.

Les DRH suivent peut-être aussi le bon vieux principe du « ne fais pas à autrui ce que tu n’aimerais pas que l’on te fasse ». Si, la cinquantaine passée, ils venaient à être licenciés, ils seraient heureux qu’un de leurs confrères daigne les recruter pour se maintenir en emploi au moins jusqu’au jour où ils auront assez cotisé pour prendre un repos bien mérité.

Malgré ces beaux discours, le taux d’emploi des seniors est encore faible, loin derrière celui des pays scandinaves, par exemple. Pourquoi ? Les trois principaux freins sont financiers, culturels et médicaux : les seniors coûteraient cher, s’opposeraient au changement et seraient souvent en arrêt maladie.

La première croyance est partiellement fausse : le salaire horaire brut des seniors moyennement ou pas du tout qualifiés est à peine plus élevé que celui des trentenaires (2). Le surcoût existe essentiellement chez les très qualifiés, mais on peut penser qu’il correspond à l’expérience accumulée. Quant à l’argument selon lequel les aînés sont plus conservateurs que la moyenne, il demeure difficile à objectiver.

Qu’en est-il des absences des seniors pour cause de maladie ?

Une équipe d’économistes de l’université Lille 1 et de l’Iéseg, emmenée par Benjamin Huver, s’est posé la question dans un article paru dans la revue Management & Avenir (3). À partir du cas d’un centre hospitalier de plus de 4000 salariés, ils observent tout d’abord, comme d’autres chercheurs avant eux, que les plus âgés connaissent un taux d’absentéisme supérieur à la moyenne. L’explication est simple : leur corps n’a plus 20 ans ; leur état de santé est dégradé, si bien que la durée de leurs périodes d’absence est plus longue.

En revanche – et c’est l’apport majeur de cette étude – les seniors pratiquent davantage le surprésentéisme (le fait de se rendre au travail alors que l’état de santé justifierait une absence) que la moyenne. Certes, le surprésentéisme est un comportement dangereux pour sa santé, voire pour celle des autres en cas de maladie infectieuse. Mais il peut aussi passer pour le reflet de certaines valeurs : une conscience professionnelle aiguë, une forte motivation et implication au travail, une forme de solidarité avec les collègues, etc.

Par conséquent, embaucher ou pas des seniors revient à un dilemme cornélien pour le recruteur : faut-il préférer des salariés en excellente santé ou bien des salariés exemplaires ? À vous de choisir !

1) J’ai emprunté le titre de cette chronique à trois étudiants de l’ESCP (M. Beaufils, L. Betthaeuser et G. Meteyer). Qu’ils en soient remerciés !

2) D’après les chiffres de l’Insee. Lire à ce sujet <www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/dossier02.pdf>

3) Benjamin Huver et al., “Âge, absence-maladie et présentéisme au travail : le cas d’un établissement de santé régional”, Management & Avenir, 2014.