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L’enquête

GROUPE BPCE : LES SYNDICATS VEULENT UN ACCORD SUR LES CONDITIONS DE TRAVAIL

L’enquête | publié le : 21.04.2015 | Laurent Poillot

Le président du groupe BPCE s’apprête à recevoir les syndicats, qui réclament l’ouverture de négociations sur les conditions de travail.Leur demande : s’inspirer de l’accord de 2012 dans les caisses d’épargne, qui comportait un volet détaillé sur l’évaluation de la charge de travail, mais qui n’a jamais été suivi d’effets.

C’est inédit depuis la création du groupe en 2009 : le 24 mars, les sept syndicats (CFDT, CFTC, CGT, FO, SNE-CGC, SUD et Unsa) du groupe BPCE ont appelé à une journée de grève pour demander une revalorisation des salaires ainsi que l’ouverture de négociations sur les conditions de travail. Le président du groupe, François Pérol, a donc prévu de les recevoir le 23 avril.

La dégradation du pouvoir d’achat dont se plaignent les syndicats va de pair, selon eux, avec une dégradation des conditions de travail. Sur l’ensemble du groupe BPCE, ils ont recensé « au moins 15 suicides et 18 tentatives de suicide au cours de ces quatre dernières années », concernant surtout des responsables d’agence.

Fin septembre 2014, les Échos ont révélé que l’inspection du travail avait constaté, au printemps 2014, un dérapage des amplitudes horaires dans les équipes des risques, des finances et de l’inspection générale du siège de BPCE, au moment d’auditer le bilan des établissements bancaires, avec un exemple de temps de présence hebdomadaire de 78 heures dans l’entreprise.

NON-APPLICATION DES PLANS D’ACTIONS

Peut-être en aurait-il été autrement si l’entreprise avait appliqué l’accord collectif national signé par sa branche des caisses d’épargne sur l’amélioration des conditions de travail, le 30 octobre 2012 ? Un texte qui faisait la part belle à la mesure de la charge de travail. Signé par tous les syndicats à l’exception de SUD, il aborde quatre thèmes d’intervention : l’évaluation et la régulation de la charge de travail, la mesure et la maîtrise du temps de travail, les « espaces d’autonomie » permettant aux salariés de s’exprimer « sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail » et, enfin, l’environnement de travail.

Les différentes dispositions sont énoncées de manière succincte, l’accord renvoyant, pour leur mise en œuvre, à un document blanc annexé à l’accord. Celui-ci est structuré en deux parties. La première donne des repères sur la charge de travail et son évaluation, inspirée des travaux de Pierre Falzon, professeur au Cnam, et de Catherine Sauvagnac, ergonome. La seconde indique la démarche pour mener une évaluation. Les signataires de l’accord avaient imaginé des groupes de travail associant des représentants de la DRH, des managers et des salariés, des « experts des métiers impactés » (surtout les métiers commerciaux, selon les syndicats), des représentants du personnel et de la médecine du travail, et des experts extérieurs – à savoir les Aract et l’Anact. Ces groupes de travail devaient reporter leurs résultats à la direction et à un chargé de projet.

La charge de travail devait être abordée suivant trois entrées : la charge prescrite, qui recouvre « ce qui est attendu par les organisations » et les ressources allouées pour les atteindre ; la charge réelle, incluant « tout ce que les individus et les collectifs de travail mettent en œuvre pour atteindre les objectifs » ; et la charge vécue, se référant « à tout ce qui est ressenti » par les individus pour faire face à leur charge de travail.

AMBIGUÏTÉ DU CHSCT

« Les solutions envisageables pouvaient être de tous ordres », se rappelle Michel Dronne (SNE-CGC): aménagements sur l’organisation ou le temps de travail, apports de moyens tels que la formation, apports technologiques ou d’effectifs… »

Mais les plans d’actions concertés n’ont jamais vu le jour. « Les employeurs ont redouté le risque d’une intrusion dans leur mode de management, illustre notamment Michel Dronne. Un autre frein est venu aussi des CHSCT, dont le positionnement sur ce projet était ambigu. Ils avaient le sentiment que leurs prérogatives pourraient être mises en cause. »

Reste cependant quelques exemples, comme en Champagne-Ardenne-Lorraine, qui a connu un cas de suicide et où l’Anact est intervenue : « Les 250 agences ont été analysées suivant 18 typologies d’activité, commente Jean-David Camus (Unsa). Deux groupes de travail ont été organisés, mais la mise en œuvre de procédures correctives n’a rien donné. »

SOLUTIONS INTERNES

À l’inverse, la Caisse d’épargne Normandie, elle, ne s’est pas inspirée de l’accord de 2012 et s’est passée d’experts : « Nous avons préféré trouver les solutions en interne », commente un porte-parole de la direction. L’Écureuil normand est « la seule Caisse à avoir une direction qualité de vie au travail », se félicite-t-il. C’est l’ancien directeur de la qualité qui en a la responsabilité. A-t-il procédé à une évaluation de la charge de travail ? « On n’a pas envisagé la qualité de vie au travail sous cet angle-là », répond le porte-parole. Pas plus que sous celui du CHSCT, d’ailleurs. Pour améliorer la vie du personnel, la Caisse a offert des prestations d’aide aux devoirs des enfants et une conciergerie d’entreprise.

Sollicitée, la direction du groupe BPCE n’a pas donné suite à nos demandes d’interview.

REPÈRES

Activité

Banque.

Effectif

108 000 collaborateurs.

Produit net bancaire 2014

23,6 milliards d’euros.

Auteur

  • Laurent Poillot